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La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - Juin 2020

Juridiscope territorial et associatif - Dernière mise à jour le 28/02/2022

Retrouvez les décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire Smacl des risques de la vie territoriale & associative.

Les archives

Avertissements

🚨 Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les personnes poursuivies bénéficient toujours de la présomption d’innocence.

Le but de cette rubrique n’est pas de jeter le discrédit sur les acteurs de la vie territoriale et associative qui, comme le démontrent nos chiffres, sont intègres et diligents dans leur très grande majorité, mais de recenser et résumer les décisions de justice, en respectant l’anonymat des personnes impliquées, pour attirer l’attention des acteurs publics locaux et associatifs sur les risques juridiques encourus dans l’exercice de leurs fonctions et leur permettre de dégager des axes de prévention pertinents dans leurs pratiques quotidiennes.

Les symboles 🔴 ou 🔵 ne constituent pas un jugement de valeur mais sont de simples repères visuels permettant au lecteur d’identifier plus facilement l’issue favorable (🔵) ou défavorable (🔴) de la procédure pour les personnes mises en cause.

🔴 Tribunal correctionnel de Bordeaux, 2 juin 2020

Condamnation d’une adjointe au maire (commune de plus de 10 000 habitants) pour extorsion de fonds. Il lui est reproché d’avoir obtenu dans un cadre privé, avec la complicité d’un policier également condamné (un an d’emprisonnement avec sursis), le versement d’une somme d’argent (12 000 euros) de la part d’un expert en échange de l’abandon de poursuites à son encontre. L’élue est condamnée à huit mois d’emprisonnement avec sursis, le policier à un an d’emprisonnement avec sursis.

🔴 Tribunal correctionnel de Paris, 2 juin 2020

Condamnation du dirigeant d’une association de prévention... de la récidive pour abus de confiance, escroquerie, faux en écriture et blanchiment le tout en état de récidive ! Il est condamné à cinq ans d’emprisonnement ferme, au paiement de 150 000 euros d’amende ainsi qu’à une interdiction définitive de diriger une association ou une société. Son ex-compagne qui présidait l’association est condamnée à 15 mois d’emprisonnement avec sursis.

🔴 Tribunal correctionnel de Versailles, 9 juin 2020

Condamnation d’une trésorière d’une association de parents d’élèves pour abus de confiance. Il lui est reproché d’avoir détourné pendant six ans près de 20 000 euros au préjudice de l’association. Elle est condamnée à trois mois d’emprisonnement avec sursis probatoire pendant trois ans et l’obligation de rembourser l’association.

Le président de l’association est pour sa part condamné pour recel à 500 euros d’amende. Il avait demandé à la trésorière de lui prêter 800 €, afin de régler un retard de paiement de loyer.

🔴 Tribunal correctionnel de Versailles, 9 juin 2020

Condamnation d’une employée communale (ville de plus de 10 000 habitants) pour escroquerie et abus de confiance sur personnes vulnérables. L’enquête a été diligentée à la demande de la municipalité après qu’une personne âgée ait signalé le vol de sa carte bancaire en suspectant la personne chargée de l’accueil à la mairie. Le visionnage des caméras de vidéosurveillance ont confirmé les soupçons. Placée en garde à vue, l’intéressée a reconnu les faits pour un préjudice total de plus de 6000 euros, incluant notamment la soustraction d’une somme d’argent en liquide (400 euros) d’un contribuable qui venait régler en mairie sa taxe d’habitation. La prévenue est condamnée à douze mois d’emprisonnement sous forme de détention à domicile, avec bracelet électronique.

🔴 Tribunal correctionnel de Basse-Terre, 12 juin 2020

Condamnation d’un employé communal travaillant dans un CCAS pour détournement de fonds publics. L’employé indélicat détournait l’argent des contribuables à son profit pour un montant total de 12000 euros. Jugé en état de récidive, il est condamné à 6 mois d’emprisonnement ferme avec mandat de dépôt à l’audience.

🔴 Tribunal correctionnel de Douai, 16 juin 2020

Condamnation d’un président associatif et conseiller délégué (commune de moins de 5000 habitants) pour diffamation à l’encontre du maire. Le maire reprochait à son ancien conseiller à la sécurité la publication d’un article non signé intitulé « poker menteur » sur la page Facebook d’une association qu’il présidait. Le texte, sans nommer expressément le maire, contenait de nombreux « noms d’oiseaux » et laissait entendre que la mairie se serait rendue coupable d’un abus de faiblesse, en tentant d’acquérir à moindre coût un immeuble. Le prévenu a assumé la parution du texte en tant que responsable de la page Facebook, mais a refusé d’endosser la paternité et de dévoiler l’identité de son auteur. Il a toutefois indiqué que le texte a été publié avec l’assentiment des membres du bureau de l’association. Le prévenu est condamné à 500 euros d’amende et à verser 500 euros au maire en réparation de son préjudice moral.

