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Passeports et cartes nationales d’identité : les incidences de la question préjudicielle de constitutionnalité posée par le Conseil d’Etat

Une analyse de Me Ghislain FOUCAULT, Avocat à la Cour Cabinet SEBAN & Associés

Les contentieux relatifs au traitement des demandes de cartes nationales d’identité et de passeports pourraient être relancés par la question prioritaire de constitutionnalité, posée par le Conseil d’Etat, dans le cadre du litige qui oppose la ville de Besançon à l’Etat. Retrouvez l’analyse de Me Ghislain FOUCAULT [1]


 [2]

En application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’Etat, dans sa décision du 25 juin 2010, vient de renvoyer au Conseil Constitutionnel la question de la constitutionnalité des paragraphes II et III de l’article 103 de la loi n° 2008-1443, du 30 décembre 2008, de finances rectificative pour l’année 2008 [3].

Il a ainsi considéré que la question de savoir si les paragraphes II et III de cet article étaient ou non contraires « aux droits et libertés garantis par la Constitution, [et] notamment au principe de séparation des pouvoirs garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, à laquelle renvoie le Préambule de la Constitution » est « une question présentant un caractère sérieux ».

Or, cet article est celui qui a eu pour objet de mettre un terme aux contentieux engagés par de nombreuses communes en donnant une base légale pour l’avenir au transfert de la gestion des demandes de titres [4] et en interdisant aux communes de se prévaloir, pour la période antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2008, de l’illégalité des décrets du 25 novembre 1999 et du 26 février 2001 qui avaient opéré ce transfert [5].

En contrepartie de cette interdiction, le paragraphe III de l’article 103 a mis en place un mécanisme d’indemnisation légale pour réparer les communes du préjudice qu’elle avait subi sur la période 2005-2008. Cette indemnisation légale s’est cependant révélée bien inférieure au préjudice réel des communes.

On notera à cet égard que la question prioritaire de constitutionnalité ne concerne donc pas le paragraphe I de l’article 103 qui confère, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2008 c’est-à-dire depuis le 31 décembre 2008, une base légale au transfert aux communes de la gestion des demandes de titres d’identité.

Pour autant, la décision du Conseil Constitutionnel pourrait ouvrir une brèche permettant aux communes d’engager une action contentieuse pour obtenir une réparation intégrale de leur préjudice antérieur à la date du 31 décembre 2008, en complément de l’indemnisation qu’elles auraient déjà obtenues dans le cadre d’un précédent contentieux ou en complément de l’indemnisation légale mis en place en application du paragraphe III de l’article 103.

L’alinéa deux de l’article 62 de la Constitution précise en effet que :

« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause ».

Si le Conseil Constitutionnel considérait que les paragraphes II et III de l’article 103 de la loi du 30 décembre 2008 étaient inconstitutionnels, deux cas de figure seraient donc envisageables :

 1er cas de figure : Les paragraphes II et III de l’article 103 de la loi du 30 décembre 2008 pourraient être abrogés purement et simplement.

 2ème cas de figure : Le Conseil constitutionnel reporte à « une date ultérieure » les effets de l’abrogation


Télécharger l’intégralité de l’étude Me Ghislain FOUCAULT


Conseil d’Etat 25 juin 2010 n° 326358

[1Avocat à la Cour
Cabinet SEBAN & Associés

[2Photo : © Marc Dietrich

[3CE, 25 juin 2010, Commune de Besançon, n° 326358

[4paragraphe I de l’article 103

[5paragraphe II de l’article 103