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Les jeux sont faits !

cass. crim. 30 octobre 2002

Même si le contrat initial a été signé avec la municipalité précédente, la signature d’un avenant peut être passible de prise illégale d’intérêt, quand bien même ledit avenant n’est, sur injonction préfectorale, qu’une mise en conformité avec une nouvelle législation.

Le maire d’une commune de 3 514 habitants est actionnaire et caution personnelle d’une société anonyme propriétaire d’un bateau où est exploité un casino. Un cahier des charges lie la commune à cette société.

Il est reproché au maire d’avoir signé un avenant audit cahier des charges concernant l’affectation au profit du casino des recettes supplémentaires et d’avoir présidé le conseil municipal qui délibérait sur une modification du même document pour l’exploitation des jeux du casino.

La Cour de cassation (Crim 30 octobre 2002, 01-85486) confirme la condamnation du maire pour prise illégale d’intérêt et abus de biens sociaux prononcée par la cour d’appel de Montpellier à 6 mois d’emprisonnement avec sursis et 50 000 francs ( 7 500 euros) d’amende.

Les magistrats relèvent en effet que "le maire qui préside le conseil municipal et qui appose sa signature sur divers actes a évidemment la surveillance et l’administration de l’opération". Pour sa défense l’élu soulevait plusieurs arguments :

1° Les modifications apportées au cahier des charge (article qui stipule que les recettes supplémentaires dégagées en application du barème fixé par la loi du 3 avril 1955, "seront affectées à augmenter le pouvoir attractif du casino et de ses abords") étaient la reprise fidèle des termes du décret n° 57-636 du 24 mai 1957 et de l’article L. 2333-56 du Code des collectivités territoriales de telle sorte que la société gérant le casino n’avait bénéficié d’aucun régime de faveur ;

2° Elles avaient d’ailleurs été déterminées par l’injonction faite à la commune par le trésorier payeur général de se mettre en conformité avec les prescriptions du décret n° 57-636 du 24 mai 1957 et de l’article L. 2333-56 du Code général des collectivités territoriales, sous peine de voir la concession d’exploitation du casino dénoncée devant le juge administratif ;

3° La délibération contestée du conseil municipal avait pour objet de mettre fin de manière anticipée à la concession d’exploitation au profit d’une mise en concurrence avec d’autres candidats.
Les magistrats de la cour d’appel lui répondent "que les arguments présentés ne constituent aucunement des causes d’irresponsabilité" dès lors que "le délit de prise illégale d’intérêt est consommé dès que le prévenu a pris, reçu ou conservé, directement ou indirectement, un intérêt, même simplement moral, dans une entreprise ou une opération dont il avait l’administration ou la surveillance, celle-ci se réduirait-elle à de simples pouvoirs de préparation ou de proposition de décisions prises par d’autres" et "que le délit est même constitué par le seul abus de fonction, indépendamment de la recherche d’un gain ou d’un avantage personnel".

La Cour de cassation écarte pour sa part les moyens soulevés par le prévenu d’un revers de manche en constatant "que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnels, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable".