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La jurisprudence de la semaine du 7 au 11 mars 2011

Associations / Vidéosurveillance / Couvre-feu des mineurs / Evacuation forcée des occupations illicites de terrains / Pouvoirs des policiers municipaux / Voirie

(dernière mise à jour le 10/05/2011)

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Associations

 Les juridictions administratives sont-elles compétentes pour statuer sur la responsabilité d’une collectivité à la suite du soutien financier abusif accordée à une association ?

Oui si l’association exerce une mission de service public administratif. Tel est jugé le cas en l’espèce dès lors que :

 l’association a signé un contrat d’objectifs avec la commune par lequel elle s’était engagée à promouvoir et développer la pratique du handball auprès des jeunes de la commune, à dispenser une formation dans cette discipline allant de l’initiation à la compétition au plus haut niveau, à participer et représenter la commune au championnat de France national 1 de handball avec son équipe première masculine ;

 de telles actions étaient présentées comme d’intérêt communal, prises en faveur de la population de la commune, et comme complémentaires aux activités de celles-ci ;

 le siège social de l’association était un local mis gracieusement à sa disposition par la commune ;

 cette association bénéficiait de subventions de la commune depuis plusieurs années, la part desdites subventions dans ses ressources s’élevant, selon les exercices, entre 80 % et 90 %.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 10 mars 2011, N° 09MA00119


 Une commune peut-elle être considérée comme dirigeant de fait d’une association ?

Oui. Tel est ainsi juge le cas d’une commune qui a subventionné un club de handball dès lors que :

 l’essentiel des ressources de l’association provenait des subventions de la commune ;

 l’association exerçait une mission de service public administratif ;

 le président de l’association était un employé communal ;

 l’adjoint au sport de la commune s’est immiscé dans la gestion de l’association.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 10 mars 2011, N° 09MA00119


 Une commune peut-elle engager sa responsabilité pour avoir subventionné une association fortement déficitaire ?

Oui. Constitue ainsi un soutien financier abusif de nature à engager la responsabilité de la collectivité, le fait pour une commune de continuer à subventionner une association dont l’activité est gravement déficitaire et de contribuer, ainsi, à masquer l’état de cessation de paiement de l’association.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 10 mars 2011, N° 09MA00119


Sécurité

 Est-il possible de déléguer à des personnes privées l’exploitation et le visionnage de la vidéosurveillance de la voie publique

Non. Il s’agirait d’une délégation à une personne privée des compétences de police administrative générale inhérentes à l’exercice de la « force publique » nécessaire à la garantie des droits. Sont ainsi déclarées contraires à la Constitution les dispositions des b et c du 2° de l’article 18 de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 NOR : CSCL1107169S


 Le préfet peut-il prendre un arrêté imposant un couvre-feu aux mineurs ?

Oui : l’article 43, dans son paragraphe I, de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure ouvre la possibilité au préfet de prendre une décision restreignant la liberté d’aller et de venir sur la voie publique des mineurs de treize ans entre vingt-trois heures et six heures, à la double condition que cette mesure soit prise dans l’intérêt des mineurs et dans le but de prévenir un « risque manifeste pour leur santé, leur sécurité, leur éducation ou leur moralité ».

En outre une telle mesure peut également être prononcée , au titre des sanctions éducatives, par le tribunal pour enfants [2].

En revanche le Conseil constitutionnel censure le III paragraphe qui punissait d’amende les parents qui ne s’étaient pas assurés du respect par leur enfant d’un couvre-feu préfectoral ou au titre d’une sanction éducative : si en matière contraventionnelle une présomption de culpabilité peut être instituée c’est à la condition que la preuve contraire puisse être rapportée, ce qui interdit les présomptions irréfragables de culpabilité.

Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 NOR : CSCL1107169S


 Le préfet peut-il ordonner, à toute époque de l’année, l’évacuation forcée de personnes qui occupent illicitement des terrains appartenant à une personne publique ou privée ?

Non : ce pouvoir qui était prévu par l’article 90 de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure est jugé contraire à la Constitution :

"ces dispositions permettent de procéder dans l’urgence, à toute époque de l’année, à l’évacuation, sans considération de la situation personnelle ou familiale, de personnes défavorisées et ne disposant pas d’un logement décent" ;

"la faculté donnée à ces personnes de saisir le tribunal administratif d’un recours suspensif ne saurait, en l’espèce, constituer une garantie suffisante pour assurer une conciliation qui ne serait pas manifestement déséquilibrée entre la nécessité de sauvegarder l’ordre public et les droits et libertés constitutionnellement garantis".

Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 NOR : CSCL1107169S


 Les agents de police municipale peuvent-il procéder à des contrôles d’identité ?

Non. Le Conseil constitutionnel censure l’article 92 de la loi du 14 mars 2011 qui prévoyait une telle possibilité :

"en confiant également ce pouvoir aux agents de police municipale, qui, relevant des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire, l’article 92 méconnaît l’article 66 de la Constitution".

Pour la même raison, le Conseil constitutionnel censure l’article 91 de la loi sur la sécurité intérieure qui accordait la qualité d’agent de police judiciaire aux « membres du cadre d’emplois des directeurs de police municipale assurant la direction fonctionnelle et opérationnelle des services de la police municipale lorsque la convention prévue à l’article L. 2212-6 du code général des collectivités territoriales en dispose ainsi ».

Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 NOR : CSCL1107169S


Voirie

 Un département doit-il prendre immédiatement, après un éboulement, des mesures de restriction de la circulation dans l’attente d’éléments sur les causes des chutes de pierre permettant d’évaluer d’éventuels risques de survenance d’un nouvel éboulement ?

Oui : manque à son obligation d’entretien normal de la voie qui lui incombe, le département qui s’abstient, postérieurement à un premier éboulement survenu 3H15 avant l’accident, de rechercher les causes de la chute des pierres et de prendre, dans l’attente d’éléments sur ces dernières permettant d’évaluer d’éventuels risques de survenance d’un nouvel éboulement, les mesures de restriction de la circulation sur la voie.

Conseil d’État, 7 mars 2011, N° 328591

[1Photo : © Treenabeena

[2nouvel article 15-1 de l’ordonnance du 2 février 1945 dans sa rédaction issue de l’article 43 II de la loi du 14 mars 2011