🔴 Tribunal correctionnel de Meaux, 16 juin 2020

Condamnation d’un ancien maire (commune de moins de 5000 habitants) pour mise en danger délibéré de la vie d’autrui pour des faits remontant à plus de 20 ans impliquant un centre d’enfouissement technique. En 1994 la commune avait signé avec le syndicat intercommunal une convention et obtenu la maîtrise d’ouvrage pour le réaménagement du site en espace vert consistant à combler le trou et à créer une « coulée verte ». Le maire avait signé des permis de construire pour des habitations à proximité du site. Mais en juin 1999, le bulldozer d’une entreprise, chargée des travaux d’aménagement, avait écrasé le collecteur d’aspiration du biogaz ce qui avait conduit à des évacuations d’habitations que les propriétaires venaient d’acheter... La demande initiale déposée en 1980 par le syndicat intercommunal faisait mention d’une décharge devant s’étaler sur une surface de 5 ha pour une quantité de 25 000 t par an. Un arrêté préfectoral de 1981 autorisait cette dimension et ce tonnage. Mais dans la réalité, la surface a triplé et la quantité a doublé. L’élu est déclaré coupable mais dispensé de peine. La société exploitant la décharge et deux de ses anciens dirigeants, poursuivis pour exploitation d’une installation classée non déclarée sont relaxés au bénéfice de la bonne foi. En effet ils se conformés à un cahier des charges qui indiquait que le syndicat intercommunal indiquant que le SIRU mettait à disposition une surface de 16 ha, pour 60 000 t par an.

🔵 Cour d’appel de Douai, 16 juin 2020

Déclaration d’incompétence dans le cadre de poursuites dirigées contre un maire (commune de moins de 5000 habitants), le directeur général des services (DGS) et une secrétaire pour faux et usage de faux, cités directement à comparaître par un agent qui souhaitait faire requalifier son arrêt en longue maladie. L’agent dénonçait un faux intellectuel, estimant que la municipalité n’avait pas introduit, comme elle l’avait prétendu, un recours devant le comité médical supérieur. Selon les prévenus, c’était dans l’intérêt de l’agent et par respect pour la présomption d’innocence dans le cadre d’une procédure qui le visait, que l’avis en question n’avait pas été sollicité dans l’attente de l’issue de la procédure. La cour confirme la déclaration d’incompétence du tribunal correctionnel, estimant que les faits, à les supposer avérés, relèvent d’une qualification criminelle s’agissant d’un faux en écriture publique commis par des agents publics.

🔵 Tribunal de police de Caen, 17 juin 2020

Le tribunal de police constate l’extinction de l’action publique par effet de la prescription dans le cadre d’une plainte dirigée contre un maire (commune de moins de 10 000 habitants) pour diffamation non publique à caractère racial. Il était reproché à l’élu, dans le cadre d’une procédure judiciaire dont il était l’objet, d’avoir tenu des propos à caractère raciste devant les gendarmes qui l’auditionnaient. Les propos ont été révélés lors de l’audience où l’élu était jugé. Le tribunal constate l’extinction de l’action publique : si la plainte a bien été déposée par une association de lutte contre le racisme quelques jours avant l’expiration du délai de prescription d’un an applicable en la matière, elle n’a été transmise au parquet que cinq jours trop tard.

🔵 Tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer, 18 juin 2020

Relaxe d’un adjoint (commune de moins de 2000 habitants) poursuivi pour harcèlement moral sur plainte de la secrétaire de mairie. La plaignante reprochait à l’élu « des critiques répétées sur sa qualité de travail et des questions insistantes lors des conseils municipaux » ainsi que des attaques sur un blog qu’il tenait. Le tribunal relaxe l’adjoint estimant qu’il n’a pas commis d’excès dans ses fonctions d’élu, ni dans sa liberté d’expression. Le tribunal souligne également que l’adjoint n’avait pas de lien hiérarchique avec la secrétaire de mairie et s’adressait au maire pour la rectification des procès-verbaux.

🔴 Tribunal correctionnel de Caen, 18 juin 2020

Condamnation d’une commune (moins de 500 habitants) pour pollution. Il était reproché à la la commune d’avoir traité trois zones considérées comme sensibles avec un pesticide depuis interdit :
 un fossé qui constitue une voie de ruissellement ;
 un parking de bus scolaire ;
 un potager pédagogique jouxtant l’école maternelle.

