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de la vie territoriale & associative

La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - Février 2014

Juridiscope territorial et associatif

Retrouvez les décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire Smacl des risques de la vie territoriale

(dernière mise à jour le 16/09/2016)

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Cour d’appel de Caen, 3 février 2014

Relaxe d’un président d’une communauté de communes poursuivi du chef de harcèlement moral sur plainte de la directrice générale des services. La plaignante reprochait à l’élu de l’avoir publiquement dénigrée, d’avoir recommandé aux autres agents municipaux de la tenir à distance, de l’avoir installée seule dans la salle des commissions, de ne lui avoir confié aucune tâche, de ne pas l’avoir conviée aux cérémonies de fin d’année et d’avoir refusé d’aménager ses horaires de travail. Autant d’éléments que les juges du tribunal correctionnel avaient retenu comme éléments à charge contre l’élu pour le déclaré coupable. Sur l’action civile, le tribunal avait néanmoins procédé à un partage de responsabilité par moitié au motif que les problèmes de compétence et de comportement de la partie civile avaient contribué à provoquer une dégradation des relations professionnelles entre les parties. Les juges d’appel, tout en reconnaissant que l’élu avait eu un comportement inadapté, avaient considéré que les éléments caractérisant un harcèlement moral n’étaient pas réunis.

Tribunal correctionnel de Saint-Omer, 4 février 2014

Condamnation d’un maire (commune de 900 habitants) poursuivi pour des faits de faux en écriture, détournement de fonds et prise illégale d’intérêts. Il lui était reproché, entre autre, d’avoir falsifié des factures pour couvrir les frais d’une fête personnelle (frais de boisson et de traiteur pour un montant de 1200 euros). Il est condamné à douze mois de prison avec sursis, 5 000 euros d’amende et à une privation de cinq ans de ses droits civiques, civils et de famille. L’élu est en revanche relaxé sur un autre volet de l’affaire relatif à la falsification d’un extrait du registre des délibérations au conseil municipal. La peine de privation des droits civiques (laquelle emporte l’inéligibilité) est déclarée immédiatement exécutoire sans effet suspensif d’un éventuel appel. Ce sont des élus du conseil municipal qui ont dénoncé les faits en 2012 ce qui avait valu au maire 24 heures de garde à vue.

Tribunal correctionnel de Béthune, 11 février 2014

Condamnation de l’ancienne directrice d’un centre de loisirs des chefs de détournements de fonds, abus de confiance, faux et usage. Il lui est reproché d’avoir détourné près de 100000 euros de fonds de la structure associative largement subventionnée par la municipalité. Le bureau de l’association avait déposé plainte après avoir découvert un trou dans le trésorerie de 56 000 euros. La prévenue est condamnée à 12 mois de prison avec sursis et devra verser 92000 euros de dommages-intérêts à l’association qui devrait ainsi éviter la liquidation judiciaire.

Tribunal correctionnel de Metz, 13 février 2014

Condamnation d’un maire (commune de 14 000 habitants) du chef de diffamation à 2 000 euros d’amende et 1 000 euros de dommages et intérêts. Lors d’un conseil municipal, il avait voulu discréditer un soutien de l’un des membres de l’opposition en évoquant une affaire judiciaire dans lequel celui-ci avait été impliqué. L’élu assure avoir fait un lapsus et s’être inconsciemment trompé de nom ( la personne désignée avait été placée deux mois en détention provisoire avant d’être finalement relaxée).

Cour d’appel de Montpellier, 13 février 2014

Condamnation d’une salariée d’un office de tourisme pour recel de prise illégale d’intérêts. Elle avait été recrutée en échange des services rendus par son mari, inspecteur des impôts, qui avait évité au maire (commune de 9500 habitants) un redressement fiscal dans le cadre de son activité libérale... Le maire, poursuivi pour corruption et prise illégale d’intérêts, s’était suicidé pendant l’instruction. La salariée de l’office est condamnée à un an d’emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d’amende ; son mari, fonctionnaire des impôts, à 10 000 euros d’amende, deux ans d’interdiction d’exercer des droits civiques, civils et de famille, et à cinq ans d’interdiction professionnelle.

Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, chambre d’appel de Mamoudzou, 13 février 2014

Condamnation d’un maire (commune de 50000 habitants) des chefs de recel, aide au séjour irrégulier d’étrangers et d’un mineur étranger, faux et de corruption passive. Alourdissant la peine prononcée en première instance, les juges d’appel condamnent l’élu à trente mois d’emprisonnement, dont douze mois avec sursis (soit dix huit mois fermes), 10 000 euros d’amende et à l’interdiction définitive d’exercer toute fonction publique. Ils relèvent en effet "que les citoyens ou électeurs sont en droit d’attendre de leurs élus la plus grande probité ainsi qu’un comportement exemplaire tant dans leurs actes que dans la gestion des deniers publics" et que le prévenu,"maire d’une commune, s’est rendu coupable de recel de détournement de fonds publics et d’aide aggravée et simple aux séjours irréguliers" alors "que dans le contexte de Mayotte, où les problèmes économiques et d’immigration clandestine sont particulièrement prégnants, ce type de comportement apparaît choquant".

