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La jurisprudence de la semaine du 22 au 26 novembre 2010

Retrouvez une sélection de décision de justice intéressant les collectivités territoriales et les associations.

(dernière mise à jour le 10/05/2011)

 [1]


Jurisprudence constitutionnelle

 Peut-on se faire se confisquer son véhicule en cas de très grand excès de vitesse ?

Oui : les excès de vitesse peuvent entraîner la confiscation du véhicule à partir de 50 kilomètres / heure au-delà de vitesse maximale autorisée (sous réserve que le conducteur soit le propriétaire du véhicule). Le Conseil constitutionnel juge cette sanction proportionnée à la gravité de l’infraction.

Conseil Constitutionnel, 26 novembre 2010, n° 2010-66 QPC


 L’article L. 3212-7 (ancien article 337) du code de la santé publique relatif à l’hospitalisation d’office est-il conforme à la Constitution ?

Non :

 "en prévoyant que l’hospitalisation sans consentement peut être maintenue au-delà de quinze jours sans intervention d’une juridiction de l’ordre judiciaire, les dispositions de l’article L. 337 méconnaissent les exigences de l’article 66 de la Constitution" ;

 "ni l’obligation faite à certains magistrats de l’autorité judiciaire de visiter périodiquement les établissements accueillant des personnes soignées pour des troubles mentaux ni les recours juridictionnels dont disposent ces personnes pour faire annuler la mesure d’hospitalisation ou y mettre fin ne suffisent à satisfaire à ces exigences".

Le législateur a jusqu’au 1er août 2011 pour remédier à cette inconstitutionnalité.

Conseil constitutionnel, 26 novembre 2010, n° 2010-71 NOR : CSCX1030159S


Jurisprudence du Tribunal des conflits

 Un litige relatif relatif au non renouvellement d’un titre d’occupation du domaine privé consenti par une convention relève-t-il de la compétence du juge judiciaire ?

Oui dès lors que la convention ne comporte aucune clause exorbitante et n’est pas détachable de la gestion du domaine privé. "La contestation par une personne privée de l’acte, délibération ou décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu’en soit la forme, dont l’objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n’affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève, à ce titre, de la compétence du juge judiciaire (...). Il en va de même de la contestation concernant des actes s’inscrivant dans un rapport de voisinage." Relève ainsi de la compétence du juge judiciaire l’acte par lequel le maire d’une commune refuse à une société exploitant la brasserie d’un théâtre le renouvellement du titre d’occupation de locaux dépendant de l’immeuble abritant le théâtre municipal consenti par une convention ne comportant aucune clause exorbitante et non détachable de la gestion du domaine privé.

Tribunal des conflits, 22 novembre 2010, N° 10-03764


 Les contrats d’accompagnement dans l’emploi et les contrats d’avenir sont-ils des contrats de travail de droit privé ?

Oui. "En conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l’exécution, de la rupture ou de l’échéance de ces contrats relèvent en principe de la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire".

Cependant :

 "d’une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée, notamment, entre l’Etat et l’employeur, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée" ;

 "d’autre part, le juge administratif est également seul compétent pour tirer les conséquences d’une éventuelle requalification d’un contrat, soit lorsque celui-ci n’entre en réalité pas dans le champ des catégories d’emplois, d’employeurs ou de salariés visés par les dispositions du code du travail fixant le régime de ces contrats, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d’une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire".

Tribunal des conflits, 22 novembre 2010, N° 10-03789

La solution est identique pour les contrats " emploi-solidarité " et " emploi-consolidé ".

Tribunal des conflits, 22 novembre 2010, N° 10-03746


Jurisprudence judiciaire

 Un coordonnateur d’ouvrage, titulaire d’une délégation générale pour assurer la sécurité d’un chantier, peut-il être tenu responsable du non respect des consignes de sécurité par les salariés d’une entreprise sous-traitante ?

