Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

École exposée à la pollution de l’air : coresponsabilité des collectivités et de l’Etat ?

Tribunal administratif de Lyon, 24 février 2023 : n°2007414

Ecole exposée à la pollution : les parents d’élèves peuvent-ils demander la réparation de leur préjudice d’anxiété et des troubles dans les conditions d’existence que subiraient les enfants en raison d’une carence fautive des pouvoirs publics ?

Non tranche ici le tribunal car le lien de causalité entre la carence fautive et les préjudices évoqués n’est pas établi.
Certes, le juge constate le dépassement des valeurs limites de pollution atmosphérique et estime que l’État a commis une carence fautive en n’établissant pas un plan relatif à la qualité de l’air permettant que ce dépassement dans l’ensemble de l’agglomération lyonnaise, et plus spécifiquement dans le secteur de l’école, soit le plus court possible.
Cependant, les troubles dans les conditions d’existence subis par les élèves ne résultent pas de la pollution elle-même (les requérants ne se prévalent pas directement de l’atteinte à l’état de santé des enfants), mais des mesures prises par la commune pour y remédier (aménagement de l’utilisation des locaux, des cours extérieures de l’école). Quant au préjudice d’anxiété des parents d’élèves sa réalité n’est pas démontrée : compte tenu des mesures prises par la commune les élèves ne sont plus directement exposés à la pollution au dioxyde de carbone dans des proportions qui excéderaient les valeurs règlementaires. Le juge estime qu"’il n’est pas établi que les enfants, qui sont par ailleurs réputés vivre dans le quartier entourant l’école (…), seraient exposés de manière particulière à des risques graves pour leur santé en raison de leur fréquentation de cette école ».
Le tribunal juge par ailleurs que la commune n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité en s’abstenant de prendre les mesures nécessaires pour réduire la pollution atmosphérique au droit de l’école. Plusieurs actions ont été mises en place par la commune en sa qualité de propriétaire des locaux de l’école et depuis 2011 un suivi de la pollution au sein de l’établissement est assuré.
Enfin, la responsabilité de la métropole est également écartée. La collectivité a pris des mesures pertinentes de nature à réduire significativement la pollution à l’échelle du territoire ainsi qu’au niveau de l’école (plan climat-air-énergie, zone à faible émission, développement des modes de déplacement alternatifs à l’automobile).

En mars 2020, des parents d’élèves et l’association Greenpeace demandent en vain au maire de Lyon, au président de la métropole de Lyon, au préfet du Rhône et au Ministre de la transition écologique l’indemnisation des préjudices résultant de l’exposition de leurs enfants à la pollution de l’air au sein d’une école primaire située dans le 1er arrondissement de la commune ainsi que l’édiction de mesures nécessaires à la réduction de cette pollution.

Les intéressés soutiennent notamment que :
 la pollution résulte du trafic automobile du tunnel de la Croix-Rousse ;
 les mesures prises par les autorités locales et nationales sont intervenues tardivement et sont insuffisantes pour remédier à cette pollution.

Estimant fautive la carence de ces autorités publiques dans la lutte contre la pollution, les requérants saisissent le tribunal administratif de Lyon d’une requête tendant à leur condamnation à réparer leur préjudice personnel (préjudice d’anxiété) et les troubles dans les conditions d’existence qu’auraient subis leurs enfants scolarisés dans cette école entre les années 2018 et 2020. Les sommes sont évaluées entre 20 000 et 40 000 euros. L’association Greenpeace réclame une réparation au titre du préjudice moral.

Les requérants demandent au juge d’enjoindre aux autorités publiques compétentes de restreindre la circulation automobile dans le tunnel afin d’améliorer la qualité de l’air.

Le juge lyonnais constate le dépassement des valeurs limites de pollution atmosphérique, mais il rejette la responsabilité de la métropole, celle de la commune.

En revanche, il estime que l’État a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en s’abstenant d’élaborer un plan relatif à la qualité de l’air permettant que le dépassement des valeurs limites de pollution dans l’ensemble de l’agglomération lyonnaise, et plus spécifiquement dans le secteur de l’école, soit le plus court possible. Toutefois, l’ensemble des conclusions indemnitaires est écarté car les préjudices sont sans lien avec la faute commise par l’État. Les conclusions à fin d’injonction sont également rejetées.

Pollution de l’air : quelles sont les normes ?


Au niveau national, les normes de qualité de l’air et valeurs limites applicables sont fixées par l’article R.221-1 du Code de l’environnement  [1] :

«  1. Oxydes d’azote : / 1.1. Dioxyde d’azote : / () d) Valeur limite horaire pour la protection de la santé humaine : 200 µg/ m ³ en moyenne horaire à ne pas dépasser plus de dix-huit fois par année civile () ; d) Valeur limite horaire pour la protection de la santé humaine : 200 µg/ m ³ en moyenne horaire à ne pas dépasser plus de dix-huit fois par année civile () ; e) Valeur limite annuelle pour la protection de la santé humaine : 40 µg/ m ³ en moyenne annuelle civile ().
2. Particules " PM10 " et " PM2, 5 " : 2.1. Particules " PM10 " : () d) Valeurs limites pour la protection de la santé : 50 µg/ m ³ en moyenne journalière à ne pas dépasser plus de trente-cinq fois par année civile ; 40 µg/ m ³ en moyenne annuelle civile. / 2.2. Particules " PM2, 5 " : () e) Valeur limite : 25 µg/ m ³ en moyenne annuelle civile () ". 
 »



Une pollution de l’air avérée à l’école primaire

🔶 Dépassement des valeurs limites annuelle et horaire de pollution au dioxyde d’azote (NO2)

S’agissant de l’école concernée par la pollution de l’air, les études et relevés effectués par l’agence ATMO Auvergne- Rhône-Alpes (organisme d’intérêt général chargé de la surveillance de la qualité de l’air dans la Région Rhône-Alpes) ont mis en évidence que :
 la valeur limite annuelle de pollution au dioxyde d’azote fixée à 40 µg/ m ³ a été dépassée dans plusieurs cours extérieures de l’école en 2015 et 2017 ;
 ce dépassement persiste, depuis 2019 dans la cour Nord de l’école, située à proximité immédiate de la sortie du tunnel.

De plus, selon ces mêmes études, la valeur limite horaire, fixée à 200 µg/m³, a également été dépassée sur ce point de contrôle à vingt-huit reprises au cours de l’année 2018 et à quarante-quatre reprises au cours de l’année 2019.

En revanche, la pollution à l’intérieur des locaux de l’établissement n’a pas excédé ces seuils.

🔶 Absence de dépassement des valeurs limites de la pollution aux particules fines

Les études n’ont pas révélé que la pollution aux particules fines PM10 et PM2,5 aurait excédé les valeurs règlementaires fixées par le Code de l’environnement .

Le tribunal précise que les valeurs recommandées par l’Organisation mondiale de la santé sont dépourvues de caractère contraignant et ne peuvent être utilement invoquées par les requérants.

Carence fautive de l’Etat

Le juge rappelle que la directive européenne de 2008 ainsi que les dispositions du Code de l’environnement imposent aux autorités nationales l’obligation de mettre en place des plans d’action dans les zones concernées par les dépassements des valeurs limites des niveaux de polluants dans l’air ambiant.

Selon le Code de l’environnement, l’élaboration par le préfet d’un plan de protection de l’atmosphère (PPA) est obligatoire dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants (ainsi que dans dans toutes les zones où les valeurs règlementaires limites sont dépassées ou risquent de l’être). Le PPA fixe des objectifs et des mesures préventives et correctives en matière de qualité de l’air.
Ces mesures doivent permettre que « la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible » (articles L.222-4, L.222-5 du Code de l’environnement).

« Les personnes physiques ou morales directement concernées par le dépassement des valeurs limites fixées par le code de l’environnement doivent pouvoir obtenir des autorités nationales l’établissement d’un plan relatif à la qualité de l’air (…) lorsque n’est pas assuré le respect des exigences (…) ».

Pour l’agglomération lyonnaise, le tribunal reconnaît une faute de l’État de nature à engager sa responsabilité.

A l’appui de son raisonnement, le juge lyonnais cite plusieurs décisions du Conseil d’État :

 Tout d’abord deux décisions en 2020 et 2021 par lesquelles la Haute juridiction a jugé que la pollution au dioxyde d’azote au sein de l’agglomération lyonnaise a dépassé la valeur limite fixée par le Code de l’environnement au cours des années 2018, 2019.

