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La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - février 2010

Tout savoir sur le risque pénal des élus et des fonctionnaires

Retrouvez les décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire relatives à la responsabilité pénale des élus locaux et des fonctionnaires territoriaux.

(dernière mise à jour le 04/07/2016)

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 Cour d’appel de Bordeaux, 2 février 2010

Condamnation d’un dirigeant d’association pour abus de confiance à dix mois d’emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d’amende, et à deux ans d’interdiction de gérer une association. Il lui est notamment reproché d’avoir prêté 250 000 euros à une société alors qu’il savait que cette société était en grande difficulté financière et qu’elle ne serait pas en mesure de rembourser l’association.


 Tribunal correctionnel de Versailles, 8 février 2010

Condamnation de plusieurs chef d’entreprise et cadres de collectivités locales (conseil général et communes) dans une affaire de corruption. Il est reproché aux fonctionnaires d’avoir profité de voyages à l’étranger et de sommes d’argent et d’avoir fourni, en contrepartie, des informations privilégiées à des candidats à des marchés publics entre 1999 et 2002. Le Conseil général obtient plus de 350 000 de dommages intérêts. Un syndicat d’agglomération nouvelle, également partie civile, se voit allouer 1250 000 euros de dommages-intérêts.


  Tribunal correctionnel de Grenoble, 09 février 2010

Relaxe générale au profit de trois adjoints, membres de la commission d’appel d’offres (CAO) et de deux fonctionnaires territoriaux (directeur des services techniques, et responsable du service achats) d’une commune de 30 000 habitants poursuivis des chefs de faux en écriture et de favoritisme. Il leur était notamment reproché de n’avoir rédigé qu’un seul PV pour les réunions de la CAO et non deux comme ils y étaient tenus (l’un pour la réunion d’ouverture, l’autre pour la réunion d’attribution) et d’avoir fait rectifier, avec la complicité des entreprises attributaires, les actes d’engagement. Le tribunal motive la relaxe sur l’absence d’élément intentionnel, les prévenus n’ayant pas eu conscience de commettre une infraction en rectifiant des erreurs purement matérielles, ce d’autant que les entreprises attributaires étaient bien les mieux disantes.


 Tribunal correctionnel de Strasbourg, 10 février 2010, n°CSN/FR100645

Condamnation de 6 policiers municipaux (commune de 12 000 habitants) pour corruption passive et détournement de fonds publics. C’est le nouveau maire, élu aux élections de mars 2008, qui a porté plainte. A l’occasion de la redéfinition des missions de la police municipale, un système de malversations dans l’encaissement des droits de place dans les marchés municipaux a été mis à jour. Les sommes prélevées correspondait à l’équivalent d’un 14ème mois. Les commerçants ne payaient que la moitié du prix qui aurait dû être facturé. En contrepartie, certains commerçants ne réclamaient aucune quittance ou donnaient des "pourboires".

Une escroquerie aux heures supplémentaires est également reproché aux prévenus : tous les samedis un policier municipal quittait son service à 12 heures alors que son relevé indiquait qu’il avait travaillé jusqu’à 14 heure.

Le chef du service est condamné 2 ans de prison avec sursis, 10 000 euros d’amende et interdiction définitive d’exercer un emploi dans la fonction publique. Ses subordonnés écopent pour leur part de peines de prison avec sursis et d’interdictions d’exercer une fonction dans la police municipale pour des périodes de 6 mois à un an. Les 6 co-prévenus sont en outre condamnés à verser près 70 000 euros de dommages-intérêts à la ville qui s’est constituée partie civile.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 10 février 2010, N° 09-83563

Condamnation pour abus de confiance du dirigeant salarié d’une association à deux ans d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve et cinq ans d’interdiction de gérer. Il lui est notamment reproché de s’être octroyé de substantielles augmentations de salaire.


 Cour d’appel de Paris, chambre 5-12, 10 février 2010

Condamnation du président d’une association pour abus de confiance à 15 mois d’emprisonnement avec sursis et 5000 euros d’amende. Il lui est reproché d’avoir détourné des aides obtenues notamment de l’AGEFIPH pour l’emploi de personnes handicapées. Les deux salariés ainsi recrutés étaient en fait occupés, à plus de 95% de leur temps de travail, à l’assister dans ses contentieux pénaux, civils ou commerciaux personnels.


 Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Toulouse, 11 février 2010

La Cour juge irrecevable l’appel de l’ancien président d’un syndicat intercommunal qui, au nom de la personne morale, avait porté plainte avec constitution de partie civile du chef de faux en écriture publique contre son prédécesseur. Le syndicat reprochait à l’ancien président d’avoir procédé au rattachement fictif de 21 délibérations. Le tout se soldant par une ardoise de 1,55 millions à la charge des communes membres. Le nouveau président du syndicat, qui avait déposé plainte au nom de la personne morale, a voulu interjeter appel de l’ordonnance de non lieu mais n’a pas été suivi par les délégués. Du coup, il a démissionné de son poste et a fait appel en son nom personnel. La chambre de l’instruction déclare irrecevable le recours de l’élu dès lors qu’il n’était plus président de ce syndicat, lorsqu’il a relevé appel, et qu’il ne s’était pas constitué partie civile à titre personnel.


 Cour d’appel de Versailles, 15 février 2010, n°08/03657

Condamnation d’un sapeur-pompier pour usurpation de titres et de qualité (article 433-17 du code pénal). Après avoir été verbalisé pour infractions au stationnement, il s’est présenté au commissariat pour solliciter des indulgences en mettant en avant son grade de lieutenant dans un centre d’incendie et de secours. Après vérifications, il s’est avéré qu’il avait un grade moins élevé et qu’il avait menti sur son lieu d’affectation. En répression il est condamné à 300 euros d’amende.


 Cour de cassation, chambre criminelle, 16 février 2010, N° 09-81064

La Cour de cassation annule ainsi la relaxe d’un dirigeant associatif poursuivi pour diffamation par un élu qui était visé dans un message laissé par un internaute sur un forum. En matière de diffamation sur internet il est possible de poursuivre le responsable du site même si les messages sont publiés sans modération a priori. En prenant l’initiative de créer un site internet et en laissant la liberté aux internautes d’échanger des opinions, le responsable d’un site internet peut être pénalement poursuivi même s’il n’a pas eu connaissance du message incriminé.


Cour d’appel de Montpellier, 18 février 2010

Condamnation d’un maire (commune de 218 habitants), par ailleurs gérant d’une SCI, pour infraction au plan d’occupation des sols et exécution de travaux sans permis de construire. Il lui est reproché la construction et la mise en location de 27 logements sans permis de construire. Il est condamné à une une remise en état des lieux dans un délai de deux ans avec astreinte de 50 euros par jour de retard.


 Cour d’appel de Versailles, 19 février 2010, N°08/011077

Condamnation de deux fonctionnaires territoriaux d’un conseil général pour favoritisme, soustraction de biens publics et faux en écriture.
Il leur est reproché d’avoir :

 confié des travaux à une entreprise sous le couvert d’autres entités pour éviter d’engager les procédures de mise en concurrence.

 détourné 64 000 euros en participant à un montant financier (fausses factures) permettant de faire payer par le Conseil général les salariés d’une association mis à disposition du tribunal de grande instance (!) ;

 d’avoir attesté faussement "service fait" sur des factures présentées par une association.

Le premier fonctionnaire (DGA adjoint chargé de la solidarité du conseil général) est condamné à 2 ans d’emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d’amende et à une interdiction définitive d’exercer toute fonction ou emploi public ; le second (directeur de l’action sociale et de l’insertion), moins impliqué, écope de 8 mois d’emprisonnement avec sursis et de 4000 euros d’amende.


