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Délégation retirée à un adjoint ayant exercé un recours contre la commune : abus de pouvoir ?

Cour administrative d’appel de Versailles, 15 octobre 2020, N° 19VE03184

Un maire peut-il retirer la délégation à un adjoint qui, en sa qualité de riverain, a intenté un recours contre un projet immobilier mené par la commune ?

Non répond la cour administrative d’appel de Versailles : « l’exercice de la faculté ouverte à tout citoyen disposant d’un intérêt pour agir à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme ne saurait à elle-seule être regardée comme la mise en cause de la politique municipale en matière d’urbanisme ou de logement ou la manifestation de dissensions de nature à perturber la bonne gestion des affaires municipales ». Or si le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu’il a consenties, c’est à la condition que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l’administration communale. Tel n’est pas jugé le cas en l’espèce dès lors que l’adjoint n’ a donné de publicité à son recours lequel ne traduit pas un désaccord à l’encontre de la politique municipale ou un différend politique avec le maire ou la majorité municipale.

Une commune (plus de 10 000 habitants) décide de se lancer dans un programme de construction de logements sociaux. Elle délivre à cette fin un permis d’aménager qui est attaqué par un collectif de riverains opposés au projet. Parmi les requérants figure... le 4è adjoint au maire.

Le maire retire alors les délégations à l’intéressé estimant que le recours qu’il a introduit révèle une opposition à la politique menée par la commune s’agissant du logement social.

L’adjoint conteste cette décision et obtient gain de cause devant le tribunal administratif, ce que confirme la cour administrative d’appel de Versailles.

Il résulte en effet des dispositions des articles L. 2122-18 et L. 2122-20 du code général des collectivités territoriales, que « le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu’il a consenties, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l’administration communale. »

Pour les magistrats, l’introduction par l’adjoint d’un recours juridictionnel à l’encontre d’un permis d’aménager concernant une parcelle contiguë à sa propriété ne peut justifier à elle-seule le retrait de délégation. En effet il ne ressort d’aucune pièce du dossier qu’il lui aurait donné une quelconque publicité, et ce recours « ne saurait être regardé comme traduisant un désaccord à l’encontre de la politique municipale, en particulier en matière de construction de logements sociaux ou un différend politique avec le maire ou la majorité municipale ».

Et la cour d’ajouter :

« L’exercice de la faculté ouverte à tout citoyen disposant d’un intérêt pour agir à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme ne saurait à elle-seule être regardée comme la mise en cause de la politique municipale en matière d’urbanisme ou de logement ou la manifestation de dissensions de nature à perturber la bonne gestion des affaires municipales ».

Ainsi le retrait de délégation « était étranger à la bonne marche de l’administration communale » et doit être annulé.