Le maire de la commune a catégoriquement dénié les faits refusant la procédure de composition pénale qui était proposée. Il soutient en effet que :

- s’agissant du fossé, le désherbage a été effectué manuellement sans aucune utilisation de produits chimiques ;

- s’agissant du parking il s’agissait d’un espace d’entrepôt de graviers, à l’arrière, où les enfants ne pouvaient pas aller ;

- concernant le potager pédagogique, le terrain n’était plus utilisé comme potager par les enfants, ils ne pouvaient y accéder.

L’inspecteur de l’environnement indique, pour sa part, que sur les trois zones ont été retrouvées des traces du produit, le procureur ajoutant que deux zones concernées elles étaient potentiellement accessibles à un public d’enfants. Le tribunal relaxe la commune pour le traitement du fossé mais la condamne pour, les deux autres zones, à une peine d’amende de 2000 € avec sursis.

🔵Tribunal correctionnel de Dunkerque, 22 juin 2020

Relaxes du président et du trésorier d’une association poursuivis pour infractions aux règles relatives aux comptes de campagne. Pour leur défense les deux prévenus objectaient que la structure n’était pas un parti politique.

🔵 Tribunal correctionnel de Foix, 23 juin 2020

Relaxes d’un maire et d’un conseiller municipal (commune de moins de 3500 habitants) poursuivis pour faux en écriture sur plainte du président de la communauté de communes. Il leur était reproché d’avoir présenté lors d’un conseil communautaire une procuration d’une conseillère qui avait pourtant donné sa démission.

🔴 Cour d’appel de Poitiers, 23 juin 2020

Condamnation d’un maire (commune de moins de 1000 habitants) pour prise illégale d’intérêts dans le cadre d’un projet de parc éolien sur plainte d’une association. Il lui est reproché de s’être impliqué dans le projet malgré son intérêt personnel et financier (projet concernant des terres qu’il exploite, en tant qu’agriculteur, par le biais d’un GAEC). Peu importe qu’il se soit retiré au moment du vote. Il est condamné à 3000 euros d’amende ainsi qu’à trois ans d’inéligibilité.

Trois autres élus (un conseiller municipal de la même commune, le maire et le conseiller municipal d’une commune voisine), également poursuivis dans ce dossier, sont en revanche relaxés.

🔴 Cour de cassation, chambre criminelle, 24 juin 2020

Condamnation d’un responsable associatif pour escroquerie au préjudice d’une association d’entraide en faveur des artistes. C’est l’association qui a déposé plainte et s’est constituée partie civile auprès du doyen des juges d’instruction après avoir découvert l’existence de paiements frauduleux commis depuis 1986, d’un montant total de plus de 800 000 euros, dissimulés sous l’apparence de remboursements à des diffuseurs. Étaient ainsi créés par voie informatique des faux documents faisant apparaître, à partir de taxations inexistantes, des soldes créditeurs fictifs au profit de diffuseurs, qui justifiaient l’envoi à ceux-ci, sous le prétexte de remboursement de trop perçus, de virements ou de chèques, mais sous les coordonnées bancaires de tiers qui n’avaient aucune relation avec l’association. Les situations initiales des comptes des diffuseurs étaient ensuite rétablies au plan informatique, et les écrits utilisés détruits. Ces paiements indus, d’un total de 770 330,48 euros, ont profité à des membres de la famille du responsable associatif, à des artisans ayant effectué des travaux dans sa maison, ou encore à un concessionnaire automobile auprès duquel l’intéressé avait acheté plusieurs véhicules. Il est condamné à vingt mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve et au remboursement des sommes détournées.

🔴 Cour de cassation, chambre criminelle, 24 juin 2020

Condamnation d’un maire et d’un DGS (commune de plus de 10 000 habitants) du chef de favoritisme sur signalement de la chambre régionale des comptes. Il leur est reproché :

- le paiement par la commune d’une somme totale de 62 766,46 euros par plusieurs mandats signés par le DGS de la commune, et tous émis le 19 février 2008 en faveur d’une société, en paiement d’une campagne d’affichage commandée en 2007, hors toute procédure de marché public ;

- le paiement par la commune à un cabinet pour une somme totale de 151 294 euros pour des contrats d’assistance conclus en 2007, également sans procédure de marché et en l’absence d’un quelconque cahier des charges ;

- la conclusion, hors de toute procédure de marché, de neuf contrats de prestations de service avec une société d’organisation de spectacles pour un montant total de 554 422 euros.

