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Marchés publics de travaux : attention aux effets de la réception sans réserves

Cour administrative d’appel de Lyon, 25 août 2020, 19LY00297

Une commune peut-elle rechercher, après avoir réceptionné les travaux sans réserves, la responsabilité du constructeur sur le fondement d’une faute commise dans l’accomplissement de ses obligations contractuelles ?

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Non : la réception sans réserves des travaux met fin aux rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l’ouvrage. Il en va autrement, en l’absence de stipulations contractuelles, si la réception est prononcée avec réserves : dans ce cas les rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et les constructeurs se poursuivent au titre des travaux ou des parties de l’ouvrage ayant fait l’objet des réserves et tant que celles-ci ne sont pas levées.

Constatant le dépérissement anormal de plusieurs platanes, une commune recherche la responsabilité contractuelle de la société ayant effectué à côté de ces arbres des travaux d’édification d’un muret de soutènement.

La commune impute en effet le dépérissement à un phénomène d’arc électrique causé par la détérioration d’un câble à haute tension lors des travaux (le constat des experts d’assurance des deux parties allant dans le même sens).

Estimant que la société a manqué à ses obligations contractuelles (manque de précaution), la collectivité réclame la réparation de son préjudice qu’elle évalue à un peu plus de 75 000 euros. Elle est déboutée.

La cour administrative d’appel de Lyon rappelle utilement le principe :

« la réception est l’acte par lequel le maître d’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Elle met fin aux rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l’ouvrage. En l’absence de stipulations particulières prévues par les documents contractuels, lorsque la réception est prononcée avec réserves, les rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et les constructeurs ne se poursuivent qu’au titre des travaux ou des parties de l’ouvrage ayant fait l’objet des réserves et tant que celles-ci ne sont pas levées. »

En l’espèce, à la date du courrier par lequel la commune a constaté le dépérissement et informé la société de ce dommage, la commune avait déjà pris possession de l’ouvrage résultant des travaux. De plus, la commune avait réglé l’intégralité du solde du marché. Le juge relève alors la commune intention des parties de procéder à la réception des travaux.

La réception définitive et sans réserve des travaux étant acquise, la commune ne peut pas rechercher la responsabilité de la société sur le fondement juridique d’une faute commise dans l’accomplissement de ses obligations contractuelles.

Cet arrêt a le mérite de souligner l’importance des réserves. Dans le cas présent, la commune n’avait émis aucune réserve alors qu’elle avait eu connaissance de la détérioration du câble survenue quelques jours après le début des travaux, détérioration susceptible d’avoir des conséquences dommageables.

[1Photo : Jules Bss sur Unsplash