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Fonction publique

Réponse du 17/05/2012 à la question écrite n°16812 de M. Jean Louis Masson.

Un agent ayant obtenu en référé la suspension d’une mesure de révocation peut-il être contraint de rembourser les indemnités-chômage déjà perçues ?

 [1]


Non : si le fonctionnaire doit dans cette hypothèse être réintégré et percevoir à nouveau son traitement qu’il ne peut cumuler avec les indemnités chômage, il ne peut en revanche être contraint à rembourser les allocations perçues antérieurement à l’ordonnance de suspension. En effet en cas d’annulation ultérieure de la sanction par le juge du fond, celui-ci pourra toujours moduler dans le temps les incidences de la décision d’annulation, en décidant par exemple qu’elle ne prendra effet qu’à une date qu’il détermine notamment pour éviter un cumul de rémunérations.

La révocation : une perte involontaire d’emploi

« Le droit au versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi est ouvert aux agents publics dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités qu’aux agents du secteur privé conformément à l’article L. 5424-1 du Code du travail. En application de l’article L. 5422-1 du même code, ont droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi les travailleurs involontairement privés d’emploi, aptes au travail, recherchant un emploi et qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure. Le Conseil d’État, dans un arrêt n° 96359 du 9 octobre 1992, a considéré que la révocation d’un fonctionnaire était un cas de privation involontaire d’emploi. Par conséquent, sous réserve qu’il remplisse toutes les conditions, un agent territorial révoqué a droit à percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi. Dans le secteur privé, de la même manière, les salariés licenciés pour faute ont également droit au versement du revenu de remplacement du chômage, puisque la réglementation applicable ne prévoit pas de dérogation pour ce type de licenciement. »

Référé-suspension

« S’agissant d’une éventuelle requête en référé dirigée contre un arrêté municipal de révocation, il convient de rappeler que le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire et n’est pas saisi du principal [2]. Il n’a donc pas vocation à se prononcer sur l’annulation de l’acte mais peut prononcer sa suspension, notamment dans le cadre de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, qui exige pour cela trois conditions cumulatives : il faut qu’une situation d’urgence soit caractérisée, qu’un moyen soit de nature à créer, en l’état de l’instruction du dossier, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée et enfin, qu’une requête en annulation ait été déposée. »

Effets de la suspension de la révocation sur le versement des indemnités de chômage

« Une mesure de suspension, par le juge des référés, de l’arrêté de révocation, emporterait obligation de réintégration de l’agent jusqu’au jugement statuant au fond [3]. Par conséquent, le versement des allocations de chômage serait suspendu dans la mesure où le fonctionnaire percevrait de nouveau son traitement. Cette décision de suspension ne saurait cependant avoir pour effet de contraindre l’agent au remboursement des sommes perçues jusque là. En effet, dans l’hypothèse même où le juge du fond prononce l’annulation d’un acte administratif, il peut prendre en considération les conséquences de la rétroactivité de l’annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence, et donc moduler dans le temps les incidences de la décision d’annulation, en décidant par exemple qu’elle ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine [4]. »

Réponse du 17/05/2012 à la question écrite n°16812 de M. Jean Louis Masson.

 La révocation d’un agent est assimilée à une perte involontaire d’emploi ouvrant droit pour l’intéressé aux allocations chômage. Il en est de même dans le secteur privé pour les salariés licenciés pour faute. Rappelons que s’agissant d’un fonctionnaire, la collectivité doit assumer la charge et la gestion de l’allocation chômage (système d’auto-assurance), l’adhésion au régime d’assurance chômage n’étant possible que pour les agents non titulaires. Ainsi une collectivité qui révoque un fonctionnaire continue à le prendre en charge financièrement, du moins tant que celui-ci a droit aux indemnités-chômage, ce qui peut être relativement dissuasif notamment pour de petites collectivités.

 L’arrêté de révocation peut être suspendu (mais pas annulé) par le juge des référés. Dans cette hypothèse, l’agent doit être réintégré et percevoir de retour son traitement qu’il ne peut cumuler avec les indemnités de chômage.

 L’intéressé ne peut en revanche être contraint de rembourser les allocations perçues avant l’ordonnance du juge des référés. En effet il sera toujours possible au juge du fond, qui annulerait ultérieurement la mesure de révocation, de limiter dans le temps les conséquences d’une telle annulation.


Textes de référence.

 Article L 5424-1 du Code du travail.

 Article L 5422-1 du Code du travail.

 Article L 521-1 du Code de la justice administrative.


Etes-vous sûr(e) de votre réponse ?

Une collectivité peut-elle être contrainte de verser des allocations chômage à un fonctionnaire démissionnaire ?

Une collectivité peut-elle recourir aux services de détectives privés pour recueillir des éléments de preuve contre un agent suspecté d’exercer, sans autorisation, une activité privée parallèle ?

[1Photo : © Tkemot

[2Article L. 511-1 du code de justice administrative.

[3CE, 21/12/2001, req, n° 237774

[4CE, 11/05/2004, req. n° 255886