Non dès lors que l’intéressé a rempli ses obligations en donnant les instructions requises : il ne peut être tenu pour responsable du non-respect desdites instructions par les préposés de la société sous-traitante chargés du gardiennage et de la sécurité, sur lesquels il n’exerçe aucun pouvoir de commandement. La Cour de cassation précise également que "la qualification de faute caractérisée ne saurait se déduire du degré de proximité du manquement incriminé avec le dommage".

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 novembre 2010, N° 09-85152


 Le juge peut-il déduire la commission d’une faute caractérisée du seul lien de proximité entre un manquement à un règle de sécurité et la survenance d’un accident ?

Non : « la qualification de faute caractérisée ne saurait se déduire du degré de proximité du manquement incriminé avec le dommage ».

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 novembre 2010, N° 09-85152


 L’alcoolémie de la victime d’un accident du travail constitue-t-elle une cause d’exonération pour l’employeur ?

Non : "l’état d’imprégnation alcoolique de la victime ne saurait exonérer la personne morale de sa responsabilité, cette faute ne revêtant pas un caractère exclusif".

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 novembre 2010, N° 09-85115


 En cas de groupement d’entreprises à l’occasion de l’attribution d’un marché, qui est responsable en cas d’accident du travail ?

C’est "la personne morale, membre du groupement, qui est l’employeur de la victime, ou, en cas de recours à une main-d’œuvre intérimaire, de la personne morale ayant la qualité d’entreprise utilisatrice au sens des dispositions du code du travail relatives au travail temporaire".

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 novembre 2010, N° 09-85115


 Un maire peut-il, pour préserver un site naturel, interdire l’accès aux véhicules sur certaines voies communales y compris pour les propriétaires de parcelles situées dans la zone protégée ?

Oui : les maires peuvent aggraver les interdictions de circulation dans les espaces naturels faites aux véhicules terrestres à moteur par les articles L. 321-9 et L. 362-1 du code de l’environnement et interdire l’accès aux voies ou secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre la protection de ces espaces. Cette interdiction peut s’appliquer y compris aux propriétaires de parcelles dans les zones concernées s’il n’existe pas de mesures alternatives moins restrictives possibles pour protéger efficacement lesdits espaces. Ces dispositions ne peuvent toutefois s’appliquer ni aux véhicules utilisés pour assurer une mission de service public, ni, de façon permanente, aux véhicules utilisés à des fins professionnelles de recherche, d’exploitation ou d’entretien des espaces naturels.

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 novembre 2010, N° : 10-85827


Jurisprudence administrative

 Une association qui, pour l’exercice d’une mission de service public, est titulaire d’un bail emphytéotique sur un immeuble d’une collectivité publique, est-elle redevable de la taxe foncière ?

Oui :

 Si les immeubles communaux ou départementaux affectés à un service public ou d’utilité générale sont exonérés de taxe foncière c’est à la condition qu’ils ne soient pas productifs de revenus. Dès lors qu’un département perçoit une rémunération même symbolique d’un bail emphytéotique, l’exonération de taxe foncière ne joue plus.

 C’est à l’emphytéote (ici à l’association) de s’acquitter de la taxe foncière. Peu importe que celui-ci exerce une mission de service public et qu’il ne tire pas de revenus de son activité. En effet la condition relative à l’absence de revenus doit s’apprécier au regard de la personne publique propriétaire du bien.

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 323982


 Les rejets de candidatures à une délégation de service public (DSP) doivent-ils être motivés au titre de la loi de 1979

Non : "la décision de rejet d’une candidature dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat portant délégation de service public ne constitue pas le refus d’une autorisation au sens des dispositions de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; (...) elle n’entre dans aucune autre catégorie de décision administrative devant faire l’objet d’une motivation en application de ces dispositions".

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 336264


 DSP : une collectivité peut-elle prendre en compte, pour apprécier l’aptitude d’un candidat à assurer la continuité du service public, celle qu’il a manifesté dans le cadre d’une précédente délégation ?

Oui à condition de prendre également en considération tout autre élément du dossier produit par le candidat. une commission des délégations de services publics d’une commune peut ainsi, après avoir pris en considération l’ensemble des documents et pièces produits, tenir compte des fautes commises par le candidat dans l’exécution d’une précédente DSP [2]

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 336264


 Marchés publics de travaux : une collectivité peut-elle différer le règlement d’un marché résilié aux frais et risques de l’entrepreneur ?

