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La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - Mai 2021

Juridiscope territorial et associatif - Dernière mise à jour le 22/09/2022

Retrouvez un résumé des décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire Smacl des risques de la vie territoriale & associative. Certaines ont été (très) médiatisées, d’autres moins mais sont tout aussi instructives.

Les archives

🚨 Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les personnes poursuivies bénéficient toujours de la présomption d’innocence.

Le but de cette rubrique n’est pas de jeter le discrédit sur les acteurs de la vie territoriale et associative qui, comme le démontrent nos chiffres, sont intègres et diligents dans leur très grande majorité. Il s’agit de recenser et résumer les décisions de justice, en respectant l’anonymat des personnes impliquées, pour attirer l’attention des acteurs publics locaux et associatifs sur les risques juridiques encourus dans l’exercice de leurs fonctions et leur permettre de dégager des axes de prévention pertinents dans leurs pratiques quotidiennes.

Les symboles 🔴 ou 🔵 ne constituent pas un jugement de valeur mais sont de simples repères visuels permettant au lecteur d’identifier plus facilement l’issue favorable (🔵) ou défavorable (🔴) de la procédure pour les personnes mises en cause.

🔵Tribunal correctionnel de Béziers, 5 mai 2021

Relaxes d’une ville (commune de plus de 10 000 habitants), de son maire, du directeur des arènes et d’un torero poursuivis pour actes de cruauté envers animaux sur plainte d’une société de protection des animaux opposée aux corridas. Le tribunal relève l’existence d’une tradition taurine interrompue dans la localité pour justifier la relaxe.

🔴Cour d’appel de Riom, 6 mai 2021*

Condamnation d’un élu d’un syndicat intercommunal poursuivi pour diffamation non publique. Il lui est reproché l’envoi d’un courrier destiné au président d’un organisme et adressé en copie à chaque membre du conseil d’administration (auquel il siégeait en qualité de représentant du syndicat intercommunal), contenant ses observations sur le compte rendu de la réunion dudit conseil. Pour s’exonérer de toute responsabilité, l’élu avait proposé d’apporter la preuve de la vérité des accusations litigieuses. En vain : il est condamné à huit amendes de 38 euros.

* La Cour de cassation a annulé la condamantion le 5 avril 2022

🔵 Cour d’appel de Montpellier, 10 mai 2021

Relaxes de deux policiers municipaux (commune de moins de 7500 habitants) poursuivis pour diffamation publique sur plaintes du maire et du responsable du service. Il leur était reproché la diffusion d’un tract envoyé par mail au directeur général des services de la commune, dénonçant des agissements “illégaux” du chef de poste, réalisés “sous le couvert du maire”. Ils dénonçaient notamment le fait que certains policiers avaient reçu pour mission de conduire les SDF et les jeunes routards en dehors du territoire communal. A la suite de mutations et compte tenu de l’engagement syndical de certains, ils accusaient également leur hiérarchie de harcèlement moral, de discrimination syndicale et d’entrave à la liberté syndicale. La cour d’appel souligne que le tract n’ayant été envoyé qu’à une seule personne (le DGS), il ne présente pas de caractère public.

🔴 Tribunal correctionnel de Strasbourg, 11 mai 2021

Condamnation d’une association de lutte contre contres discriminations homosexuelles pour harcèlement moral sur plainte d’une salariée qui a tenté de se suicider. Après un changement de présidence et de conflits au sein du conseil d’administration, chaque administrateur se considérait comme l’employeur légitime de la salariée qui recevait des injonctions contradictoires. Certains administrateurs ont considéré que l’intéressée avait pris fait et cause pour l’ancienne présidente et s’opposait à la politique que menait le conseil d’administration. Ce sont différentes personnes qui ont fait pression de manière isolée, au travers de petits éléments parcellaires. Déconsidérée dans son travail, l’employée a tenté de mettre fin à ses jours après avoir appris qu’elle serait désormais privée des codes d’accès aux réseaux sociaux pour gérer la communication de l’association. A l’audience le procureur de la République a souligné « l’organisation imprécise », « le non-respect de la fiche de poste » et « l’absence de formation » de la victime. L’association est condamnée à 15 000 euros d’amende avec sursis et à verser 5000 euros de dommages-intérêts à la partie civile.