Le prestataire retenu a expliqué que les prestations avaient été définies lors de réunions à la mairie en début d’année en présence, notamment, du maire et du DGS, et qu’une fois le programme arrêté, il avait acheté les programmes choisis aux différents producteurs et les avait revendus à la commune moyennant une marge conséquente. Le maire a reconnu avoir signé trois contrats et rejeté la responsabilité de la gestion des opérations sur son DGS qui a déclaré que le prestataire, ami du maire, avait été imposé par ce dernier... La Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir écarté la prescription de l’action publique (bien que les faits remontent à 2007), le point de départ de la prescription étant repoussé, lorsque l’acte délictueux a été dissimulé ou présente un caractère occulte, au jour où l’infraction a pu être constatée dans les conditions permettant l’exercice des poursuites. En effet, il résulte des motifs de l’arrêt que les conditions de passation des contrats litigieux, dont certains ont été soumis au conseil municipal postérieurement à la réalisation des prestations correspondantes, ont été dissimulées, le contenu de ceux-ci, comme des factures correspondantes, ayant été volontairement rendu opaque et imprécis et ne permettant pas ainsi aux personnes compétentes de connaître précisément la nature des prestations en cause et de déterminer si elles étaient susceptibles de tomber sous le coup des dispositions excluant toute publicité et mise en concurrence.

La chambre criminelle approuve également les juges d’appel d’avoir retenu qu’il n’était pas démontré que les formalités de mise en concurrence et de publicité étaient impossibles ou manifestement inutiles, notamment, en raison de l’objet des marchés, de leur montant ou du degré de concurrence dans le secteur considéré, la société attributaire ne bénéficiant d’aucune exclusivité sur les spectacles qu’elle a vendues à la commune. La Cour de cassation annule en revanche la peine prononcée contre l’élu (six mois d’emprisonnement ferme et 15 000 euros d’amende) faute pour les juges d’appel d’avoir suffisamment motivé leur décision sur ce point. Il appartiendra à la cour d’appel de renvoi de se prononcer sur la peine. Le pourvoi du DGS est en revanche déclaré déchu, et la condamnation de ce dernier à six mois d’emprisonnement avec sursis est donc définitive.

🔴 Tribunal de Police de Saint-Denis de la Réunion, 26 juin 2020

Condamnation d’un maire (commune de moins de 10 000 habitants) pour violences volontaires légères sur plainte d’un conseiller municipal de l’opposition qui avait été molesté. Le conseil municipal s’était ouvert par une défection du premier adjoint ce qui avait fortement indisposé le maire. Celui-ci avait alors indiqué qu’il couperait la parole à ceux qui feraient des déclarations en dehors de l’ordre du jour. Un conseiller de l’opposition avait aussitôt enfreint cette interdiction. Après avoir demandé en vain que son micro soit coupé, le maire s’était précipité vers son opposant en le prenant par la veste pour le tirer afin de la faire sortir de la salle. Il avait ensuite donné l’ordre aux policiers municipaux d’évacuer l’élu de l’opposition avant que des élus ne parviennent à le calmer. Le maire est condamné à 800 euros d’amende avec sursis et devra verser 200 euros de dommages-intérêts (sur les 15 000 euros réclamés) au plaignant.

🔴 Tribunal correctionnel de Paris, 29 juin 2020

Condamnation d’un député-maire (commune de plus de 10 000 habitants) pour soustraction de biens publics dans le cadre d’une affaire d’emploi fictif impliquant l’épouse d’un député dont il avait assuré la suppléance. Il est condamné à trois ans d’emprisonnement avec sursis, cinq ans d’inéligibilité et 20 000 euros d’amende. Le couple est également condamné : cinq ans d’emprisonnement dont trois ans avec sursis, 375 000 euros d’amendes et dix ans d’inéligibilité pour l’homme politique ; trois ans d’emprisonnement avec sursis, 375 000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité pour son épouse. Au civil, les trois prévenus sont condamnés à rembourser plus d’un million d’euros à l’Assemblée nationale.

🔴 Cour d’appel de Montpellier, 29 juin 2020*

Condamnation civile d’un maire (commune de moins de 500 habitants) poursuivi pour diffamation publique sur plainte du directeur de l’office de tourisme qu’il avait notamment qualifié de « petit caporal de centre commercial ». Le maire avait été relaxé au pénal par le tribunal correctionnel (relaxe au pénal définitive) mais la cour d’appel le condamné civilement estimant que si les propos ne contenaient l’imputation d’aucun fait précis et déterminé, pouvant faire l’objet d’une contradiction argumentée, ils pouvaient en revanche caractériser une injure.

* Condamnation annulée par la Cour de cassation, le 30 mars 2021