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La jurisprudence de la semaine du 14 au 18 octobre 2013

Action sociale / Contentieux et procédures / Etat civil / Fonction publique et droit social / Voirie / Urbanisme

(dernière mise à jour le 21/02/2014)

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Action sociale

 La décision par laquelle une caisse d’allocations familiales entend faire rembourser par un allocataire du revenu de solidarité active (RSA) un trop-versé doit-elle être précédée d’une procédure contradictoire préalable ?

Non : si une telle décision doit être motivée, elle n’est pas soumise au respect d’une procédure contradictoire préalable. En revanche l’allocataire peut faire valoir ses observations en exerçant devant le président du conseil général le recours administratif préalable obligatoire, à caractère suspensif, mentionné à l’article L. 262-47 du code de l’action sociale et des familles, dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires du même code.

Conseil d’Etat, 16 octobre 2013, avis n° 368174

 Le juge administratif est-il lié par l’évaluation du préjudice faite par la commission des victimes d’infraction lorsqu’il se prononce sur la responsabilité d’une collectivité sur recours subrogatoire du Fonds de garantie des victimes d’infraction ?

Non : la nature et l’étendue des réparations incombant à une collectivité publique ne dépendent pas de l’évaluation du dommage faite par l’autorité judiciaire dans un litige auquel elle n’a pas été partie, mais doivent être déterminés par le juge administratif compte tenu des règles relatives à la responsabilité des personnes morales de droit public. Ainsi le juge administratif appelé à se prononcer sur la responsabilité d’un département pour des faits de viols commis par un mineur confié à une assistance familiale dans le cadre d’une mesure d’assistance éducative, n’est pas lié par le montant des indemnités versées aux victimes par le Fonds de garantie des victimes d’infraction.

Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 17 octobre 2013, N° 1300636

Contentieux et procédures

 Les juridictions judiciaires sont-elles compétentes pour statuer sur l’action en responsabilité exercée contre un OPHLM par le gardien d’un immeuble occupant un logement appartenant à l’office pour nécessité de service ?

Non : l’usager occupant un logement appartenant à un office public d’habitations à loyer modéré, en vertu d’un arrêté portant concession pour nécessité absolue du service, n’est pas lié par un contrat de droit privé avec l’office. Dès lors, l’action engagée par le bénéficiaire d’un tel logement tendant à la réparation d’un dommage causé par un ouvrage propriété de l’office (chute de l’enfant du gardien alors qu’il circulait en vélo sur une allée située en contrebas de l’immeuble) relève de la compétence de la juridiction administrative.

Tribunal des conflits, civile, 14 octobre 2013, N° 13-03916

 Le juge judiciaire peut-il, pour statuer sur les contestations qui s’élèvent entre une commune et son fermier à l’occasion de l’exécution d’un contrat d’affermage, apprécier s’il doit écarter le contrat et renoncer à régler le litige sur le terrain contractuel ?

Oui : si la juridiction administrative, saisie par voie de question préjudicielle, est compétente pour apprécier la légalité d’un contrat d’affermage des droits de places perçus dans les halles et marchés communaux, il revient en revanche au seul juge judiciaire (qui est compétent, en vertu de l’article 136 du décret du 17 mai 1809 relatif aux octrois municipaux, pour statuer sur les contestations qui s’élèvent entre une commune et son fermier à l’occasion de son exécution) d’apprécier s’il doit écarter le contrat et renoncer à régler le litige sur le terrain contractuel, eu égard à l’illégalité constatée.

Cour de cassation, chambre civile 1, N° 12-23077

Etat civil

 Les maires peuvent-ils invoquer une "clause de conscience" pour refuser de célébrer un mariage homosexuel ?

Non : la loi du 17 mars 2013 relative au mariage pour tous ne prévoit pas une telle faculté, ce qui est jugé conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel :

"en ne permettant pas aux officiers de l’état civil de se prévaloir de leur désaccord avec les dispositions de la loi du 17 mai 2013 pour se soustraire à l’accomplissement des attributions qui leur sont confiées par la loi pour la célébration du mariage, le législateur a entendu assurer l’application de la loi relative au mariage et garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l’état civil".

En effet, compte-tenu des fonctions de l’officier de l’état civil dans la célébration du mariage, le législateur "n’a pas porté atteinte à la liberté de conscience". Ainsi "les dispositions contestées, qui ne méconnaissent ni le principe de pluralisme des courants d’idées et d’opinions, ni le principe de la libre administration des collectivités territoriales, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution".