🔴 Tribunal correctionnel de Thionville, 11 mai 2021

Condamnation d’un maire (commune de plus de 10 000 habitants) pour favoritisme. il lui est reproché de ne pas avoir respecté les règles de mise en concurrence dans le cadre du renouvellement de neuf photocopieurs destinés aux écoles pour un montant de plus de 100 000 €. Pour sa défense l’élu invoquait son inexpérience, arguant du fait qu’il était jeune élu « sous pression médiatique » et qu’il répondait à « une demande du corps enseignant ». Il est condamné à 15 000 € d’amende dont 10 000 euros avec sursis.

🔴 Tribunal correctionnel de Bastia, 18 mai 2021

Condamnation d’une commune (moins de 1000 habitants) pour pollution et infractions au droit de l’environnement. En 2016 des inspecteurs de l’environnement avaient mis en lumière un phénomène de déversement d’eaux usées dans l’affluent d’un cours d’eau qui alimente en eau une partie de la région. En cause l’obsolescence de la station d’épuration, construite dans les années soixante-dix. Le nouveau maire qui représentait la commune à l’audience a hérité de la situation laissée par l’ancienne équipe qui avait fait état d’un projet de réhabilitation de la station pour 800 000 € sans le concrétiser. La nouvelle municipalité a engagé un projet de construction d’une nouvelle station, sur une parcelle plus éloignée que la commune vient d’acquérir mais recherche encore les financements pour cet investissement de 3,4 millions d’euros. En attendant elle est condamnée à 50 000 euros d’amende dont 40 000 euros avec sursis.

🔴 Tribunal correctionnel de Valenciennes, 18 mai 2021

Condamnation du secrétaire d’une association, par ailleurs ancien élu municipal, pour abus de confiance. Il lui est reproché d’avoir utilisé les chéquiers de l’association pour des achats personnels (plus de 2000 euros). C’est une commerçante qui n’avait pu encaisser les chèques, le compte n’étant pas approvisionné, qui a déposé plainte. Il est condamné à six mois d’emprisonnement et à cinq ans d’inéligibilité.

🔵 Cour de cassation, chambre criminelle, 18 mai 2021

Annulation de la condamnation d’une association pour coupe d’arbres sur des parcelles classées en zone d’élément de paysage par le plan local d’urbanisme de la commune en contravention avec les règles d’urbanisme. La Cour de cassation reproche aux juges d’appel de ne pas avoir appeler la commune, partie intéressée, à présenter ses observations. L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel d’Orléans pour être jugée à nouveau conformément à la loi.

🔴 Cour d’appel de Rennes, 19 mai 2021

Condamnation de l’ancien directeur d’une MJC pour abus de confiance sur plainte de la ville (plus de 10 000 habitants), principal financeur de l’association. Un audit lancé par la commune avait mis à jour une inflation du budget des frais de déplacement et une prime conséquente accordée pour une médaille du travail. Il est condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis, et interdiction d’exercer l’activité de directeur d’une association recevant des fonds pendant trois ans.

🔴 Tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, 21 mai 2021

Condamnation d’un ancien maire à rembourser sur ses deniers personnels 56 000 euros à la commune (plus de 10 000 habitants). Le tribunal statuait sur les intérêts civils après que la condamnation de l’élu pour détournement de fonds publics ait été confirmée en appel. Sur le fond il était reproché à l’ancien maire d’avoir mis des agents de la commune et des biens de la commune à disposition du club de foot local. La nouvelle municipalité lui réclamait le remboursement des salaires des agents mis à disposition, mais aussi des machines à laver, de la lessive, des frais d’agents de sécurité, des frais de transport, des frais d’avocat et 10 000 euros pour le préjudice moral. L’ancien élu est condamné sur ses deniers personnels à verser 56 000 euros à la commune dont 1000 euros en réparation du préjudice moral de la commune. L’ancien maire s’étonne de cette condamnation, soulignant qu’aucun enrichissement personnel ne lui est reproché.

🔴 Tribunal correctionnel de Saint-Denis de la Réunion, 21 mai 2021

Condamnation d’un élu local, président d’une société publique locale (SPL), pour abus de bien social, prise illégale d’intérêts et non déclaration de son patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique sur signalement de la chambre régionale des comptes qui avait pointé son salaire mensuel de 6 800 euros net, sans autorisation formelle du conseil d’administration et avec une nette augmentation par rapport à son prédécesseur (+52%), alors que dans le même temps la SPL licenciait des salariés pour motifs économiques. Il lui est également reproché d’avoir touché des jetons de présence sans autorisation et d’avoir fait embaucher dans des conditions avantageuses une amie. Il est condamné à 15 mois d’emprisonnement avec sursis et à trois ans d’inéligibilité. L’élu est en revanche relaxé des faits de concussion pour lesquels il était également poursuivi.

