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Loi 3 DS : principales mesures en matière de simplification de l’action publique locale et de déconcentration

Dernière mise à jour le 24/03/2021

La loi 3DS (différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification de l’action publique locale) contient des mesures relatives à la simplification de l’action publique et à la déconcentration. Tour d’horizon de quelques nouveautés dans ces deux domaines.

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Voir aussi :
 "Loi 3 DS : principales mesures concernant l’exercice et le transfert des compétences"

 "Loi 3DS : principales mesures en matière d’urbanisme"

1 - Mesures relatives à la simplification de l’action publique locale

1-1 Recours à la visioconférence pour les départements, régions et EPCI : un usage encadré (hors crise sanitaire) article 170

La loi pérennise le recours à la visioconférence pour les départements [2] du CGCT et les régions [3].

Concernant les EPCI, la loi « Engagement et proximité » du 27 décembre 2019 avait déjà autorisé la tenue des réunions de l’organe délibérant des communautés de communes, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines et des métropoles (article L.5211-11-1 du CGCT) par téléconférence.
La loi 3 DS élargit le dispositif à tous les établissements publics de coopération intercommunale.

Les assemblées de Guyane, Corse, Martinique peuvent également recourir à la visioconférence (articles L.7122-9-1, L.4422-5-1,L.7222-9-1 du CGCT).

La visioconférence peut également être utilisée par les commissions permanentes des départements, régions, Assemblée de Corse, de Guyane.

Modalités :

 A l’initiative du président de l’organe délibérant, les réunions des assemblées délibérantes peuvent se tenir « en plusieurs lieux par visioconférence ». La convocation adressée par la président mentionne ce choix.

 Le quorum est apprécié en fonction de la présence des conseillers dans les différents lieux par visioconférence.

 Les votes ne peuvent avoir lieu qu’au scrutin public qui peut être organisé soit par appel nominal, soit par scrutin électronique dans des conditions garantissant sa sincérité. La voix du président est prépondérante en cas de partage des voix.
Le résultat du vote, proclamé par le président, est reproduit au procès-verbal avec le nom des votants.

📌A noter : En cas d’adoption d’une demande de vote secret, le président reporte le point de l’ordre du jour à une séance ultérieure, qui ne peut se tenir par visioconférence.

 Au moins deux fois par an les réunions sont organisées « en présentiel ».

📌A noter : L’élection du président, de la commission permanente, l’adoption du budget primitif, la désignation des délégués pour siéger au sein d’organismes extérieurs ne peuvent se tenir par visioconférence.

 La réunion organisée en visioconférence est diffusée en direct à l’attention du public sur le site internet de la collectivité, de l’EPCI. Les lieux mis à disposition par la collectivité pour la tenue d’une réunion par visioconférence sont accessibles au public.

 Les modalités pratiques de déroulement des réunions par visioconférence sont précisées par le règlement intérieur.

⌛ Ces mesures seront applicables à compter du 1er août 2022 (c’est-à-dire après la fin du régime dérogatoire instauré pour assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l’exercice des compétences des collectivités territoriales et des établissements publics locaux pendant l’épidémie de covid-19 (Article 11 de l’ordonnance n°2020-391 du 1er avril 2020 tel que modifié par l’article 10 de la loi n°2021-1465 du 10 novembre 2021 portant dispositions de vigilance sanitaire).

1-2 Dénominations des voies - Base Adresse Locale (BAL)

🔹 Dénominations des voies : Compétence du conseil municipal (article 169)

La loi consacre la compétence du conseil municipal en matière de dénomination des voies.
L’article L.2121-30 du CGCT tel que modifié par l’article 169 dispose que : « Le conseil municipal procède à la dénomination des voies et lieux-dits ». Cette obligation de dénommer les voies concernent également « les voies privées ouvertes à la circulation ».

Toutes les communes sont concernées (y compris les communes de moins de 2000 habitants).

L’objectif poursuivi est de permettre la constitution et le maintien à jour par chaque commune d’une Base Adresse Locale (BAL) pour alimenter la Base Adresse Nationale (BAN). A cette fin, l’article L.2121-30 précise que « Les communes mettent à disposition les données relatives à la dénomination des voies et la numérotation des maisons et autres constructions dans le cadre de la mise à disposition des données de référence prévue à l’article L. 321-4 du code des relations entre le public et l’administration ».

Un décret d’application précisant les modalités de la transmission des informations par la commune est attendu.

🔹 Numérotage des maisons

Aux termes de l’article L.2213-28 du CGCT, le maire détient un pouvoir de police concernant le numérotage des maisons.

La loi modifie cet article en supprimant l’obligation pour les communes de prendre en charge la pose de la première plaque de numéro.
L’article est désormais ainsi rédigé : « Dans toutes les communes où l’opération est nécessaire, le numérotage des maisons est exécuté par arrêté du maire ».

Le site adresse.data.gouv.fr précise que « les communes pourront préciser par arrêté le format des plaques de numéros afin de conserver une harmonie, mais ne seront pas tenues d’en payer la première pose. Elles doivent continuer à fournir les plaques des noms des voies. » (Que va changer la loi 3DS pour les communes sur leurs adresses ? – Source : adresse.data.gouv.fr).

📌A noter : Les communes peuvent être accompagnées dans leurs démarches. Il existe par exemple des guides gratuits (https://adresse.data.gouv.fr/ressources) et l’outil en ligne « Mes adresses » (https://mes-adresses.data.gouv.fr/) permet aux communes de créer leurs BAL.)

1-3 Droit funéraire (articles 237 et 238)

Quelques changements sont à noter :

🔹 Renouvellement des concessions : une information des familles renforcée

Faisant suite à une recommandation de la Défenseure des droits (Rapport de la Défenseure des droits La personne défunte et ses proches face au service public funéraire -2021) la loi impose aux communes d’informer les concessionnaires et leurs ayants cause de leur droit à renouvellement de la concession arrivant à échéance :

« Les communes sont tenues d’informer par tout moyen les concessionnaires et leurs ayants cause de l’existence de ce droit de renouvellement » (article L.2223-15 du CGCT).

🔹 Procédure de reprise des concessions en état d’abandon

La procédure de reprise des concessions en état d’abandon des concessions de plus de trente ans est très encadrée (articles L.2223-17 et R.2223-12 et s. du CGCT) et débute avec un constat d’état d’abandon par procès-verbal du maire porté à la connaissance du public et des familles.

La loi abaisse le délai entre le constat de cet état d’abandon et la décision du conseil municipal de reprendre la concession, ce délai est désormais de 1 an (au lieu de 3 ans) (article L.2223-17 modifié).

🔹 Régime des métaux issus de la crémation

Un nouvel article est créé pour encadrer la récupération des métaux issus de la crémation (article L.2223-18-1-1 du CGCT).

Aux termes de cet article, les métaux issus de la crémation :
• ne sont pas assimilés aux cendres du défunt,
• font l’objet d’une récupération par le gestionnaire du crématorium pour cession (à titre gratuit ou onéreux) pour un traitement approprié.

Le produit éventuel de la cession doit être inscrit en recette de fonctionnement au budget du crématorium et ne peut être affecté qu’à l’une des opérations prévues par la loi (financer la prise en charge des obsèques des personnes dépourvues de ressources suffisantes, faire l’objet d’un don à une association d’intérêt général ou à une fondation reconnue d’utilité publique).

Obligation d’information : ces dispositions sont affichées au sein des crématoriums et « figurent sur tout document de nature contractuelle prévoyant la crémation du défunt ».
Les conditions d’application de cet article ont été précisées par le décret n°2022-1127 du 5 août 2022.

🔹 Mise à disposition de devis-type

Tel que modifié par la loi 3DS, l’article L.2223-21-1 du CGCT prévoit que les devis-type transmis par les opérateurs funéraires aux mairies sont actualisés tous les 3 ans.

Publication en ligne des devis : des devis-type sont publié sur le site internet des communes de plus de 5000 habitants. Cette mesure entre en vigueur le 1er juillet 2022.

🔹 Autorisation de transfert du corps vers un cercueil adapté à la crémation

Lorsque le corps du défunt a été placé, pour son transport, dans un cercueil composé de matériaux incompatibles avec la crémation, le maire peut autoriser le transfert du corps vers un cercueil adapté à la crémation (nouvel article L.2223-42-1 du CGCT).

Conditions :
« Cette autorisation ne peut être délivrée qu’en vue de la crémation du corps, qui s’opère sans délai après le changement de cercueil, et à condition que le défunt n’ait pas été atteint par l’une des infections transmissibles prescrivant ou interdisant certaines opérations funéraires, dont la liste est fixée par voie réglementaire ».

Le décret n°2022-1127 du 5 août 2022 crée un nouvel article dans la partie règlementaire du CGCT pour préciser la procédure (article R.2213-34-1).

1-4 Allègement de la responsabilité du gardien de l’espace naturel pour les dommages causés dans le cadre des sports de pleine nature

La loi introduit dans le code du sport un nouvel article L.311-1 allégeant la responsabilité du gardien de l’espace naturel dans lequel s’exerce un sport de nature : le gardien « n’est pas responsable des dommages causés à un pratiquant, sur le fondement du premier alinéa de l’article 1242 du code civil, lorsque ceux-ci résultent de la réalisation d’un risque normal et raisonnablement prévisible inhérent à la pratique sportive considérée. »
Cette mesure était attendue par la Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade (FFME) et par les collectivités propriétaires et gestionnaires des sites. La FFME avait été lourdement condamnée en 2019 suite à l’accident survenu à un guide de haute montagne et sa cliente alors qu’ils gravissaient une paroi du site d’escalade de la commune (accident provoqué par la chute d’un rocher : CA Toulouse, 21 janvier 2019 : n°16/02863 . La Cour de cassation avait rejeté le pourvoi Cass. 2 Civ., 16 juillet 2020 : n°19-14.033. )

💥Il faudra suivre avec attention l’interprétation de cette nouvelle disposition par les tribunaux pour mesurer l’impact effectif de la mesure.

1-5 Partage de données entre administrations (article 162)

La loi généralise et allège le dispositif « Dites-le nous une fois ». Désormais, c’est la règle du partage par défaut des informations entre administrations en cas de demande ou de déclaration de l’usager qui s’applique.

L’article L.113-12 du code des relations entre le public et l’administration est modifié : « Une personne présentant une demande ou produisant une déclaration à une administration ne peut être tenue de produire des informations ou des données que celle-ci détient ou qu’elle peut obtenir directement auprès d’une administration participant au système d’échange de données défini à l’article L. 114-8 ».

🔹 Quelles informations ?

 Les administrations échangent entre elles les informations ou les données strictement nécessaires pour traiter une demande (article L.114-8 du CRPA).

L’administration « fait connaître à la personne concernée les informations ou les données qui sont nécessaires à cette fin et celles que l’administration se procure directement auprès d’autres administrations françaises ».

 La loi permet également le partage d’informations ou de données pour informer pro-activement l’usager sur ses droits (droit au bénéfice éventuel d’une prestation ou d’un avantage prévus par des dispositions législatives ou des actes réglementaires).

📌Des chantiers sont déjà en cours (rappel automatique de l’expiration prochaine du passeport, reconduction automatique des bourses des collèges, octroi automatiquement de la complémentaire santé solidaire aux bénéficiaires du RSA) précise le document de présentation de la loi 3DS du Ministère de la Cohésion des territoires.

🔹 Protection des données personnelles :

Au plus tard au moment de la première communication individuelle avec la personne concernée, celle-ci est avisée de ses droits d’accès et de rectification ainsi que, le cas échéant, de son droit de s’opposer à la poursuite du traitement des données.

Les informations et les données obtenues sont détruites sans délai si la personne concernée s’oppose à la poursuite du traitement ou lorsque ce traitement révèle que la personne n’a pas droit à la prestation ou à l’avantage.

💥Attention : ces informations et données ne peuvent être utilisées à d’autres fins (par exemple pour la détection ou pour la sanction d’une fraude).

Un décret en Conseil d’Etat (pris après avis motivé de la CNIL) détermine la durée et les modalités de conservation des informations et des données collectées à cette occasion.

Enfin, la loi précise que le secret professionnel ne peut pas être opposé dès lors que les administrations destinataires des informations ou données sont, « dans le cadre de leurs missions légales, habilitées à avoir connaissance des informations ou des données ainsi échangées ».

2 - Déconcentration

2-1 Installation des cirques sur le domaine public – Procédure de médiation

L’article 157 de la loi prévoit une procédure de médiation organisée par le préfet lorsque l’exploitant d’un cirque itinérant rencontre des difficultés pour s’établir sur le domaine public d’une commune.

Le décret du 17 mars 2022 n°2022-376) précise cette procédure.

Le préfet doit assurer cette médiation « dans les meilleurs délais ».

Conditions de recevabilité de la demande :

 L’exploitant doit adresser une copie de la demande d’installation au représentant de l’Etat dans le département, dans les quarante-huit heures qui suivent assortie de la preuve par tout moyen de sa réception par la collectivité.

 L’exploitant saisit le préfet dans les 15 jours suivants la décision de refus ou l’expiration du délai valant décision implicite de rejet. La saisine du préfet a pour but de trouver un emplacement sur le domaine public ou privé de la commune. La demande est accompagnée le cas échéant de la copie de la décision de refus.
Le texte règlementaire précise que « Le représentant de l’Etat dans le département définit librement les modalités de la médiation qu’il conduit ».

📌A noter : le décret crée dans chaque département une commission départementale des professions foraines et circassiennes. Cette instance est « composée dans la même proportion de maires, de représentants des syndicats professionnels ou associations des professions foraines et circassiennes et de représentants des services de l’Etat. Ses membres sont désignés par arrêté du représentant de l’Etat dans le département ».
Cette commission est chargée de conseiller le préfet sur toute question ayant trait à l’installation et aux activités des professions foraines et circassiennes dans le département. Le représentant de l’Etat l’informe lorsqu’il est saisi d’une demande de médiation et peut procéder à sa consultation.

2-2 Risque sécheresse et réhydratation des sols (article 161)

La loi habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance (dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi) afin d’améliorer la prise en charge des conséquences exceptionnellement graves sur le bâti et sur les conditions matérielles d’existence des assurés des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols.

Le régime des catastrophes naturelles doit être adapté aux spécificités de ce phénomène naturel.

Plus précisément, l’article 161 prévoit notamment que :

- l’adaptation vise à permettre « l’indemnisation des dommages matériels (…) dès lors qu’il en résulte, pour les assurés, des conséquences directes provoquant des désordres d’une gravité exceptionnelle dans leurs conditions matérielles d’existence ».
 le droit à indemnisation soit conditionné au respect des mesures de prévention.
 les conditions d’indemnisation, notamment les activités d’expertise soient encadrées.

L’ordonnance entrera en vigueur au plus tôt six mois après sa publication.

👋Rappel : La loi relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles du 28 décembre 2021 contient quelques mesures relatives au risque sécheresse-réhydratation :

- allongement de deux à cinq ans du délai de prescription des actions dérivant d’un contrat d’assurance ;

- prise en charge des travaux permettant un arrêt des désordres consécutifs aux mouvements de terrain liés à la sécheresse-réhydratation des sols.

2-3 Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cérema) : un rôle d’expertise et d’assistance renforcé au profit des collectivités (article 159)

La loi modifie le statut du Cérema et permet aux collectivités territoriales et à leurs groupements d’y adhérer (versement d’une contribution annuelle dont le montant est fixé par le conseil d’administration). Afin de faciliter l’accès aux prestations et à l’expertise du Cérema les collectivités territoriales et leurs groupements pourront faire appel à cet établissement dans le cadre de la quasi-régie (articles L.2511-1 à L.2511-5 du code de la commande publique).

Pour en savoir plus : La quasi-régie, nouvelle étape de l’ouverture aux collectivités – Source : cerema.fr

Loi n°2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale

[1Photo : Sebastian Svenson sur Unsplash

[2Nouvel article L.3121-9-1

[3Nouvel article L.4132-9-1 du CGCT