Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - Décembre 2010

Retrouvez les décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire relatives à la responsabilité pénale des élus locaux, des fonctionnaires territoriaux et des responsables associatifs.

(dernière mise à jour le 3/07/2013)

 [1]


 Tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence, décembre 2010

Condamnation pour harcèlement moral de l’ancien maire d’une commune (35 000 habitants) sur plainte d’un agent municipal. Ce dernier dénonçait une dégradation de ses conditions de travail depuis l’élection du maire qui s’était traduite notamment par une rétrogradation : responsable du service gardiennage avec 7 personnes sous ses ordres, il s’est vu attribuer de simples fonctions de gardien. Le tribunal relaxe en revanche l’élu du chef de de discrimination raciale. En répression l’ancien mai est condamné à un an de prison avec sursis. Au civil, l’élu devra verser 3000 euros de dommages-intérêts au plaignant.


 Cour de cassation chambre criminelle 1 décembre 2010 N° 10-80094

Le fait pour le mandataire d’une association de régler des dépenses étrangères à son intérêt constitue un détournement de fond au sens de l’article 314-1 du code pénal. Se rendent ainsi coupables d’abus de confiance, le maire et l’adjoint (commune de 10 000 habitants) qui, en qualité de dirigeants d’une association, ont fait supporter par cette association des charges étrangères à son objet social, au bénéfice de la commune, de son office de tourisme ou de clubs sportifs locaux. En répression le maire est condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis et à 15 000 euros d’amende ; l’adjoint à deux mois d’emprisonnement avec sursis, et à 5 000 euros d’amende.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 1 décembre 2010, N° : 10-80771

Se rend coupable de faux et usage de faux en écriture le maire qui établit et remet à une société, dont le principal fournisseur exigeait des garanties de paiement, une attestation dans laquelle il certifie faussement "qu’un marché de travaux est attribué à ladite société... son élaboration administrative est en cours ". En effet, "est constitutif d’un usage de faux le fait de remettre le document contrefait à un tiers en vue du résultat final qu’il était destiné à produire". En répression l’élu (commune de 10 000 habitants) est condamné à 2000 euros d’amende.


 Tribunal correctionnel d’Orléans, 2 décembre 2010

Condamnation pour prise illégale d’intérêts du directeur général d’une société en nom collectif chargé par une commune d’aménager une ZAC. Il lui est reproché d’avoir négocié auprès d’un riverain le découpage et la cession d’un terrain à la SNC avant l’approbation du périmètre de la ZAC, puis d’avoir acheté personnellement le terrain en question en faisant en sorte que le foncier hors ZAC se trouve desservi par un chemin inclus dans la ZAC et bénéficiant de ce fait d’équipements publics supportés par la ZAC. Le prévenu est condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et à 50 000 euros d’amende. Il devra en outre verser 2500 euros de dommages-intérêts à la commune qui s’est constituée partie civile.


 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, 2 décembre 2010

Condamnation d’un directeur des services techniques (commune de 4000 habitants) des chefs de complicité d’escroquerie et de faux en écriture. Il lui est reproché d’avoir faussement attesté qu’une entreprise attributaire d’un marché public avait réalisé une partie des travaux confiés pour permettre à cette dernière d’encaisser 60 % de la valeur du marché. Conscient qu’il faudrait justifier un jour le non avancement du marché, l’entrepreneur, avec la complicité du DST, a imaginé un stratagème reposant sur l’allégation d’une cause extérieure (présence d’amiante) imposant l’arrêt des travaux jusqu’à l’intervention de la commune. Pour leur défense, les prévenus faisaient valoir que la somme réclamée correspondait en réalité à une avance nonobstant l’intitulé erroné du document. Ils sont condamnés à un an d’emprisonnement avec sursis.