Or, ce constat corrobore celui observé au niveau de la cour Nord de l’école (l’école est située dans une zone particulièrement marquée par la pollution au NO2).

 Ensuite une décision de 2017 par laquelle la Haute juridiction a jugé insuffisantes les mesures figurant dans le plan de protection de l’atmosphère élaboré en 2014 par le préfet pour l’agglomération lyonnaise.

Et le tribunal de Lyon confirme ici le caractère insuffisant des mesures compte tenu des relevés réalisés pour l’année 2019 révélant le dépassement des valeurs limites. [2]

« En s’abstenant d’élaborer un plan relatif à la qualité de l’air permettant que le dépassement des valeurs limites de pollution dans l’ensemble de l’agglomération lyonnaise, et plus spécifiquement sur le secteur de l’école (...) soit la plus courte possible, l’Etat a méconnu les dispositions précitées et ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ».

Focus sur la procédure contentieuse engagée contre l’État depuis quelques années


Saisi initialement par une association de défense de l’environnement (Les Amis de la Terre France) le Conseil d’État avait enjoint à l’État, en 2017, d’élaborer et de mettre en œuvre dans plusieurs zones de France (dont Rhône-Alpes) des plans relatifs à la qualité de l’air permettant de ramener, dans un délai le plus court possible, les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par la réglementation (CE, 12 juillet 2017 : n°394254).

En 2020, constatant la carence de l’État dans l’élaboration les mesures permettant d’assurer l’exécution de la décision alors que les valeurs limites étaient encore dépassées dans plusieurs grandes agglomérations, le Conseil d’État avait ordonné à l’État d’agir pour garantir la qualité de l’air sous une astreinte de 10 millions d’euros par semestre (CE, Ass., 10 juillet 2020 : n°428409).

Et, l’État est condamné à payer cette astreinte de 10 millions euros pour le premier semestre de l’année 2021 par une décision du 4 août 2021 (CE, 4 août 2021 : n°428409).

Puis, en 2022, le Conseil d’État liquide deux nouvelles astreintes pour le second semestre 2021 et le premier semestre 2022, soit 20 millions d’euros (CE, 17 octobre 2022 : n°428409). 
« Après avoir ordonné à l’Etat, depuis 2017, de faire respecter les normes européennes, reprises en droit français, de qualité de l’air, le Conseil d’État le condamne aujourd’hui à payer deux nouvelles astreintes de 10 millions d’euros pour les deux périodes allant de juillet 2021 à janvier 2022 et de janvier à juillet 2022. Si des améliorations dans la durée ont été constatées, les seuils limites de pollution au dioxyde d’azote – qui doivent être respectés depuis 2010 – restent dépassés dans plusieurs zones en France, notamment dans les agglomérations de Paris, Lyon et Marseille. A ce jour, les mesures prises par l’État ne garantissent pas que la qualité de l’air s’améliore de telle sorte que les seuils limites de pollution soient respectés dans les délais les plus courts possibles. » Communiqué du Conseil d’Etat.

Récemment la ville de Grenoble a déposé un recours devant le tribunal administratif contre l’État pour obtenir l’annulation et la réécriture du troisième plan de protection de l’atmosphère.

Pas de manquements de la Métropole dans ses attributions

Certes, la métropole de Lyon est compétente en matière de lutte contre la pollution de l’air à travers l’adoption d’un plan climat-air-énergie (article L.229-26 du Code de l’environnement) et d’un plan mobilité (article L.3641-1 du CGCT).

En revanche, il n’appartient pas à la métropole d’assumer les obligations propres de l’État résultant de la Directive de 2008 et des dispositions du Code de l’environnement relève le juge.

« Les requérants ne peuvent utilement invoquer les condamnations prononcées à l’encontre de l’Etat pour soutenir que la métropole de Lyon aurait elle-même manqué à ses propres obligations, du seul fait du constat du dépassement des seuils de pollution fixés par l’article R.221-1 du Code de l’environnement ».

Les mesures prises par la métropole sont pertinentes nonobstant la circonstance qu’elles aient un caractère progressif.

En effet, outre le plan climat-air-énergie la métropole a mis en place plusieurs mesures :
 restrictions imposées à la circulation des véhicules les plus polluants via la mise en place de la zone à faible émission sur une partie du territoire métropolitain ;
 abaissement de la vitesse maximale de circulation en centre-ville et sur de nombreux axes, développement des modes de déplacement alternatifs à l’automobile ;
 aménagement de nombreux kilomètres de pistes cyclable, investissement dans les transports en commun.

Ces mesures sont de nature à contribuer à réduire significativement la pollution à l’échelle du territoire ainsi qu’au niveau de l’école.

Aucune disposition légale ou réglementaire n’a été méconnue, la collectivité n’a commis aucun manquement dans l’exercice de ses attributions.

Pour les requérants, le dommage peut cesser par des mesures visant à la réaffectation du tunnel routier lequel relève de la compétence de la métropole et du préfet (le tunnel est en effet classé comme route à grande circulation).

Mais, le tribunal estime que la métropole ainsi que l’État n’ont commis aucune faute en s’abstenant de prendre des mesures en vue d’une réaffectation de la circulation dans le tunnel.

Mise en danger délibérée de la vie d’autrui ?


Dans un arrêt du 25 juin 1996 (Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 25 juin 1996, N° 95-86.205) la Cour de cassation a confirmé un arrêt de refus d’informer dans le cadre d’une plainte avec constitution de partie civile dirigée contre le maire et le préfet de police de Paris. La plaignante leur reprochait de s’être abstenus de prendre les mesures nécessaires pour pallier les effets de la pollution atmosphérique sur la santé publique, tels qu’ils avaient été constatés par l’Observatoire régional de santé d’Ile-de-France dans un rapport rendu en novembre 1994. Elle soutenait notamment que les mesures annoncées par le préfet de police de Paris, dans le cadre du contrôle des émissions polluantes dans l’atmosphère, seraient nettement

insuffisantes et que les autorités administratives auraient exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente, par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. La Cour de cassation approuve la chambre d’accusation d’avoir relevé « que l’article L. 131-2. 6° du Code des communes [3], alors en vigueur, qui confie au maire de façon générale le soin de prévenir et faire cesser tous les événements survenant sur le territoire de sa commune et de nature à compromettre la sécurité des personnes, ne crée pas à sa charge d’obligation particulière de sécurité au sens de l’article 223-1 du Code pénal, en raison du caractère général de ses prescriptions ». En effet pour être caractérisé le délit de mise en danger délibérée de la vie d’autrui suppose la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Une défaillance du maire, à la supposer établie, dans l’exercice de son pouvoir de police générale ne peut donc servir de fondement à des poursuites pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui.

Dans arrêt plus récent (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 8 septembre 2020, N°19-84.995), la Cour de cassation a confirmé l’irrecevabilité de la constitution de partie de civile d’une association pour mise en danger d’autrui en raison de la pollution atmosphérique : la plainte avec constitution de partie civile est jugée irrecevable en l’absence d’agrément de l’association plaignante (ladite association n’était pas recevable sur le fondement de l’article L. 142-2 du code de l’environnement à se constituer partie civile, le renouvellement d’agrément lui ayant été refusé) et dès lors que celle-ci n’était pas susceptible de subir un préjudice propre, directement causé par le délit de mise en danger d’autrui.
L’association visait principalement les carences des pouvoirs publics dans les actions susceptibles d’être menées contre l’exposition des populations aux particules fines et dioxyde d’azote (NO2), suite à un sévère épisode de pollution dans plusieurs villes de France.

Pas de faute de la commune

Plusieurs actions ont été mises en place par la commune en sa qualité de propriétaire des locaux de l’école :
 depuis 2011 un suivi de la pollution au sein de l’établissement est assuré,
 depuis 2014, plusieurs mesures ont été prises afin de supprimer l’exposition des élèves à certains polluants et notamment au dioxyde d’azote (fermeture de la cour Nord, fermeture des salles de classe de la façade Nord, protocole de nettoyage conforme aux préconisations de l’agence Atmo, comportant un nettoyage humide destiné à éviter la dispersion des particules fines) ;
 enfin, une centrale de traitement d’air a été installée dans le gymnase en 2016.

Ces différentes mesures ont permis de supprimer l’exposition directe des élèves à la pollution au dioxyde d’azote dans des proportions excédant les valeurs règlementaires.

De plus, ni le Code de l’environnement ni le Code général des collectivités territoriales ne donne compétence à la commune pour lutter contre la pollution de l’air sur le territoire communal ou pour aménager la circulation dans le tunnel [4].

La commune n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité en s’abstenant de prendre les mesures nécessaires pour réduire la pollution atmosphérique au droit de l’école.

Les collectivités dont les communes et leurs établissements publics ont un rôle à jouer et des obligations


« Chaque collectivité (région, département, groupement intercommunal, commune) contribue, en fonction de ses compétences légales, à améliorer la qualité de l’air. Compte tenu de leurs compétences, notamment en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme, de mobilité, de voirie et de circulation, les collectivités territoriales et leur groupement sont des acteurs clés de la réduction de l’exposition des populations aux polluants atmosphériques. L’implication des élus locaux est essentielle pour la mise en œuvre des outils locaux tels que les plans climat-air énergie territoriaux (PCAET) et les zones à faibles émissions mobilité, ou encore la contribution aux plans de protection de l’atmosphère (PPA) ».



Ministère de la transition écologique « Agir pour la qualité de l’air : quel rôle pour des collectivités ? », juillet 2021 (PDF)

Rejet des conclusions indemnitaires : absence de lien de causalité avec les troubles dans les conditions d’existence et le préjudice d’anxiété

Le juge rejette l’indemnisation des troubles dans les conditions d’existence que subiraient les élèves en raison des mesures prises par la commune (aménagement de l’utilisation des locaux et des cours extérieurs). Un tel préjudice est sans lien direct avec la faute commise par l’État. Aucun élément ne permet d’établir que les élèves seraient empêchés de poursuivre une scolarité normale en raison de ces mesures.

Les requérants ne se prévalaient pas directement de l’atteinte à l’état de santé des enfants scolarisés.

De même, le préjudice d’anxiété subi par les parents d’élèves est écarté : les élèves ne sont plus directement exposés à la pollution au dioxyde d’azote dans des proportions excédant les valeurs réglementaires.

« Ainsi, il n’est pas établi que les enfants, qui sont par ailleurs réputés vivre dans le quartier entourant l’école (...), seraient exposés de manière particulière à des risques graves pour leur santé en raison de leur fréquentation de cette école ».

Le préjudice moral évoqué par l’association est également rejeté. La faute de l’État n’a pas porté une atteinte à sa crédibilité ou à sa réputation.

Le lien de causalité entre la carence fautive de l’État et des symptômes médicaux tels que sinusite chronique, troubles bronchiques, laryngites a été rejeté par la cour administrative d’appel de Lyon : la cour a estimé dans un arrêt du 15 février 2023 que la faute de l’État tenant à l’insuffisance des mesures adoptées pour limiter les périodes de dépassement des valeurs limites de concentration de polluants dans l’atmosphère de l’agglomération lyonnaise était sans lien avec les symptômes médicaux (troubles bronchiques et de la sphère oto-rhino-laryngée, se manifestant par des bronchites aiguës, des laryngites et des rhinolaryngites) présentés par le fils de la requérante. « L’enfant ne souffre d’aucune pathologie identifiée, telle que l’asthme, ni ne présente de séquelles de ces différents épisodes, d’après un bilan respiratoire réalisé en 2022 » (CAA Lyon, 15 février 2023 : n°19LY04397).

Pour la Cour de justice de l’Union européenne les directives européennes sur la qualité de l’air n’ont pas pour objet de conférer des droits individuels aux particuliers susceptibles de leur ouvrir un droit à réparation à l’égard de l’État [CJUE, 22 décembre 2022, affaire C-61/21).
En l’espèce, un résident de la région parisienne réclamait à l’État français une indemnisation d’un montant total de 21 millions d’euros estimant subir un préjudice en raison de la détérioration de son état de santé à compter de 2003, qui serait causée par la dégradation de la qualité de l’air ambiant dans l’agglomération de Paris. Cette dégradation était, selon lui, due au fait que les autorités françaises ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union. Communiqué de presse n°211/22 (PDF).

Tribunal administratif de Lyon, 24 février 2023 : n°2007414 (PDF)

[1Ces normes résultent de la transposition de la directive européenne 2008/50/CE du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe.

[2Le nouveau plan de protection de l’atmosphère approuvé en fin d’année 2022 ne couvre pas la période en cause dans le litige.

[3Actuel article L2212-2 du CGCT

[4C’est le président du conseil de la métropole qui exerce les prérogatives relatives à la police de la circulation ; article L.3642-2 du CGCT