🔴 Cour d’appel de Paris, 25 mai 2021*

Condamnations de la directrice et du directeur des services techniques (DST) d’un OPHLM poursuivis des chefs de corruption passive . Il leur était reproché des irrégularités dans dix-sept marchés publics conclus entre 2009 et 2012 et d’avoir bénéficié de voyage (en Chine pour la directrice, au Sénégal pour le DST) en échange de l’attribution de marchés publics. Relaxés en première instance, les deux prévenus sont condamnés en appel à 15 000 euros d’amende dont 12 000 euros avec sursis pour la directrice, et à 13 000 euros d’amende dont 11 000 euros avec sursis pour le DST. Ils sont en revanche relaxés du chef de favoritisme.

* Condamnation annulée par la Cour de cassation dans un arrêt du 25 mai 2022

🔴 Tribunal correctionnel de Grenoble, 26 mai 2021

Condamnation d’un maire (commune de moins de 250 habitants) pour diffamation sur plainte de deux élus du comité des fêtes qu’il avait accusés dans le journal municipal et dans une lettre ouverte aux habitants de détournements. Le maire avait également déposé plainte mais le parquet avait classé l’affaire sans suite. Les deux élus visés avaient répliqué par une plainte pour diffamation, expliquant que leur vie dans le village était devenu invivable à la suite de ces accusations. Le maire est condamné à 1000 euros d’amende avec sursis et à verser 800 euros de dommages-intérêts à chacun des deux plaignants.

🔴 Tribunal correctionnel de Béthune, mai 2021*

Condamnation d’une directrice générale des services (commune de moins de 3500 habitants) pour faux en écriture. Il lui est reproché d’avoir falsifié une délibération du conseil municipal relative à la participation de la commune dans la prévoyance des employés communaux. Cette participation fixée en séance à 15 € a été doublée dans la version transmise à la trésorerie. Avec pour conséquences un trop-perçu par les agents municipaux et une dépense supplémentaire pour la mairie… Contestant fermement les faits, elle est condamnée à huit mois d’emprisonnement avec sursis.

*date précise du jugement non mentionnée dans l’article de presse en faisant état

🔴Cour de cassation, chambre criminelle, 26 mai 2021

Condamnation du directeur du ballet d’un opéra pour discrimination (non renouvellement du contrat de travail salarié en considération de l’état de grossesse). Il lui est reproché d’avoir écarté une danseuse soliste de la troupe pour cause de maternité. Pour sa défense le prévenu invoquait un choix purement artistique estimant que le style de la danseuse était resté très classique et avait des faiblesses techniques et stylistiques incompatibles le répertoire du ballet contemporain. Il soulignait également que le délit de discrimination dans les conditions de travail ou dans le déroulement de la carrière d’un salarié suppose que son auteur ait la qualité d’employeur ou puisse être regardé comme le représentant de ce dernier. Or, poursuivait-il, sauf délégation de pouvoirs, la seule circonstance que le renouvellement du contrat liant un agent à une collectivité territoriale ne puisse avoir lieu que sur proposition du responsable d’un service d’une association à la disposition de laquelle cet agent est placé ne fait de ce dernier, ni l’employeur, qui demeure la collectivité décisionnaire, ni un représentant de ce dernier. De fait les artistes danseurs sont engagés par le mairie sur proposition du directeur général de l’Opéra et du directeur de ballet. Sans convaincre la Cour de cassation qui confirme sa condamnation à 1500 euros d’amende avec sursis. En effet :

1° la recommandation de ne pas proposer le renouvellement du contrat d’un danseur, faite par le directeur de la danse à l’employeur, en application du règlement intérieur de l’Opéra s’analyse en une mesure au sens de l’article L. 1142-1 du code du travail.

2° il suffit qu’une telle mesure ait été proposée par une personne participant, de par ses fonctions, au pouvoir de direction de la personne morale qui la met en oeuvre, ou de l’un de ses organes, pour que cette personne physique, qu’elle ait ou non reçu une délégation de pouvoir, soit susceptible de faire l’objet de poursuites à raison de ce texte.

3° L’insuffisance de la technique de la plaignante en danse contemporaine, par lequel il a officiellement et formellement justifié sa proposition de non-renouvellement, dans sa correspondance adressée à la ville, n’est pas fondé (comme l’attestent de nombreux témoignages de professionnels louant sa parfaite technique, ses interprétations de grande qualité, son talent, et son sérieux) et qu’il a en revanche pris en considération la grossesse de l’intéressée comme il l’a sciemment et expressément admis dans une conversation enregistrée à son insu par la victime.