 Tribunal correctionnel de Versailles, 6 décembre 2010

Condamnation d’un maire (commune de 600 habitants) pour avoir entravé l’accès à un terrain privé appartenant à des gens du voyage : craignant une construction illégale le maire avait fait déposer des tonnes de terre sur le terrain privé et fait installer une barrière afin d’empêcher le passage des caravanes. En répression il est condamné à 2000 euros d’amende dont 1000 euros avec sursis.


 Cour d’appel de Paris, 7 décembre 2010

Condamnation d’un fonctionnaire territorial (grande ville francilienne) des chefs d’abus de confiance et de harcèlement moral. Sur les faits d’abus de confiance, il lui est reproché d’avoir utilisé divers matériels de jardinage de la commune (tondeuses, tronçonneuses, scarificateurs, échelles) pour des travaux qu’il réalisait parallèlement chez les particuliers. Il se servait également en plantes et utilisait la carte d’essence de la collectivité pour son véhicule personnel...

S’agissant des faits de harcèlement moral, il lui est reproché d’avoir humilié un subordonné en raison de son handicap (moqueries, refus systématique des congés au moment du pèlerinage de Lourdes auquel il aurait souhaité participer en qualité de bénévole, tâches ingrates, utilisation pour ses besoins personnels notamment en l’envoyant faire des courses et en lui faisant nettoyer sa voiture et son bureau, demande de rester travailler au-delà des horaires...). Le fonctionnaire est condamné à un an d’emprisonnement avec sursis, et à 5 000 euros d’amende.


 Cour d’appel de Paris, chambre de l’instruction, 7 décembre 2010

La cour confirme le refus d’informer ordonné au profit d’un maire et d’un adjoint (commune de 45000 habitants) poursuivis des chefs d’entrave à l’exercice de la liberté d’association et d’atteinte à la liberté individuelle sur plainte d’une association. La présidente de l’association prétendait que le maire et l’adjoint ont, à l’occasion d’un différend au sujet de sa manière de gérer l’association et devant son refus de démissionner de ses fonctions, tenu des propos intimidants et menaçants [2]. La chambre de l’instruction estime que, d’une part, des investigations complètes ont été réalisées dans le cadre de l’enquête préliminaire et que, d’autre part, l’utilisation d’un vocabulaire martial, lors de communications avec le fils de la plaignante, ne saurait être assimilé raisonnablement à des menaces d’atteintes à l’intégrité physique des plaignants au regard du contexte.


 Tribunal correctionnel de Bonneville, 9 décembre 2010

Condamnation d’un maire (commune 20 000 habitants) poursuivi du chef de discrimination. Un représentant syndical de la commune accusait le maire d’avoir sanctionné ses engagements syndicaux en donnant des instructions pour que sa mère ne soit pas accueillie dans la maison de retraite municipale. L’élu était également poursuivi, en sa qualité de président de l’EHPAD, pour ne pas avoir mis à disposition un local et du matériel pour les représentants syndicaux. L’élu est condamné à 1000 euros d’amende.


 Tribunal correctionnel de Charleville-Mézières, 9 décembre 2010

Condamnation d’un adjoint et d’un directeur des services techniques (commune de 2500 habitants) pour avoir illégalement intercepté des communications téléphoniques du maire grâce à un poste CIBI (qui peut intercepter des communications téléphoniques émises à partir d’un poste sans fil). Les communications ainsi enregistrées ont contraint le maire à la démission dans la mesure où il y tenait des propos peu élogieux à l’encontre d’élus du conseil municipal. Les deux prévenus sont condamnés à 15 jours d’emprisonnement avec sursis et à verser à l’élu 1500 euros de dommages-intérêts.


 Tribunal correctionnel de Nîmes, 13 décembre 2010

Condamnation de deux élus (l’un en qualité d’adjoint chargé de la police municipale, l’autre en tant que co-président du comité du fêtes) d’une ville 6500 habitants à la suite du décès d’une personne âgée lors d’une manifestation taurine. Elle s’était retrouvée seule face au taureau sans pouvoir lui échapper. Il est reproché aux élus d’avoir maintenu la manifestation alors que trois véhicules stationnaient dans la rue en violation d’un arrêté interdisant un tel stationnement pour des motifs de sécurité. Au pénal les élus sont condamnés à 3 mois de prison avec sursis et 3000 euros d’amende (dont 2000 euros avec sursis pour l’élu co-président du comité des fêtes). Au civil les élus sont condamnés sur leurs deniers personnels à indemniser les ayants droit de la victime à hauteur de 92 000 euros.


Tribunal correctionnel de Poitiers, 14 décembre 2010, N°1898/10

Condamnation pour prise illégale d’intérêts d’un maire d’une commune de 500 habitants sur plainte de 9 conseillers municipaux. Il lui est reproché d’avoir participé à des délibérations concernant l’exercice du droit de préemption concernant des parcelles achetées par lui et par un neveu. L’élu se défendait en relevant qu’en tout état de cause la commune n’aurait pas eu les moyens d’exercer son droit de préemption. Peu importe répond le tribunal qui, considérant les fait établis, le condamne à 500 euros d’amende dont 300 avec suris.


Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 15 décembre 2010

 Condamnation d’un dirigeant d’une association d’insertion du chef d’abus de confiance. Il lui est notamment reproché d’avoir encaissé sur son compte personnel des chèques dus à l’association et d’avoir détourné des actifs appartenant à l’association pour un montant de 126 809 euros. Le prévenu est condamné à 10 mois d’emprisonnement fermes et à 20 000 euros d’amende.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 14 décembre 2010, N° : 10-80591

Confirmation de la condamnation à 25 000 euros d’amende d’une communauté de communes pour homicide et blessures involontaires. Une vache s’est échappée d’un abattoir, propriété de l’EPCI, provoquant deux accidents de la circulation dont l’un mortel. Les juges estiment que la vétusté de l’installation a rendu possible la fuite de l’animal et que les élus, informés de cette situation, n’ont pas pris les mesures pour y remédier.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 15 décembre 2010, N° 10-81727

Confirmation de la condamnation du président d’une association pour abus de confiance à 15 mois d’emprisonnement avec sursis et 5000 euros d’amende. Il lui est reproché d’avoir détourné des aides obtenues notamment de l’AGEFIPH pour l’emploi de personnes handicapées. Les deux salariés ainsi recrutés étaient en fait occupés, à plus de 95% de leur temps de travail, à l’assister dans ses contentieux pénaux, civils ou commerciaux personnels.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 15 décembre 2010, N° 09-86222

Confirmation de la condamnation du chef de concussion du président (6 mois d’emprisonnement avec sursis), du secrétaire général (8 mois d’emprisonnement avec sursis) et du trésorier élu (8 mois d’emprisonnement avec sursis d’une chambre des métiers et de l’artisanat. Il leur est reproché d’avoir perçu des rémunérations indues. La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir écarté la prescription qui pour ce délit ne commence à courir qu’à compter de la dernière des perceptions ou exonérations indûment accordées.


Avertissements

Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les élus et les fonctionnaires condamnés bénéficient donc toujours de la présomption d’innocence.

Par respect pour ce principe, l’Observatoire SMACL des risques de la vie territoriale a volontairement occulté les noms des prévenus et des parties civiles.

Vous pouvez nous aider à consolider notre base d’observation en nous transmettant (observatoire@smacl.fr) les références de décision de justice ou d’article de presse relatives à des mises en cause pénales d’élus locaux, de fonctionnaires territoriaux ou de collectivités territoriales.

[1Photo : © Ene

[2Selon lesquels, si elle n’acceptait pas la voie amiable proposée, ils allaient aller "à la bagarre", "à la guerre", le maire indiquant "on a triomphé de beaucoup de combats et on est plutôt du genre, quand on vient nous enquiquiner, à charger nos fusils et on tire dans le tas" et précisant également au fils de la plaignante qu’en cas de dépôt de plainte de cette dernière, "il prendrait une balle dans la tête par ricochet".