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Panneaux véhiculant des préjugés sexistes - Discrimination - Liberté fondamentale - Office du juge des référés

Publié le 11 septembre 2017

Le juge des référés peut-il enjoindre à une commune d’enlever des panneaux véhiculant, selon une association, des stéréotypes sexistes et discriminatoires à l’égard des femmes ?

Oui mais sous réserve qu’il s’agisse d’une discrimination, eu égard aux motifs qui l’inspire ou aux effets qu’elle produit, constituant une atteinte à une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. En revanche la méconnaissance du principe d’égalité ne révèle pas, par elle-même, une atteinte de cette nature légitimant une intervention du juge des référés. En l’espèce, il résulte de l’instruction que l’installation des panneaux litigieux [1] n’a pas été inspirée par des motifs traduisant la volonté de discriminer une partie de la population et n’a pas pour effet de restreindre l’exercice d’une ou plusieurs libertés fondamentales. Par suite, la commune est fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a prescrit l’enlèvement des installations litigieuses au motif qu’elles portaient une atteinte grave et manifestement illégale à l’égalité entre les femmes et les hommes, qui est une composante du principe d’égalité.

Conseil d’État, 1er septembre 2017, N° 413607

[1La commune de Dannemarie (Haut-Rhin ; 2 300 habitants), choisit chaque année un thème qu’elle décline en animations et en événements sur son territoire. Dans ce cadre, la commune a choisi de faire de 2017 l’année de la femme. Elle a organisé à ce titre un salon de la femme, décidé l’attribution de distinctions à des femmes qui ont marqué la vie de la cité, attribué à une rue le nom de Mme B...A..., en hommage à l’une des fondatrices du Mouvement de libération des femmes, native de Dannemarie, et réalisé au mois d’août 2017 une exposition sur le rôle des femmes pendant la Première Guerre mondiale. La commune a également procédé, au mois de juin 2017, à l’installation dans plusieurs espaces publics de cent vingt-cinq panneaux, fabriqués par la première adjointe au maire, dont soixante ont la forme d’accessoires, tels que chapeaux, sacs ou chaussures, ou d’éléments du corps féminin, tandis que soixante-cinq représentent des silhouettes de femmes, à différents âges de la vie et dans différentes attitudes. Estimant que ces panneaux véhiculaient des stéréotypes sexistes et discriminatoires à l’égard des femmes, l’association " Les Effronté-e-s " a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg d’en prescrire l’enlèvement de l’espace public sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.