🔴 Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, 27 mai 2021

Condamnation d’un cadre territorial (commune de plus de 10 000 habitants) pour harcèlement sexuel sur plainte d’une subordonnée. Sont évoqués des compliments sur sa tenue vestimentaire, une demande de photo, un comportement tactile (main sur l’épaule, sur le dos, sur la taille)... Le prévenu concède un comportement inadapté mais conteste tout geste à caractère sexuel et réfute d’avoir mis une main sur la cuisse de la plaignante au cours d’une réunion, tout comme une tentative d’embrasser la plaignante. Il est condamné à quatre mois d’emprisonnement avec sursis. Sur le plan disciplinaire, après avoir fait l’objet d’une suspension administrative il a été mis à la retraite anticipée.

🔴 Tribunal correctionnel de Gap, 27 mai 2021

Condamnations de deux militants d’une association d’aide aux personnes migrantes pour aide à l’entrée en France de personnes en situation irrégulière. Il leur est reproché d’avoir aidé une famille afghane (un homme, sa femme enceinte de huit mois et leurs deux enfants de 14 et 6 ans) à passer la frontière franco-italienne. Pour leur défense les deux militants faisaient observer qu’ils étaient restés du côté français et qu’ils sont simplement allés à la rencontre de la famille sans franchir la frontière. Il soulignaient avoir agi dans un cadre purement humanitaire, sans contrepartie financière. Ils sont condamnés à deux mois d’emprisonnement avec sursis.

🔴 Tribunal correctionnel de Marseille, 28 mai 2021

Condamnation d’un conseiller départemental pour prise illégale d’intérêts. Au terme d’une instruction de plus de douze années, qui l’avait mis en cause pour de multiples infractions commises entre 1999 et 2011, l’élu est finalement jugé pour la seule préemption par le conseil général dont il était alors le président d’un terrain cédé ensuite à une communauté d’agglomération. Cette parcelle mitoyenne d’une décharge permettait ainsi l’extension et l’exécution d’un marché public de traitement des déchets dont la société de son frère venait d’être attributaire. Le tribunal souligne que l’élu « aurait dû être convaincu du fait que ses fonctions consistaient à représenter et porter les intérêts de la société et non de son frère. » Il est condamné à trois ans d’emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis (la partie ferme à purger à domicile sous bracelet électronique), à une amende de 30 000 euros et à la privation pendant cinq ans et avec exécution provisoire des droits civils et civiques dont l’éligibilité. Le frère de l’élu est condamné pour des malversations commises lors de la revente de ses sociétés, du blanchiment, et pour avoir faussé les marchés publics de la propreté passés par un EPCI à six ans d’emprisonnement ferme avec mandat de dépôt différé et à la confiscation de plus de 10 millions d’euros saisis sur ses comptes et ceux de ses sociétés. Sept autres prévenus sont condamnés dont l’ancien directeur de cabinet de l’élu (six mois d’emprisonnement avec sursis) pour avoir ordonné la destruction d’ordinateurs avant les perquisitions des enquêteurs.

🔴 Tribunal correctionnel de Saint-Denis de la Réunion, 28 mai 2021

Condamnation d’une adjointe au maire (commune de moins de 7500 habitants) pour prise illégale d’intérêts. Il lui est reproché d’avoir participé à la délibération (voté à l’unanimité) relative à la vente d’un terrain communal à ses parents. L’adjointe est reconnue coupable mais avec dispense de peine. Le maire était également poursuivi pour complicité. Il lui était reproché de ne pas avoir demandé à son adjointe de sortir de la salle au moment où la question était abordée. Il est relaxé.

🔴 Tribunal correctionnel de Grâce, mai 2021*

Condamnation d’un ancien maire (commune de moins de 100 habitants) pour prise illégale d’intérêts sur plainte en 2013 de deux administrés. Il lui est reproché :
 d’avoir voté une subvention annuelle de 400 € au comité des fêtes dont la présidente était à l’époque sa propre épouse ;.
 d’avoir fait acheter par le commune un minibus servant au transport des personnes âgées, par l’intermédiaire d’un concessionnaire qui l’avait lui-même acquis auprès du beau-fils du prévenu.

Le tribunal relaxe partiellement l’ancien maire et le condamne à une amende de 3.000€ avec sursis. Il devra également indemniser les victimes et la commune pour préjudice moral.

*date précise du jugement non mentionnée dans l’article de presse en faisant état