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Chute d’un joggeur causé par la présence sur le trottoir d’un socle d’un panneau de signalisation vandalisé : responsabilité de la commune engagée ?

Tribunal administratif de Rennes, 22 septembre 2022 : n°2104110

La commune peut elle être responsable de la chute d’un joggeur causée par la présence, sur le trottoir, d’un socle de panneau de signalisation vandalisé peu de temps avant l’accident ?

Non, dès lors que les services techniques de la commune n’ont pas été prévenus de la dégradation de ce panneau avant l’accident. La commune n’a pas disposé du temps nécessaire pour procéder à la signalisation de l’aspérité (le panneau a été vandalisé moins de 48 heures avant l’accident).
Le juge souligne également que cet obstacle était d’une très faible hauteur (entre 1 et 2 centimètres) de sorte qu’il n’excédait pas les difficultés auxquels les usagers de la route peuvent normalement s’attendre à rencontrer.
Enfin, le juge rappelle que le fait de mettre en place une signalisation après l’accident n’équivaut pas à une reconnaissance de responsabilité de la commune.

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Lors d’un jogging matinal un coureur chute sur le trottoir après avoir buté contre le socle d’un panneau de signalisation vandalisé. Les blessures génèrent une incapacité temporaire totale de 5 jours. Estimant que sa chute est imputable à un défaut d’entretien normal de la voirie, le coureur réclame à la commune l’indemnisation des préjudices subis. La commune refuse, la victime saisit alors le tribunal administratif de Rennes lequel écarte toute responsabilité de la commune.

Certes la chute a bien un lien avec la « présence de l’obstacle au milieu du trottoir, en l’occurrence une pièce métallique scellée dans le revêtement de sol » ainsi que l’atteste un gendarme témoin de l’accident.

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Toutefois, la présence de cette aspérité sur la chaussée dont la hauteur ne dépasse pas 2 centimètres n’excède pas « les difficultés auxquels les usagers de la route peuvent normalement s’attendre à rencontrer ». Cet obstacle ne nécessitait pas non plus une signalisation particulière.

Par ailleurs, le tribunal souligne que la commune précise sans être utilement contestée sur ce point, que le panneau avait été arraché ou scié peu de temps, en tout cas moins de 48 heures, avant la chute du joggeur. Les services techniques de la commune n’ont pas été prévenus de l’absence de ce panneau.

« Dans ces circonstances au regard de la chronologie des faits, la commune (...) qui n’avait pas été alertée suffisamment tôt de la dégradation du panneau, n’a pas disposé, avant l’accident (...) du temps nécessaire pour procéder à la signalisation de cette très faible aspérité ».

Le renforcement des dispositifs de sécurité après un accident équivaut-il à une reconnaissance de responsabilité de la commune ?

Enfin, le juge rappelle que le fait de mettre en place une signalisation après un accident ne permet pas de caractériser un défaut d’entretien normal à la date de survenue du dommage engageant la responsabilité de la collectivité. Suite à la chute du joggeur, un cône bicolore a été mis en place pour signaler la présence de l’aspérité.

Une collectivité peut en effet très bien renforcer le dispositif de sécurité après un accident sans que le juge considère que le dispositif en place avant le drame était insuffisant. Bien entendu il est toujours préférable d’anticiper et de ne pas attendre l’accident avant d’agir mais, pour autant, le fait de renforcer un dispositif de sécurité après un accident ne caractérise pas automatiquement un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public engageant la responsabilité de la collectivité.

Une collectivité peut-elle être tenue responsable de la chute d’un coureur qui s’est aventuré de nuit sur une voie en cours de réfection ?

Tribunal adminstratif de Rennes, 22 septembre 2022 : n°2104110 PDF)

[1Photo : Sporlab sur Unsplash