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Responsabilité

Responsabilité pénale non intentionnelle des élus locaux

Un élu local peut-il engager sa responsabilité pénale pour homicide et blessures involontaires bien qu’il n’ait pas causé directement l’accident ?

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Oui : l’auteur indirect d’un accident peut engager sa responsabilité pénale s’il a violé une obligation particulière de sécurité imposée par la loi ou le règlement ou s’il a commis une faute caractérisée exposant ainsi autrui à un danger qu’il ne pouvait ignorer.

"Les conditions de mise en cause de la responsabilité pénale pour des faits non intentionnels ont été précisées par les dispositions de l’article 121-3 du code pénal, successivement modifiées par la loi n° 96-393 du 13 mai 1996 et la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000".

Diligences normales

"Dans un premier temps, l’article 1er de la loi n° 96-393 du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d’imprudence ou de négligence a inséré un nouvel alinéa 2 à l’article 121-3 du code pénal pour limiter les conditions d’engagement de la responsabilité pénale en matière de fautes non intentionnelles.

L’alinéa 2 de l’article 121-3 du code pénal dispose ainsi qu’il n’y a délit que si l’auteur des faits n’a pas accompli « les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ».

Le même article de la loi du 13 mai 1996 a également complété les dispositions des articles L. 2123-34, L. 3123-8 et L. 4135-8 du code général des collectivités territoriales pour préciser les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale des élus des exécutifs communaux, départementaux et régionaux pour des faits non intentionnels accomplis dans l’exercice de leurs fonctions en tenant compte des « difficultés propres aux missions que la loi [leur] confie ».

A causalité directe, faute simple ; à causalité indirecte, faute qualifiée

"Dans un deuxième temps, l’article 1er de la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000, dite « loi Fauchon », a complété l’article 121-3 du code pénal par l’insertion d’un nouvel alinéa 3 afin d’encadrer plus précisément les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale en matière de fautes non intentionnelles.

L’alinéa 3 de l’article 121-3 du code pénal dispose désormais qu’en cas de lien de causalité indirect entre la faute et le dommage, la responsabilité pénale des personnes physiques pour faute non intentionnelle ne peut être engagée que s’il est établi qu’elles ont « soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ».

La chambre criminelle de la Cour de cassation a ainsi jugée dépourvue de base légale la condamnation par les juges du fond d’un maire sans identifier, d’une part, la source et la nature de l’obligation légale ou réglementaire prétendument violée, d’autre part, l’existence d’une faute caractérisée résultant de l’absence d’accomplissement par le maire des diligences normales (Cass, crim, 18 juin 2002, n° 01-86539)".

Pas de nouvelle réforme en vue

"Au regard de ces éléments, les dispositions de l’article 121-3 du code pénal, successivement modifiées par la loi n° 96-393 du 13 mai 1996 puis par la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000, encadrent de manière suffisamment précise les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale des personnes physiques, et notamment des élus locaux, pour des faits non intentionnel. Le Gouvernement n’envisage pas de modification législative à ce jour".

Réponse du 01/09/2011 à la question N° 07936 de M. Marc Daunis

 Un élu local peut engager sa responsabilité pénale pour homicide et blessures involontaires bien qu’il n’ait pas directement causé le dommage. Cela suppose néanmoins qu’une faute qualifiée soit établie à son encontre : soit qu’il ait méconnu une obligation particulière ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ; soit qu’il ait exposé autrui (usager, administré, fonctionnaire de la collectivité...) à un risque qu’il ne pouvait ignorer.

 Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 2000, l’Observatoire Smacl des risques de la vie territoriale constate un recentrage de la répression, pour ce type de contentieux, sur les collectivités territoriales. Depuis 1994, en effet, les personnes morales de droit public peuvent engager leur propre responsabilité pénale (uniquement cependant pour les activités susceptibles de délégation de service public). Pour approfondir le sujet, découvrez gratuitement le rapport annuel de l’Observatoire.


Références

 Article 121-3 du code pénal

 Article L2123-34 du code général des collectivités territoriales


Voir aussi

 Une ambiguïté de la signalisation peut-elle être sanctionnée pénalement en cas d’accident ? (accès réservé aux sociétaires Smacl)

 La clémence de la collectivité à l’égard des agents qui ne respectent pas les consignes de sécurité peut-elle exonérer le chef d’équipe en cas d’accident ?

[1Photo : © Ene