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Harcèlement moral - Eléments constitutifs - Modifications des horaires

Cour administrative d’appel de Marseille, 13 novembre 2018, N° 17MA01470

La modification d’horaires de service, en violation d’un accord individuel, constituent-elle un élément de fait susceptible de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral ?

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Non dès lors que cette modification est réalisée dans l’intérêt du service. Tel est le cas, par exemple, de modifications des horaires de service concomitantes à la réorganisation des services municipaux, résultant de celles de l’ouverture au public des services de la mairie. Peu importe que ces changements aient eu pour effet de réviser un accord individuel conclu avec un agent sur ses horaires de travail, de tels changements n’étant pas liés à la seule personne de l’intéressé, et ne constituant pas ainsi des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral.

En revanche, en l’espèce il résulte de l’instruction, notamment de l’attestation d’un co-listier du maire que, au cours de la campagne électorale en 2014, l’élu a déclaré à son équipe "si nous sommes élus, la première personne qu’il faudra virer c’est B... ". De fait, tout de suite après son élection, le maire avait donné pour consigne de ne plus communiquer d’informations à l’intéressée, ni de lui confier de dossiers avec pour finalité "de la faire craquer afin qu’elle quitte la mairie".

De même le nouveau maire lui notifiait le retrait de la délégation de signature ainsi que les fonctions qu’elle assurait dans le cadre du service des mariages et des élections. En outre la justice administrative a annulé, pour une insuffisance de motivation, l’arrêté du maire de la commune abrogeant des arrêtés attribuant à l’intéressée une indemnité d’exercice des missions de préfectures et une indemnité d’administration et de technicité.

Enfin, par arrêtés successifs du maire, la requérante a fait l’objet d’avertissements pour des faits de manquement de courtoisie à l’égard du maire, de propos "injurieux" qui auraient été tenus à l’encontre d’une adjointe au maire et de dysfonctionnements qui auraient été fautifs, dans la gestion du service de l’accueil, relevés en l’absence de la requérante. Mais, à la suite d’un recours contentieux, ces décisions ont été retirées ce qui laisse supposer qu’elles n’étaient pas suffisamment étayées.

Ainsi l’ensemble des ces éléments de fait invoqués (à l’exception de la modification des horaires de service) sont susceptibles de faire présumer l’existence d’agissements constitutifs d’un harcèlement moral à l’encontre de la requérante, sans que la commune soit en mesure de démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La commune est condamnée à verser 8000 euros de dommages intérêts à la plaignante en réparation de son préjudice moral, sans préjudice de la liquidation de la somme due au titre de l’indemnité d’exercice des missions de préfectures et de l’indemnité d’administration et de technicité.

Cour administrative d’appel de Marseille, 13 novembre 2018, N° 17MA01470

[1Photo : Kevin Ku sur Unsplash