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La jurisprudence de la semaine du 20 au 24 juin 2011

Fonction publique et droit social / Marchés publics et contrats / Organisation administrative et décentralisation / Relations avec les administrés / Responsabilité pénale / Urbanisme

(dernière mise à jour le 16/12/2011)

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Fonction publique et droit social

 Un agent contractuel du service d’aide sociale à l’enfance agressé par un mineur confié peut-il engager la responsabilité sans faute du département en tant que personne responsable de ce mineur ?

Non. Un agent contractuel victime d’un accident du travail ne peut exercer une action de droit commun contre son employeur que si une faute intentionnelle est imputable à ce dernier où à l’un de ses préposés. Ainsi un agent contractuel victime d’une agression ne peut, lorsque les violences sont imputables à un mineur dont le juge des enfants avait confié la garde à son employeur dans le cadre d’une mesure d’assistance éducative, rechercher l’engagement de la responsabilité sans faute de son employeur en tant que personne responsable de ce mineur.

Conseil d’État, 22 juin 2011, N° 320744

 Un agent peut-il être sanctionné disciplinairement pour avoir enregistré une conversation avec son supérieur hiérarchique à l’insu de celui-ci ?

Oui. Ne commet ainsi par d’erreur de droit, le juge des référés qui estime que le moyen tiré du caractère non fautif du recours à un tel procédé n’est pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la sanction disciplinaire prononcée par le maire à l’encontre de l’intéressé.

Conseil d’État, 22 juin 2011, N° 344536

 Absentéisme : une collectivité peut-elle inclure dans la retenue sur traitement pour absence de service fait des jours de week-end ?

Oui dès lors que le week-end est inclus entre deux jours d’absence consécutifs. En effet, en l’absence de service fait pendant plusieurs jours consécutifs, le décompte des retenues à opérer s’élève à autant de trentièmes qu’il y a de journées comprises du premier jour inclus au dernier jour inclus où cette absence de service fait a été constatée. Même si durant certaines de ces journées cet agent n’avait aucun service à accomplir.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 336908

 Un directeur de cabinet peut-il être licencié sans préavis ?

Non. Les articles 39, 40 et 42 du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale sont applicables aux collaborateurs de cabinet recrutés en application de l’article 110 de la loi du 26 janvier 2004 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Les intéressés ne peuvent être licenciés par l’autorité territoriale qu’après un préavis. La date à laquelle le licenciement prend effet doit tenir compte tant de cette période de préavis que des droits à congé annuel restant à courir (ces droits à congé étant déterminés en fonction de la durée des services accomplis, incluant la période de préavis). L’absence de prise en compte des droits acquis au titre de la période de préavis a pour conséquence de rendre illégal le licenciement.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 330182


Marchés publics et contrats

 Délégations de service public (DSP) : l’autorité délégante est-elle tenue de fixer une date limite de validité des offres ?

Non : ni les dispositions de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, ni celles qui ont été prises pour leur application, n’imposent à l’autorité délégante de fixer une date limite de validité des offres.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 347889


 Une collectivité peut-elle, après avoir communiqué à un candidat les motifs du rejet de son offre, substituer de nouveaux motifs en réponse à une demande de précisions ?

Oui : un pouvoir adjudicateur peut, après avoir communiqué à un candidat, les motifs du rejet de son offre, procéder ultérieurement à une nouvelle communication pour compléter ou préciser ces motifs, voire pour procéder à une substitution de motifs, dès lors que les précisions apportées ou les nouveaux motifs invoqués ne sont pas contradictoires avec les premiers communiqués.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 347840


 Délégations de service public (DSP) : le délai de validité des offres édicté par le règlement de mise en concurrence peut-il être prolongé ?

Oui mais uniquement avec avec l’accord de l’ensemble des candidats admis à présenter une offre [2] et sous réserve qu’un changement dans les conditions de la concurrence ou dans les conditions prévisibles d’exécution du contrat ne rende pas nécessaire, dans les circonstances propres à chaque procédure de mise en concurrence [3], la fixation d’une nouvelle date limite ou l’organisation d’une nouvelle procédure de publicité. L’expression d’un tel accord peut résulter notamment, selon les circonstances de l’espèce, de la poursuite par les candidats des négociations avec l’autorité délégante.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 347889


 Un candidat évincé, qui avait antérieurement présenté un recours précontractuel, peut-il exercer un recours contractuel ?

En principe non "dès lors que le pouvoir adjudicateur a respecté la suspension prévue à l’article L. 551-4 et s’est conformé à la décision juridictionnelle rendue sur ce recours". Cependant le concurrent évincé, bien qu’ayant introduit un référé contractuel, peut présenter un recours contractuel, si le pouvoir adjudicateur ne lui a pas notifié le délai de suspension que ce dernier s’imposait entre la date d’envoi de la notification du rejet de l’offre et la conclusion du marché.