Conseil constitutionnel, 18 octobre 2013, n° 2013-353 QPC

Fonction publique et droit social

 Un employeur peut-il prévoir qu’en cas de départ prématuré, le salarié devra rembourser les rémunérations qu’il a perçues durant sa formation ?

Non : selon l’article L. 6321-2 du code du travail, toute action de formation suivie par un salarié pour assurer son adaptation au poste de travail constitue un temps de travail effectif et donne lieu, pendant sa réalisation, au maintien par l’entreprise de la rémunération. Il en résulte que la clause de dédit-formation qui prévoit qu’en cas de départ prématuré, le salarié devra rembourser les rémunérations qu’il a perçues durant sa formation est nulle.

Cour de cassation, chambre sociale, N° 11-16032

 Une collectivité qui emploie un fonctionnaire de l’Etat à la retraite est-elle tenue à une obligation de déclaration des sommes qu’elle lui verse ?

Oui. Toute collectivité ou organisme qui rémunère à un titre quelconque un pensionné de l’Etat doit, dans le mois d’entrée en service, en faire la déclaration au ministère des finances, conformément aux dispositions statutaires relatives au cumul d’une pension de retraite et d’une rémunération publique. Le défaut d’une telle déclaration constitue une faute de la part de la collectivité susceptible d’engager sa responsabilité. Par ailleurs, le fonctionnaire qui ne peut ignorer les dispositions statutaires qui lui sont applicables en matière de cumul d’une pension et d’une rémunération publique, concourt par sa propre faute au préjudice invoqué en s’abstenant d’une quelconque déclaration. Sa faute est de nature à exonérer pour moitié la responsabilité de la commune.

Cour administrative d’appel de Marseille, 17 octobre 2013, N° 11MA01680

 Des menaces proférées en dehors du travail par un agent contre son supérieur hiérarchique peuvent-elle être sanctionnées disciplinairement ?

Oui : les menaces proférées par un agent à l’encontre de son supérieur hiérarchique (en l’espèce dans le cadre d’un différend relatif à la prise de congés payés), bien que proférées en dehors de travail, sont fautives et de nature à entraîner une sanction disciplinaire. En l’espèce, l’agent avait demandé à son directeur de "sortir dans le couloir pour s’expliquer"...

Cour administrative d’appel de Marseille, 17 octobre 2013, n°12MA00684

Voirie

 La chute d’un cycliste provoquée par un poteau implanté au milieu d’une piste cyclable pour en interdire l’accès aux voitures peut-elle être imputée à la commune ?

Pas si le poteau est suffisamment visible pour un usager normalement attentif. Un poteau placé au centre d’une piste cyclable, et situé à 20 mètres d’un passage souterrain pour en interdire l’accès aux voitures, ne constitue pas un danger excédant ceux contre lesquels les usagers doivent normalement se prémunir. Ce d’autant qu’en l’espèce, l’accident a eu lieu un jour de forte affluence, ce qui aurait dû inciter la victime à faire preuve d’une vigilance accrue et à adapter sa vitesse.

Tribunal administratif de Grenoble, 17 octobre 2013, N° 1001030

Urbanisme

 Les droits conférés pendant dix-huit mois par les indications portées sur un certificat d’urbanisme sont-ils réservés au titulaire de ce dernier ?

Non : ils bénéficient à toute personne qui sollicite la délivrance d’une autorisation d’urbanisme en vue de la réalisation d’un projet sur le terrain en cause. Ainsi une SCI peut valablement invoquer à son profit les certificats d’urbanisme qu’un maire a délivré à des propriétaires d’une partie du terrain d’assiette du projet litigieux, indiquant que leurs tènements respectifs étaient classés en zone AUb du plan local d’urbanisme, ouverte à l’urbanisation suivant les modalités définies par l’orientation d’aménagement n°5. La circonstance que ces certificats d’urbanisme sont postérieurs au dépôt de la demande de permis de construire de la SCI ne saurait faire obstacle à la mise en œuvre des dispositions précitées, pour l’application desquelles il importe seulement que ces certificats d’urbanisme soient demeurés en cours de validité pendant l’instruction de ladite demande.

Cour administrative d’appel de Lyon, 15 octobre 2013, N° 13LY01052

[1Photo : © Treenabeena