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Restauration scolaire : pas d’obligation de pousser les murs de la cantine !

Conseil d’Etat, 22 mars 2021, N° 429361

Une commune peut-elle refuser d’inscrire un élève au service public de restauration scolaire en invoquant le manque de places disponibles ?

Oui juge le Conseil d’Etat : les collectivités peuvent légalement refuser d’admettre un élève lorsque, à la date de la décision, la capacité maximale d’accueil du service public de la restauration scolaire est atteinte. Si l’article L.131-13 du code de l’éducation dispose que « l’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés » ces dispositions « ne font pas obstacle à ce que les collectivités territoriales puissent légalement refuser d’y admettre un élève lorsque, à la date de leur décision, la capacité maximale d’accueil de ce service public est atteinte ».

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Un parent d’élève demande au maire de Besançon d’inscrire son fils au service public de restauration scolaire organisé par la commune. Le maire refuse de faire droit à la demande en invoquant le manque de places disponibles. Il s’appuie sur le règlement des accueils périscolaires de la commune qui subordonne l’inscription à la cantine à l’existence de places vacantes.

La décision de refus d’inscription prise sur le fondement de ce règlement est annulée par le Tribunal administratif de Besançon qui érige le droit d’être inscrit à la cantine scolaire en droit absolu (TA Besançon, 7 décembre 2017 : n°1701724 – Observatoire Smacl).

L’article L.131-13 du code de l’éducation résultant de la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté consacre en effet un droit à l’inscription à la cantine lorsque ce service existe :

« L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille » .

En se fondant sur ces dispositions, le tribunal administratif avait conclu que :

« les personnes publiques ayant choisi de créer un service de restauration scolaire pour les écoles primaires dont elles ont la charge sont tenues de garantir à chaque élève le droit d’y être inscrit ».

Par conséquent, il appartient aux collectivités d’adapter et de proportionner le service à cette fin, un refus d’inscription ne peut être opposé au motif de l’absence de places disponibles, et ce, même si le dossier d’inscription a été déposé par les parents hors délai.

La décision avait été confirmée par un arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 5 février 2019 (n°18NC00237) contre lequel la commune s’est pourvue en cassation.

Le Conseil d’Etat désavoue les premiers juges en interprétant différemment et d’une manière plus souple les dispositions de l’article L.131-13 du code de l’éducation.

Pour la Haute juridiction, le législateur a entendu rappeler par ces dispositions deux principes fondamentaux que doivent respecter les collectivités dès lors que le service de restauration existe (le service public de la restauration scolaire étant un service public facultatif) :
  le principe de l’intérêt général « qui s’attache à ce que tous les élèves puissent bénéficier de ce service public »,
  le principe d’égalité qui interdit tout refus d’inscription d’un élève sur un fondement contraire à ce principe.

Toutefois, l’article L.131-13 du code de l’éducation ne crée pas une obligation pour les collectivités d’inscrire un élève dès lors que le service n’a pas la capacité de l’accueillir (absence de places disponibles).

Les dispositions de l’article L.131-13 du code de l’éducation « ne font pas obstacle à ce que les collectivités territoriales puissent légalement refuser d’y admettre un élève lorsque, à la date de leur décision, la capacité maximale d’accueil de ce service public est atteinte ».

Le Conseil d’Etat fait le choix d’une solution pragmatique plus adaptée aux difficultés que peuvent rencontrer les collectivités.

L’affaire devra être rejugée par la cour administrative d’appel de Nancy.

Conseil d’Etat, 22 mars 2021 : N°429361

[1Photo : Jason Leung sur Unsplash