Conseil d’État, 24juin 2011, N° 346665


 L’acquisition par un EPCI de bornes d’informations sur le trafic et la desserte de son réseau de transport par autobus constitue-t-elle une activité de mise à disposition du réseau bien que l’exploitation du réseau ait été déléguée ?

Oui : l’acquisition, par un pouvoir adjudicateur, d’un équipement destiné à la constitution d’un réseau de transport public ou s’intégrant à un réseau de transport public déjà constitué doit être regardée, en fonction de son mode de gestion :

 soit comme une activité d’exploitation d’un réseau ;

 soit comme une activité de mise à disposition du réseau, au sens de l’article 135 du code des marchés publics, et par suite comme une activité exercée par une entité adjudicatrice pour l’application de l’article 134 de ce code.

Peu importe que son exploitation ait été ou non déléguée. Commet ainsi une erreur de droit le juge des référés qui considère que l’acquisition, par une communauté d’agglomération, de bornes d’informations sur le trafic et la desserte de son réseau de transport par autobus n’est pas une activité de mise à disposition du réseau, au motif qu’elle en avait délégué l’exploitation. La communauté d’agglomération pouvait légalement engager la passation d’un marché litigieux en tant qu’entité adjudicatrice. En cette qualité, elle pouvait, sans méconnaître ses obligations de publicité et de mise en concurrence, recourir à une procédure négociée en application des dispositions des articles 144, 165 et 166 du code des marchés publics.

Conseil d’État, 24 juin 2011, N° 346529


Organisation administrative et décentralisation

 La loi fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région est-elle conforme à la Constitution ?

Non. Le Conseil Constitutionnel la déclare contraire à la Constitution dès lors que le projet de loi dont est issue la loi déférée n’a pas été soumis en premier lieu au Sénat, comme cela aurait dû être le cas dès lors qu’il s’agissait d’un texte relatif à l’organisation des collectivités territoriales.

Décision du Conseil constitutionnel n° 2011-632 DC du 23 juin 2011 NOR : CSCL1117299S


Relations avec les administrés

 Un établissement public industriel et commercial (EPIC) transformé en établissement public administratif (EPA), est-il tenu, en cours d’examen d’une demande qui lui est présentée à tort, de transmettre la demande à l’autorité administrative compétente ?

Oui. En principe l’obligation de transmission à l’autorité compétente, qui pèse sur l’autorité saisie de la demande, s’apprécie à la date de réception par cette dernière de cette demande. "Toutefois, l’autorité saisie de la demande est également soumise à l’obligation de transmission lorsque, pendant l’examen de la demande, l’organisme dont relève l’autorité compétente pour statuer sur la demande devient une autorité administrative entrant dans le champ d’application des dispositions de la loi du 12 avril 2000".

Conseil d’État, 22 juin 2011, N° 330147


Responsabilité pénale

 Le fait pour un maire d’utiliser le droit de préemption pour empêcher des personnes d’origine extra-européenne d’acquérir des biens immobiliers sur la commune est-il constitutif de discrimination au sens de l’article 432-7 du code pénal ?

Non : « l’exercice d’un droit de préemption, fût-il abusif, ne saurait constituer le refus du bénéfice d’un droit accordé par la loi au sens de l’article 432-7 du code pénal ». Cela ne signifie par autant que d’autres qualifications ne puissent, en fonction des éléments de fait, être retenues contre l’élu.

Cour de cassation, 21 juin 2011, N° 10-85641


Urbanisme

 Une commune engage-t-elle sa responsabilité pour avoir délivré illégalement un certificat d’urbanisme positif alors qu’une modification ultérieure du POS a rendu possible la construction projetée ?

Oui : l’annulation d’un POS a pour effet de remettre en vigueur le POS immédiatement antérieur. La commune qui a délivré un certificat d’urbanisme sur le fondement du POS ainsi annulé, engage sa responsabilité si les anciennes dispositions du POS remises en vigueur n’autorisent pas de construction sur la parcelle litigieuse. Peu importe qu’une nouvelle modification du POS ait ultérieurement rendu possible la construction projetée.

Pour autant seuls les préjudices qui sont la conséquence directe de la décision illégale ouvrent droit à réparation (pour un exemple où la responsabilité de la commune a été retenue voir références en fin d’article). De fait, si la commune a régularisé la situation en modifiant le POS pour permettre la construction projetée, le propriétaire ne peut plus invoquer une perte de la valeur vénale de son bien. La commune ne saurait être tenue responsable du classement ultérieur par le préfet de la parcelle litigieuse en zone jaune, ce qui a conduit le pétitionnaire à renoncer à son projet.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 23 juin 2011, N° 10BX01991

[1Photo : © Treenabeena

[2Sans que s’impose la fixation d’une nouvelle date limite.

[3Eu égard notamment au rapport entre la durée de la procédure et la durée d’exécution du contrat.