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Loi relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles : tour d’horizon des principales nouveautés

Dernière mise à jour le 7 janvier 2022

Parmi les nombreux textes adoptés en fin d’année 2021, la loi n°2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles réforme certains aspects du régime « catnat » créé en 1982 (Loi n°82-600 du 13 juillet 1982). Avec des impacts pour les collectivités. Tour d’horizon des principales nouveautés.

 [1]

I Un processus décisionnel plus transparent

La loi prévoit plusieurs mesures pour mettre fin à l’opacité qui entoure la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

La décision des ministres doit être motivée
(article 1 modifiant l’article L.125-1 du code des assurances)

L’état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, la décision des ministres :

 cette décision doit être « motivée de façon claire, détaillée et compréhensible » ;

 elle doit mentionner les voies et délais de recours (recours gracieux, recours pour excès de pouvoir).

Communication des documents administratifs et rapports d’expertise (article 1 modifiant l’article L.125-1 du code des assurances)

La communication des documents administratifs (notamment des rapports d’expertise ayant fondé la décision des ministres) sera possible (les règles de communication seront mentionnées dans la décision, un décret doit en préciser les modalités).

Le représentant de l’Etat dans le département notifie à chaque commune concernée la décision "en précisant les conditions de communication des rapports d’expertise".

L’existence de la commission interministérielle de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle est officialisée
(article 5 créant l’article L.125-1-1 code des assurances)

Le législateur fige dans la loi l’existence de la commission interministérielle de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle (instance créée par une circulaire n°84-90 du 27 mars 1984).

Saisie par les ministres concernés, cette instance administrative est chargée d’émettre un avis sur le caractère d’intensité anormale du phénomène naturel en se basant sur les expertises techniques. Sur le fondement de ces avis (il s’agit d’avis simples : les ministres ne sont pas liés par les avis émis par la commission - CE, 16 mars 2018 : n°389176) les ministres concernés constatent (ou non) l’état de catastrophe naturelle.

Un décret est attendu pour préciser l’organisation et le fonctionnement de la commission.

De plus, pour mener à bien l’objectif de transparence des décisions, les avis rendus par la commission interministérielle pourront être communiqués dans des conditions fixées par décret.

💥 La commission est également chargée d’établir un rapport annuel comprenant un bilan synthétique des avis rendus ainsi qu’un état des référentiels retenus pour apprécier l’intensité anormale de l’agent naturel. "Ainsi, les sinistrés et les communes pourront mieux comprendre les avis qu’elle rend" souligne le rapport du 8 décembre 2021 fait au nom de la commission mixte paritaire.

La loi crée une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles (nouvel article L.125-1-1 du code des assurances créé par l’article 5)

Afin d’accroître la légitimité des décisions de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, la loi crée une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles chargée de rendre annuellement un avis sur la pertinence des critères retenus pour déterminer la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et sur les conditions d’indemnisation des sinistrés.

Les comptes rendus des débats sont rendus publics dans des conditions prévues par décret.

Les missions, la composition, l’organisation et le fonctionnement de cette commission seront précisées par décret.

💥Les élus locaux seront représentés au sein de cette commission, la loi précise d’ores et déjà que parmi ses membres, la Commission comprend 6 membres titulaires de mandats locaux et des représentants des associations de sinistrés.

II Un référent pour informer et conseiller les élus locaux dans les procédures de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle

Pour accompagner les élus, la loi institue un « référent à la gestion des conséquences des catastrophes naturelles et à leur indemnisation » (article 2 créant l’article L.125-1-2 du code des assurances).

Ce référent est nommé auprès du représentant de l’Etat dans le département.

Il a pour mission :

 d’informer les communes des démarches requises pour déposer une demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, de les conseiller au cours de l’instruction de leur demande ;

 de mobiliser les dispositifs d’aide et d’indemnisation susceptibles d’être engagés après la survenue d’une catastrophe naturelle, ou le cas échéant, après un événement climatique exceptionnel pour lequel une commune n’a pas vu sa demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle satisfaite ;

 de coordonner les échanges entre les services de l’Etat, les communes et les représentants des assureurs sur les demandes en cours d’instruction ;

 de promouvoir une meilleure information sur la prévention et la gestion des conséquences des catastrophes naturelles (diffusion d’informations générales sur l’exposition du territoire concerné à des risques naturels, sur les dispositifs d’aide et d’indemnisation et les démarches pour en bénéficier, sur les conditions d’indemnisation des sinistrés). Ces informations sont diffusées auprès de tous les acteurs (communes, habitants, associations de sinistrés, entreprises…) ;

 de s’assurer de la bonne communication des rapports d’expertise lorsque les communes demandent la communication de ces documents ;

 de présenter, au moins une fois par an, devant la commission départementale des risques naturels majeurs, un bilan des demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, de l’utilisation du fonds Barnier (fonds de prévention des risques naturels majeurs) et de l’évolution des zones exposées au phénomène de sécheresse réhydratation des sols devant la commission départementale compétente.

💥Pour permettre aux élus locaux d’expliquer la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, des supports de communication seront mis à leur disposition par le référent (à compter du 1er juillet 2022).

III Un allongement du délai pour transmettre la demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle (article 9)

La loi allonge le délai dont disposent les communes pour transmettre au préfet leur demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Ce délai passe de 18 à 24 mois après le début de la survenance de l’évènement naturel (article L.125-1 du code des assurances modifié).

💥Rappel : depuis 2019, la demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle peut être effectuée de manière dématérialisée via la plateforme iCatNat.

IV Un délai de publication au Journal Officiel raccourci (article 6)

L’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle devra être publié au Journal Officiel dans un délai de deux mois (au lieu de trois mois - article L.125-1 alinéa 4 du code des assurances modifié) à compter du dépôt des demandes à la préfecture (cette mesure entre en vigueur en janvier 2023).

🔎 Focus : Quelles mesures pour le risque sécheresse-réhydratation des sols ?

Face à la multiplication des sinistres causés par les phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols (retrait-gonflement des argiles), la prise en charge du risque sécheresse fait débat. Mais le texte final contient très peu de mesures :

 la loi allonge le délai de prescription des actions dérivant d’un contrat d’assurance en cas de dommages résultant d’un mouvement de terrain consécutifs à la sécheresse-réhydratation des sols reconnus comme une catastrophe naturelle : le délai est porté à 5 ans (article 4 modifiant l’article L. 114-1, al. 1 du code des assurances) ;

- le législateur demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dans un délai de 6 mois à compter de la promulgation de la loi. Ce rapport devra présenter notamment des propositions en vue de l’indemnisation des dommages causés par le retrait-gonflement des argiles ainsi que « des pistes visant à créer un régime juridique et financier traitant de l’ensemble des aspects liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles » (Article 8)

Lors de l’examen du projet de loi 3DS (Projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale examiné en décembre par l’Assemblée Nationale. L’Assemblée Nationale a voté le texte le 4 janvier, ultime étape avant la convocation d’une commission mixte paritaire prévue le 27 janvier), les députés ont adopté un amendement habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance pour adapter le régime CatNat afin d’améliorer la prise en charge des sinistres liés aux phénomènes retrait-gonflement des argiles.

Franchises et délais de déclaration

Si la loi supprime la possibilité de moduler les franchises à la charge des assurés en fonction de l’existence d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN), cette suppression ne concerne pas les biens assurés par les collectivités territoriales ou par leurs groupements pour lesquels un PPRN a été prescrit mais non approuvé dans les délais règlementaires (article L.125-2 du code des assurances modifié par l’article 3, modification qui entrera en vigueur en janvier 2023).

Le délai dont dispose l’assuré pour déclarer un sinistre de nature à entraîner la garantie catastrophe naturelle est allongé. L’assuré dispose désormais d’un délai de 30 jours (contre 10 jours auparavant) pour déclarer le sinistre après la publication de l’arrêté reconnaissant l’état de catastrophe naturelle (article 6 modifiant l’article L.125-2 du code des assurances, mesure entrant en vigueur le 1er janvier 2023).

Loi n°2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles

[1Photo : Jonathan Ford sur Unsplash