Cour d’appel de Chambéry, 13 février 2014

Condamnation d’un premier adjoint en charge de l’urbanisme des chefs de prise illégale d’intérêts et travail dissimulé (commune de 1 300 habitants). Il lui est reproché d’avoir participé à l’instruction et aux délibérations du conseil municipal ayant abouti à la réalisation d’un projet immobilier dans lequel il avait un intérêt personnel. Le projet en question comportait la vente d’un terrain de la commune à une société dont l’élu détenait la quasi-totalité des parts. L’argument selon lequel l’élu avait revendu ses parts postérieurement [2] à une délibération concernant l’avancée du projet n’a pas d’incidence selon les juges sur la caractérisation du délit de prise illégale d’intérêts. Le programme immobilier avait en outre été conduit en ayant recours au travail dissimulé et à l’emploi d’étrangers non munis d’autorisation. L’élu est condamné à un an d’emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d’amende.

Cour d’appel de Metz, Chambre de l’instruction, 18 février 2014

Non-lieu rendu au profit d’un conseiller municipal poursuivi des chefs de prise illégale d’intérêts et de détournements de fonds publics sur plainte de la commune (14000 habitants). La nouvelle majorité municipale voyait un détournement de fonds publics dans le fait que l’intéressé ait occupé, avec l’autorisation de la collectivité, une parcelle du territoire communal sans payer de redevance pour y construire un garage. La chambre de l’instruction relève que la parcelle de terrain litigieuse n’a pas été remise à l’intéressé en raison de ses fonctions ou de sa mission, les attributions de celui-ci au sein du conseil municipal n’ayant jamais consisté à gérer et employer le patrimoine immobilier de la commune. En outre cette situation ne peut s’analyser sous l’angle d’un éventuel détournement de fonds publics, l’élu n’ayant jamais dans l’exercice de ses fonctions, été dépositaire ou responsable du bien prétendument détourné. Enfin il n’est pas démontré que l’élu ait participé à une délibération ou à un vote concernant l’attribution de la parcelle de terrain, ou la possibilité ultérieure pour lui de la racheter ainsi que le garage édifié.

Cour de cassation, chambre criminelle, 18 février 2014

Annulation du non-lieu dans une information, suivie sur la plainte d’une association, contre une communauté d’agglomération du chef d’infractions au code de l’environnement. L’association dénonçait les conditions dans lesquelles les eaux usées provenant de la station d’épuration étaient rejetées en mer. En outre la station d’épuration a fonctionné plusieurs années tout en étant dépourvue des autorisations requises (notamment à la suite de l’annulation d’un arrêté préfectoral portant autorisation et régularisation). La chambre de l’instruction avait néanmoins rendu un non-lieu estimant que l’absence de réaction du représentant de l’Etat face à une situation qu’il ne pouvait ignorer, avait pu être interprété comme une autorisation tacite par le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) dont les compétences ont été transférées à la communauté d’agglomération. La Cour de cassation annule l’arrêt et renvoie l’affaire devant une autre chambre de l’instruction.

Cour de cassation, chambre criminelle, 18 février 2014

Annulation du non-lieu rendu au profit d’une commune (4500 habitants) mise en examen pour homicide involontaire après le décès d’une fillette dans un accident de la circulation impliquant un tracteur équipé d’une débroussailleuse, appartenant à la commune. Le véhicule, conduit par un employé municipal occupé à nettoyer les haies empiétait d’environ 1,50 mètre sur la voie droite de la chaussée mouillée et a été heurté par un autre véhicule. Selon le responsable de la délégation de l’aménagement auprès du conseil général, le tracteur et la débroussailleuse auraient dû être équipés de gyrophare, tri-flash et bandes de signalisation, alors que le tracteur n’était équipé que de gyrophares et qu’aucun panneaux de présignalisation d’un chantier mobile n’avait été mis en place. La chambre de l’instruction avait néanmoins prononcé un non-lieu estimant que la réglementation en vigueur n’imposait une telle signalisation qu’en fonction des conditions de visibilité et qu’en l’espèce il n’était pas fait état de conditions atmosphériques particulières de nature à perturber la visibilité. La Cour de cassation censure cette position reprochant aux premiers juges de ne pas avoir recherché si , compte tenu des conditions de visibilité, l’insuffisance de signalisation du tracteur équipé d’une débroussailleuse n’était pas constitutive d’une faute ayant nécessairement contribué au dommage et si le maire ou son délégataire avait donné les instructions et exercé une surveillance suffisantes pour l’éviter. L’affaire est renvoyée devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Angers.

