Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Nouveau correspondant incendie et secours dans les communes : des attributions qui ne sont pas neutres en termes de responsabilité

Dernière mise à jour le 09/09/2022

Depuis la loi Matras, chaque conseil municipal doit désigner un correspondant incendie et secours. Un décret d’application précise les contours de cette obligation et la définition des attributions qui ne sont pas neutres en termes de responsabilité. Les communes ont jusqu’au 1er novembre 2022 pour se mettre en conformité.

 [1]

Depuis la loi Matras (loi n°2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels) chaque conseil municipal doit désigner un correspondant incendie et secours sauf s’il compte un adjoint au maire ou un conseiller municipal chargé des questions de sécurité civile.

 
 Si la commune a déjà un adjoint ou un conseiller chargé de la sécurité civile, celui-ci est d’office le correspondant incendie et secours avec les attributions fixées par le décret. Il y a une certaine logique et cohérence. On peut néanmoins s’interroger si, par souci de clarté, il ne serait pas plus prudent de prendre un nouvel arrêté de délégation définissant le nouveau périmètre de celle-ci. Pour être légal l’arrêté de délégation doit en effet expliquer avec clarté et précision la nature et l’étendue des pouvoirs qui font l’objet de la délégation. Par ailleurs seule une délégation de fonction en bonne et due forme (par un arrêté) peut opérer transfert de responsabilité pénale. A été ainsi cassé l’arrêt qui a retenu la responsabilité pénale pour homicide involontaire de deux conseillers municipaux sur la base d’une délégation de fait qui leur aurait été consentie tacitement (Cour de cassation, chambre criminelle, 18 juin 2013, N° 12-84368. Rappelons que s’agissant de la responsabilité pénale, la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre criminelle, 4 septembre 2007, N° 07-80072 applique aux collectivités, les mêmes critères que ceux applicables aux entreprises pour vérifier si la délégation opère ou non transfert de responsabilité. Trois critères cumulatifs doivent être réunis : celui qui reçoit la délégation doit avoir l’autorité, les compétences et les moyens pour accomplir ses missions. Si l’un de ses critères fait défaut, le maire reste responsable. Si les trois critères sont réunis c’est l’adjoint (ou le conseiller délégué) qui engage sa responsabilité.
 

Ce correspondant doit être l’interlocuteur privilégié du service départemental ou territorial d’incendie et de secours dans la commune sur les questions relatives à la prévention, la protection et la lutte contre les incendies. Il a pour missions l’information et la sensibilisation du conseil municipal et des habitants de la commune sur l’ensemble des questions relatives à la prévention et à l’évaluation des risques de sécurité civile, à la préparation des mesures de sauvegarde, à l’organisation des moyens de secours, à la protection des personnes, des biens et de l’environnement et aux secours et soins d’urgence aux personnes victimes d’accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi qu’à leur évacuation.

 

Un décret du 29 juillet 2022 (Décret n°2022-19091) clarifie les modalités de création et d’exercice de cette nouvelle fonction.

 

Ainsi, le nouvel article D.731-14 du Code de la sécurité intérieure créé par le décret précise que la désignation du correspondant incendie et secours (désignation par le maire parmi les adjoints ou les conseillers municipaux) intervient :

 dans les six mois qui suivent l’installation du conseil municipal ;
 en cas de vacance de la fonction de correspondant incendie et secours, lors de la première réunion du conseil municipal qui suit cette vacance ;
 pour les mandats en cours dans un délai de trois mois à compter de l’entrée en vigueur du décret.

 

Les communes ont donc jusqu’au 1er novembre pour se mettre en conformité.

 

Le maire doit communiquer le nom du correspondant incendie et secours au représentant de l’Etat dans le département et au président du conseil d’administration du service d’incendie et de secours.

 

Dans le cadre de ses missions d’information et de sensibilisation des habitants et du conseil municipal, le correspondant incendie et secours peut, sous l’autorité du maire :

 participer à l’élaboration et la modification des arrêtés, conventions et documents opérationnels, administratifs et techniques du service local d’incendie et de secours qui relève, le cas échéant, de la commune ;
 concourir à la mise en œuvre des actions relatives à l’information et à la sensibilisation des habitants de la commune aux risques majeurs et aux mesures de sauvegarde ;
 concourir à la mise en œuvre par la commune de ses obligations de planification et d’information préventive ;
 concourir à la définition et à la gestion de la défense extérieure contre l’incendie de la commune.

 
L’absence de désignation d’un correspondant n’est pas directement sanctionnée mais pourrait être pris en compte par le juge comme élément à charge pour engager la responsabilité du maire en cas de sinistre ou de catastrophe. Tout comme l’absence de plan communal de sauvegarde. L’absence de PCS était l’un des éléments à charge retenu contre l’ancien maire de La Faute-sur-Mer condamné pour homicide involontaire (Inondations mortelles en zone urbanisée : responsabilité civile personnelle des élus ?). Les juges ont retenu à son encontre :
 l’absence d’information de la population sur les risques naturels connus dans la commune, les mesures de prévention des risques, les modalités de l’alerte, l’organisation des secours et les mesures prises par la commune pour gérer le risque ;
 l’absence de l’information biennale de la population exigée par l’article L. 125-2 alinéa 2 du code de l’environnement
 le défaut d’établissement du DICRIM, document rendu obligatoire par le code de l’environnement suite à la prescription du PPRI ;
 le défaut d’installation des repères de crue ;
 le défaut d’élaboration de diagnostic de vulnérabilité des habitations situées derrière la digue ;
 le défaut d’information des risques réels et sérieux d’inondation dès le 26 février 2010 à l’annonce de la survenance de la tempête ;
 l’absence d’établissement d’un Plan de secours pour la commune ;
 l’absence d’établissement d’un Plan communal de sauvegarde (PCS) ;
 l’absence d’organisation d’un dispositif particulier de surveillance de la digue entre le 27 et le 28 février 2010.
Quand on met en parallèle ces éléments retenus à charge avec les attributions du nouveau correspondant incendie et secours, notamment celles relatives à l’information de la population, force est de constater que les attributions du correspondant incendie et secours ne sont pas neutres en termes de responsabilités potentielles. Un intérêt supplémentaire pour les élus concernés de penser, s’ils ne l’ont déjà fait, à souscrire une assurance personnelle les couvrant dans l’exercice de leur mandat. C’est l’objet du contrat "Sécurité élus" que propose SMACL Assurances.
 

.

[1Photo : Issy Bailey sur Unsplash