Oui mais uniquement tant que le marché de substitution conclu avec une autre entreprise n’a pas été exécuté et réceptionné et tant que le décompte général de ce marché n’est pas devenu définitif. En revanche la personne publique ne peut se prévaloir de ces dispositions [3], lorsqu’elle renonce à la passation d’un marché de substitution, pour refuser le règlement de ses dettes contractuelles à l’égard du titulaire du marché résilié.

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 330648


 Un candidat à une délégation de service public portant sur des lots distincts peut-il demander l’annulation pour excès de pouvoir de tout acte détachable du contrat ?

non : "un candidat à une délégation de service public portant sur des lots distincts n’a intérêt, en cette qualité, à demander l’annulation pour excès de pouvoir d’un acte détachable du contrat, que dans la mesure où cet acte se rapporte à l’attribution du lot ou des lots pour lesquels il a présenté sa candidature".

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 336265


 DSP : la délibération par laquelle une collectivité se prononce sur le principe d’une délégation de service public local peut-elle être déférée au juge de l’excès de pouvoir ?

Oui. Il s’agit d’une véritable décision et non d’une simple mesure préparatoire (insusceptible d’un recours pour excès de pouvoir).

Conseil d’État, 24 novembre 2010, N° 318342


 Fonction publique : une suspension d’un agent à titre conservatoire pendant la durée d’une procédure disciplinaire peut-elle faire l’objet d’un référé-suspension ?

Non : "la décision, fût-elle illégale, prononçant à titre conservatoire la suspension d’un agent public pendant la durée d’une procédure disciplinaire, ne constitue pas, par elle-même, une atteinte à une liberté fondamentale au sens des dispositions (...) de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ".

Conseil d’État, 26 novembre 2010, N° 344393


 Fonction publique : le fait pour un directeur général de service (DGS) de qualifier son maire de "Roi soleil" justifie-t-il une rétrogradation ?

Non. Pour irrespectueux qu’ils soient, de tels propos ne sauraient justifier à eux seuls une rétrogradation.

Conseil d’État, 26 novembre 2010, N° 315468


 La police des installations classées peut-elle s’exercer sur des usines qui ont cessé de fonctionner ?

Oui : « l’autorité administrative peut prendre à tout moment, à l’égard de l’exploitant d’une installation classée, les mesures qui se révèleraient nécessaires à la protection des intérêts énumérés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement, y compris après sa mise à l’arrêt définitif ».

Conseil d’État, 26 novembre 2010, N° 323534


 Urbanisme : le maire peut-il s’opposer à la construction d’une éolienne de faible dimension (et qui par suite, ne requiert ni permis de construire, ni déclaration de travaux, ni aucune autre autorisation de construire) en s’appuyant sur les dispositions figurant dans le règlement du plan d’occupation des sols de la commune ?

Oui. Un maire peut ainsi s’opposer à la construction d’une éolienne sur une parcelle classée par le POS en zone NCa où seules sont admises l’édification de constructions directement liées et nécessaires aux activités de la zone. Peu importe que la construction projetée, compte tenu de sa faible dimension, entre dans le champ d’application des dispositions du 8° de l’article R. 421-1 du code de l’urbanisme (dans sa rédaction applicable à l’époque des faits) et, par suite, ne requiert ni permis de construire, ni déclaration de travaux, ni aucune autre autorisation de construire. Cette circonstance est en effet sans incidence sur l’opposabilité des dispositions figurant dans le règlement du plan d’occupation des sols de la commune.

Conseil d’État, 26 novembre 2010, N° 320871

[1Photo : © Treenabeena

[2l’exploitant n’avait pas remédié à d’importants troubles de voisinage et nuisances en dépit de nombreuses demandes et actions engagées pour les faire cesser. Il avait en outre poursuivi l’exploitation de son établissement construit sur le domaine public longtemps après l’expiration de sa délégation.

[3Troisième alinéa du 4 de l’article 49 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux