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Chronique de jurisprudence - sélection de décisions rendues entre décembre 2024 et février 2025

Denière mise à jour le 27/02/2025

Nous vous proposons une sélections de courts résumés de décisions de justice (classées par thématiques) intéressant les collectivités territoriales avec les points clés à retenir. 

Associations

Accident dans un snowpark - Responsabilité de l’association organisatrice du séjour - Manquement à l’obligation de sécurité (oui)


Un enfant participant à un séjour de vacances organisé par l’association défenderesse, est victime d’un accident de ski en sautant une bosse dans un snowpark.
La responsabilité de l’association est engagée.
Le juge relève que :
  •  l’enfant a un bon niveau de ski. Mais, le snowpark fait partie du top 10 des snowparks français dédiés aux riders les plus avertis ; 
  •  L’animatrice est titulaire du BAFA, cependant, il n’existe aucune information sur ses éventuels diplômes ou son niveau de ski. L’animatrice n’a pas les qualifications pour l’activité en cause.
 Un animateur BAFA reste peu qualifié dans l’activité de ski alpin et ne dispose donc pas du niveau de connaissance et d’expérience nécessaire pour proposer à un public sensible, des mineurs, le passage dans un module de snowpark de taille L à XL en toute sécurité » souligne le juge.
👉 Le non-respect des consignes par l’enfant n’a aucune incidence dès lors que l’animatrice a emmené son groupe sur un snowpark connu pour ses importants modules de sauts alors qu’elle était elle-même inexpérimentée en la matière.
 
 
 

Construction

Point de départ de la garantie de parfait achèvement - Réception « sous réserve » et réception « avec réserve »

👉Lorsqu’un marché de travaux est réceptionné « avec réserves » et « sous réserves », le délai de garantie de parfait achèvement court à compter de la date d’effet de la décision de réception.
 
 

Contentieux & procédures

Désordres causés à un immeuble en raison d’une fuite d’une canalisation du réseau unitaire d’évacuation des eaux usées et des eaux pluviales - Compétence de la juridiction judiciaire


Le propriétaire d’un immeuble à usage d’habitation et de commerce demande au juge des référés de condamner une structure intercommunale à lui verser une provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de la dégradation de son bien immobilier, imputée à la fuite d’une canalisation du réseau unitaire d’évacuation des eaux usées et des eaux pluviales desservant son immeuble.
 
Conformément aux articles L.2224-7, II ; L. 2224-8 ; L. 2224-11 et L. 2226-1 du Code général des collectivités territoriales, « dès lors que le dommage trouve son origine dans une canalisation exploitée notamment dans le cadre du service public de l’assainissement, l’ouvrage en cause doit être regardé comme relevant de ce service, et que hors les cas où le sinistre trouverait uniquement sa cause dans une défaillance sans lien avec ce service, la demande indemnitaire formée par l’usager de ce service ne peut trouver sa source que dans le contrat de droit privé qui le lie à ce dernier ». 
"Le préjudice dont le requérant demande réparation résulte de désordres affectant l’ouvrage public que constitue la canalisation, située sous la voie publique, desservant l’immeuble dont le requérant est propriétaire et assurant son raccordement au réseau unitaire d’assainissement et d’évacuation des eaux pluviales".
👉 Les préjudices allégués se rattachent à l’exécution du service public d’assainissement et compte tenu de la qualité d’usager du requérant. Ce litige relève de la compétence des juridictions judiciaires.
 

 

Erreur dans l’établissement d’un certificat de conformité du raccordement au réseau public des eaux usées - Service public de l’assainissement - Relations service public industriel et commercial (SPIC) et usagers

 
Les litiges individuels nés des rapports entre un service public industriel et commercial et ses usagers, qui sont des rapports de droit privé, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires. Il n’en va autrement que pour les litiges relatifs à celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, se rattachent, par leur nature, à des prérogatives de puissance publique.
 
La délivrance d’attestations de conformité, comme l’exercice de missions de contrôle et de vérification d’un raccordement d’une propriété privée au réseau collectif, à la suite d’une visite de contrôle, entrent dans le cadre des relations entre le service et ses usagers, et constituent un prolongement direct des missions du service public industriel et commercial de l’assainissement, dont l’exercice ne présente pas de prérogatives de puissance publique.
 
👉 Le dommage qui résulterait de l’erreur commise par la métropole dans l’établissement de ce certificat, comme de l’absence de contrôle régulier d’une installation privée, doit être regardé comme causé à un usager du service public de l’assainissement, lequel a le caractère d’un service public industriel et commercial. Par suite, il n’appartient qu’à la juridiction judiciaire de connaître de ce litige.
 
 

Remboursement des frais de conseil exposés au cours d’une expertise ordonnée par le juge administratif

 
Les frais supportés par une partie pour l’assistance d’un tiers, notamment d’un avocat, durant les opérations d’une expertise tendant à déterminer les causes et l’étendue d’un dommage : - sont susceptibles d’être pris en compte dans le préjudice résultant de ce dommage dont l’indemnisation est due par la ou les personnes qui en sont reconnues responsables ; - toutefois, lorsque l’expertise a été ordonnée par le juge administratif, y compris avant l’introduction de l’instance au fond sur le fondement des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative (CJA), et que l’intéressé a la qualité de partie à l’instance au fond, les frais exposés à ce titre ne peuvent être remboursés que par la somme le cas échéant allouée à cette partie au titre de l’article L. 761-1 du même code ».

👉 Les frais de conseil engagés par une partie à l’occasion des opérations d’une expertise ordonnée par le juge administratif sont considérés comme des frais d’instance et ne peuvent être remboursés que conformément à l’article L.761-1 du Code de justice administrative. 

 
 

Pouvoirs de police

Abattage d’arbres sur une propriété privée

Une commune a fait abattre des arbres sur une propriété privée (la commune évoque la sécurité des passants utilisant le chemin de randonnée qui borde le terrain privé). Le juge relève que la commune n’a pas mis en demeure le propriétaire. De plus, la commune ne justifie pas le danger.
 
👉 Le juge retient une faute de la commune et condamne la commune à payer 11400 euros correspondant au devis d’enlèvement des douze arbres abattus et leur replantation.
 
 

Protection fonctionnelle 

Frais couverts par la protection fonctionnelle - Frais d’avocat exposés devant la juridiction administrative - Agent ayant saisi la juridiction administrative contre son employeur pour des faits de harcèlement moral

L’instance engagée par un agent devant une juridiction administrative, relative à des faits ouvrant droit au bénéfice de la protection fonctionnelle, doit être regardée comme entrant dans les prévisions des articles L.134-12 et R.134-1 et suivants du Code général de la fonction publique.
 
👉  L’agent bénéficiant de la protection fonctionnelle peut demander, à ce titre, la prise en charge des honoraires d’avocat engagés dans le cadre d’une action indemnitaire contre son employeur.
 
 

Protection fonctionnelle des gestionnaires publics mis en cause devant la Cour des comptes


Le gestionnaire public poursuivi devant la chambre du contentieux de la Cour des comptes n’est pas fondé à se prévaloir de la protection fonctionnelle.

👉 Lorsqu’un agent public est mis en cause dans le cadre du régime de responsabilité des gestionnaires publics prévu aux articles L.131-1 et suivants du code des juridictions financières, le principe général du droit à la protection fonctionnelle publique n’impose pas à la collectivité publique de lui accorder une protection.
 
 

SDIS

Condamnation d’un SDIS pour reprise de feu

Le juge reproche au SDIS l’insuffisance des opérations de dégarnissage des éléments ayant pu être atteints par les flammes eu égard à la configuration des lieux et à la nature des matériaux présents et l’insuffisance de l’attention portée par les personnels du SDIS à la détection d’éventuels points chauds subsistants après l’extinction du premier feu.
👉La reprise d’incendie est directement et entièrement imputable à une faute commise par le SDIS. 

Le SDIS est condamné à verser une somme de 471 688,63 euros. 

 
 

Urbanisme

Permis obtenu par fraude - Possibilité de le régulariser par un permis modificatif (Non)

👉 Lorsqu’un permis de construire a été obtenu par fraude, l’illégalité qui en résulte n’est pas de nature à être régularisée par la délivrance d’un permis de construire modificatif. Il s’ensuit qu’une telle illégalité peut être utilement invoquée à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial alors même qu’un permis modificatif aurait été délivré.

 
 

Troubles manifestement illicites - Travaux réalisés en violation du PLU - Remise en état ordonnée par le juge des référés - Exécution d’office des travaux de remise en état par la commune aux frais de l’intéressé - Avis

 
Des travaux de terrassement, accompagnés de l’édification d’un mur de soutènement et de coupes et abattages d’arbres sont effectués sur une parcelle classée en zone naturelle du PLU et comprise dans un espace boisé classé (EBC).

Pour faire cesser le trouble manifestement illicite des travaux réalisés en violation du PLU une commune obtient du juge civil des référés, sur le fondement de l’article 835 du Code de procédure civile, la cessation immédiate des travaux irréguliers ainsi qu’une injonction de remise en état des lieux dans le délai de 3 mois, sous astreinte journalière.

L’ordonnance prévoit également qu’à défaut d’exécution, la commune sera autorisée à procéder d’office à cette remise en état aux frais et risques du propriétaire. Sur ce dernier point, elle est infirmée en appel.

 

 En cassation, cette affaire donne lieu à une demande d’avis portant sur la question suivante :

 

le juge des référés, saisi par une commune sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, constate un trouble manifestement illicite du fait de travaux réalisés en violation des dispositions du plan local d’urbanisme (PLU), et ordonne au bénéficiaire de ces travaux de les interrompre et de remettre les lieux en état, peut-il autoriser la commune, à défaut d’exécution de la remise en état, à y procéder d’office aux frais et risques du bénéficiaire des travaux irréguliers ?"

La troisième chambre considère que :

  • Le juge des référés, qui, saisi par une commune sur le fondement de l’article 835, alinéa 1er, du code de procédure civile, constate un trouble manifestement illicite du fait de travaux réalisés en violation des dispositions du plan local d’urbanisme et ordonne au bénéficiaire de ces travaux de les interrompre et de remettre les lieux en état, peut autoriser la commune, à défaut de complète exécution de la remise en état par ce bénéficiaire dans le délai qu’il fixe, à y procéder d’office aux frais de celui-ci. En décider autrement, en cas de trouble manifestement illicite, porterait atteinte à l’objectif d’intérêt général de respect effectif des prescriptions d’urbanisme ».
  •  Cependant, le juge des référés ne peut pas prescrire que l’exécution aura lieu aux risques et périls du bénéficiaire des travaux irréguliers.

👉 Le juge civil des référés qui ordonne la remise en état peut autoriser la commune à y procéder d’office aux frais du bénéficiaire en cas d’inexécution mais ne peut pas prescrire que cette exécution aura lieu à ses risques et périls. 

 
 

Voirie

Accident subi par un motard - Présence de gravillons sur une route départementale

 
La présence des gravillons sur la chaussée s’explique par le passage répété d’engins agricoles et de véhicules poids lourds sur un remblai formé de terre et de graviers situé aux abords immédiats de la voie publique, à l’endroit où s’est produit l’accident. Le département ne peut sérieusement soutenir qu’il ignorait l’état de la voie publique, alors que, située à proximité immédiate d’exploitations agricoles, elle est fréquemment empruntée par des engins agricoles travaillant sur ces exploitations.
 
👉 Compte tenu d’une telle situation géographique, il appartenait au département de faire procéder à des inspections régulières de la voirie et de prendre les dispositions propres à faire disparaître le danger ou, à tout le moins, de le signaler de façon adéquate.
 
Le juge retient toutefois une faute du motard :
  •  vitesse excessive, sur une route empruntée par des véhicules agricoles susceptibles de laisser de la boue et des gravillons sur la chaussée et à la tombée de la nuit, 
  •  usure du pneu avant de la motocyclette, 
  •  casque qui n’était pas correctement attaché par l’intéressé au moment de l’accident.
👉Ces fautes exonèrent le département à hauteur de 25 % des conséquences dommageables de l’accident.
 
 

Chute dans un escalier en béton - Défectuosité des marches - Défaut d’entretien normal (non)

 
Un usager chute en empruntant un escalier en béton. Les larges marches de cet escalier présentaient une défectuosité en raison d’une épaufrure affectant l’arrête d’une marche qui a selon l’intéressé provoqué son déséquilibre puis sa chute.
 
Ce défaut suffisamment visible, d’une faible ampleur au regard de la largeur de la marche, situé au centre de l’escalier, par ailleurs muni de rambardes latérales, n’excédait pas les inconvénients qu’un usager normalement prudent et attentif à sa marche peut s’attendre à rencontrer sur son trajet.
La chute est survenue en plein jour, aux alentours de 11 heures 30, au sein d’une commune que l’usager connaît bien. 
👉 La commune a normalement entretenu l’ouvrage public en cause. La circonstance que la collectivité a ultérieurement procédé à des travaux de signalisation du défaut et de réfection de l’escalier est sans incidence.
 
 

Désordres causés par des racines d’arbres - Réparation du préjudice de pertes d’exploitation imputable au dommage de travaux publics

La cour administrative d’appel de Douai condamne un département à indemniser les exploitants d’une boulangerie en raison des désordres causés à l’immeuble occupé en vertu d’un bail commercial.
Les désordres (d’importantes fissures) sont consécutifs à un phénomène de dessiccation des sols directement lié à la présence d’un peuplier d’Italie implanté, à proximité, sur le parking d’un collège.
La présence des racines de cet arbre sous les fondations de l’immeuble avait été constatée au cours de l’expertise.
 
👉Le département engage sa responsabilité. Le montant total des pertes d’exploitation imputable au dommage de travaux publics est évalué à 89 319,28 euros (le juge déduit ensuite de cette somme celle de 65 000 euros versée à titre provisionnel, soit une somme restant à verser s’élevant à 24 319,28 euros).