 Tribunal correctionnel de Fontainebleau, 22 février 2010, n°211-2010)

Condamnation pour favoritisme à 4 mois de prison avec sursis et 4000 euros d’amende d’un directeur des services techniques (DST) d’un office public d’habitation à loyer modéré (OPHLM). Il lui est reproché d’avoir favorisé une entreprise dans l’attribution d’un marché public de construction-rénovation de résidences :

 en sollicitant une entreprise pour qu’elle dépose sa candidature ;

 en appuyant la candidature de cette même entreprise devant la commission d’appel d’offres (CAO) "qui avait toute confiance en lui compte-tenu de ses connaissances techniques" alors que le DST savait que cette société n’avait pas les qualifications requises pour réaliser ces chantiers.

 en acceptant la substitution de cette entreprise en cours de procédure par une autre qui n’avait pas déposé d’offre initialement.

Le DST est en revanche relaxé du chef de corruption passive et de trafic d’influence. Il lui était reproché d’avoir accepté de nombreuses invitations au restaurant de la part du gérant de l’entreprise retenue. Le tribunal relève qu’aucun accord frauduleux n’a pu être démontré, le gérant expliquant qu’il avait l’habitude de procéder ainsi afin d’être réglé plus rapidement et plus régulièrement des travaux effectués par son entreprise dans le cadre des marchés qui lui avaient été confiés.


 Cour de cassation chambre criminelle 24 février 2010 N° de pourvoi : 09-83988

Condamnation pour favoritisme d’un conseiller général à la suite d’irrégularités dans le cadre de l’attribution d’un marché public lancé par le SDIS pour l’attribution d’un marché de maîtrise d’œuvre pour la construction d’une nouvelle caserne des pompiers. Il lui est reproché, en qualité de membre de la commission d’appel d’offres du SDIS, d’avoir fondé son choix sur des critères subjectifs et occultes pour favoriser des cabinets d’architecte avec lesquels il entretenait des relations personnelles privilégiées. Les faits ont été dénoncés près de 4 ans après l’attribution par un architecte qui s’était associé à la manœuvre (il est d’ailleurs condamné pour recel à 4000 euros d’amende). L’élu est condamné à 5000 euros d’amende. La Cour de cassation refuse de considérer que l’action publique est prescrite : s’agissant de faits occultes, la prescription de trois ans de l’action publique (de trois ans s’agissant d’un délit) ne commence à courir qu’à partir du jour où l’exercice de poursuites a été rendu possible soit à compter de la date de la dénonciation.


Tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne, 24 février 2010

Condamnation d’un maire d’une commune de 130 habitants pour homicide involontaire. Egalement gérant d’une SARL, il avait demandé à ses salariés de venir poser une banderole pour le compte de la commune à l’aide d’une nacelle. Au cours des opérations, l’un des ouvriers s’est tué en s’électrocutant avec une ligne à haute tension de 20 000 volts située à proximité. Il est reproché à l’élu et à sa société de ne pas avoir respecté les règles relatives aux travaux à proximité des lignes à haute tension telles que prévues à l’article 17 du décret du 14 novembre 1988 et d’avoir confié les travaux à un ouvrier qui n’était pas formé et habilité à l’utilisation d’une nacelle. En répression l’élu est condamné à 4 mois d’emprisonnement avec suris et 3000 euros d’amende.


 Cour d’appel de Strasbourg, chambre de l’instruction, 25 février 2010

La Cour valide la mise en examen d’une ville poursuivie pour blessures involontaires après qu’une jeune fille ait chuté d’un bunker située dans un parc municipal. Il lui est reproché :

 « l’absence de sécurisation des abords immédiats du bunker, situé dans un parc ouvert au public, accessible de jour comme de nuit, et notamment l’absence de mise en place d’une signalisation pérenne et d’un dispositif de protection contre les risques de chute ou d’accident » ;

 sa connaissance de la dangerosité du site, des devis de sécurisation ayant été sollicités.



Avertissements

Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les élus et les fonctionnaires condamnés bénéficient donc toujours de la présomption d’innocence.

Par respect pour ce principe, l’Observatoire SMACL des risques de la vie territoriale a volontairement occulté les noms des prévenus et des parties civiles.

Vous pouvez nous aider à consolider notre base d’observation en nous transmettant (observatoire@smacl.fr) les références de décision de justice ou d’article de presse relatives à des mises en cause pénales d’élus locaux, de fonctionnaires territoriaux ou de collectivités territoriales.

[1Photo : © Ene