Cour de cassation, chambre criminelle, 19 février 2014

Condamnation d’un maire (commune de 9000 habitants) poursuivi pour complicité de faux et manœuvres frauduleuses ayant pour but d’enfreindre les dispositions du code électoral concernant l’exercice du vote par procuration sur plainte d’un opposant politique ayant perdu les élections municipales de 2008. Pour le plaignant, battu de 104 voix, les élections, bien que validées par les juridictions administratives, ont été faussées par des altérations de procuration. L’élu est reconnu en partie coupable des faits visés par la prévention. L’élu est condamné à 10 mois de prison avec sursis, trois ans d’interdiction des droits civils et civiques et 10 000 € d’amende. Il devra en outre verser 3 000 € de dommages-intérêts à la partie civile au titre de réparation du préjudice moral. Le plaignant recherche par ailleurs la responsabilité administrative de l’Etat, le dossier d’instruction attestant, selon lui, que des policiers en poste au moment des faits ont réalisé des faux en écriture.

Tribunal de Police d’Agen, 20 février 2014

Annulation des poursuites pour excès de vitesse dirigées contre le président d’un SDIS (par ailleurs maire d’une commune de 70 habitants) qui avait été flashé à plus de 150 km/heures en se rendant à une réunion sur une portion de route où la vitesse était limitée à 90 km/heure. Le permis de l’élu avait été suspendu et son véhicule confisqué. La procédure est annulée en raison d’une erreur commise par les gendarmes sur le lieu de commission de l’infraction lors de la rédaction du procès-verbal ayant servi de base aux poursuites.

Cour de cassation, chambre criminelle, 25 février 2014

Annulation d’un arrêt de relaxe rendu au bénéfice d’un président de conseil régional poursuivi pour diffamation. Au cours d’un débat télévisé il avait publiquement accusé un parti politique concurrent d’acheter des voix en distribuant de l’alcool. Les juges d’appel avaient relaxé l’élu, estimant que que l’expression utilisée ("ces personnes") était insuffisante pour déterminer les personnes visées par les critiques formulées et que les propos tenus ne sauraient au surplus avoir de caractère diffamatoire dès lors que leur auteur admettait lui même avoir recours aux procédés qu’il dénonçait (l’élu affirmant dans le même passage que, pour sa part, il distribuait du pain, des jouets et des ouvrages pédagogiques)... La Cour de cassation censure la cour d’appel, de tels propos imputant aux membres du parti politique en cause des pratiques consistant à favoriser l’alcoolisme de populations à des fins électoralistes et de telles imputations étant de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération de la partie civile.

Juge d’instruction de Carcassonne, 27 février 2014

Ordonnance de non lieu rendue à l’encontre d’un ancien maire (ville de 45 000 habitants) poursuivi pour corruption et trafic d’influence. Il était accusé par son opposant, et maire actuel, d’avoir acheté le vote d’électeurs lors de la campagne des municipales de 2008, alors qu’il était maire sortant. Initialement classée sans suite, l’affaire avait été relancée par une plainte avec constitution de partie civile prenant appui sur un témoin qui s’est par la suite rétracté (lui valant des poursuites du chef de dénonciation calomnieuse).

Tribunal correctionnel d’Alès, 28 février 2014

Nullité de la citation délivrée contre un maire (commune de 800 habitants) poursuivi du chef de mise en danger délibérée de la vie d’autrui sur plainte d’une jeune fille qui avait chuté d’un muret. Le tribunal relève que les termes de la citation ne respectent pas les prescriptions de l’article 550 du code de procédure pénale en ce que la citation est délivrée au maire de la commune sans aucune mention des nom, prénoms et adresse du destinataire et qu’il existe un doute sur le point de savoir si le maire est poursuivi à titre personnel ou en qualité de représentant légal de la commune.


Avertissements

Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les élus et les fonctionnaires condamnés bénéficient donc toujours de la présomption d’innocence.

Par respect pour ce principe, l’Observatoire SMACL des risques de la vie territoriale a volontairement occulté les noms des prévenus et des parties civiles.

Vous pouvez nous aider à consolider notre base d’observation en nous transmettant (observatoire@smacl.fr) les références de décision de justice ou d’article de presse relatives à des mises en cause pénales d’élus locaux, de fonctionnaires territoriaux ou de collectivités territoriales.

[1Photo : © Ene

[2pour mieux les reprendre plus tard.