Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Eolienne - Annulation du permis - Démantèlement - Pouvoir du juge judiciaire

Publié le 1er juin 2018

Le juge judiciaire, peut-il sur recours d’une association, ordonner la démolition d’éoliennes implantées en méconnaissance des règles d’urbanisme ?

Oui si le permis autorisant la construction d’une telle installation a préalablement été annulé par la juridiction administrative.

En effet lorsqu’une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l’ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d’urbanisme ou des servitudes d’utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative.

En l’espèce après avoir obtenu l’annulation de l’arrêté préfectoral autorisant la construction de quatre éoliennes, une association contre le projet éolien et quatorze autres riverains ont assigné la société devant le juge judiciaire, sur le fondement des articles L. 480-13 du code de l’urbanisme et 1382 (devenu 1240 du code civil) pour voir ordonner le démontage des éoliennes et du poste de livraison et obtenir le paiement de dommages-intérêts.

Les juges du fond avaient accueilli l’exception d’incompétence soulevée par la société au nom du principe de la séparation des pouvoirs : même si la juridiction administrative, en annulant le permis de construire, a sanctionné le non-respect des prescriptions en matière d’urbanisme, le juge judiciaire ne peut ordonner la démolition des éoliennes litigieuses, dès lors qu’une telle mesure aurait pour effet de remettre en cause la poursuite de l’activité de ces installations, qui relèvent, pour leur exploitation, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement.

La Cour de cassation censure cette position :

🔸 le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s’oppose seulement à ce que le juge judiciaire substitue sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a portée, dans l’exercice de ses pouvoirs de police spéciale, sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter des installations classées pour la protection de l’environnement. Ainsi, il n’appartient qu’à la juridiction administrative de connaître de la demande tendant à l’enlèvement d’une éolienne, au motif que son implantation ou son fonctionnement serait susceptible de compromettre la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publiques, l’agriculture, la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, l’utilisation rationnelle de l’énergie, ou la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique.

🔸 en revanche, lorsque le permis autorisant la construction d’une telle installation a été annulé par la juridiction administrative, le juge judiciaire est compétent pour ordonner la démolition de l’éolienne implantée en méconnaissance des règles d’urbanisme.

Cour de cassation, chambre civile, 14 février 2018, N° 17-14703