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Forfait post-stationnement : la procédure de contestation censurée par le Conseil constitutionnel

Conseil constitutionnel, décision n° 2020-855 QPC du 9 septembre 2020

Un automobiliste doit-il toujours payer le forfait post-stationnement avant de pouvoir le contester ?

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Non répond le Conseil constitutionnel qui censure ce dispositif introduit par l’ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015, estimant qu’il est contraire au droit à un recours juridictionnel effectif compte-tenu de sa généralité. En effet le législateur n’a apporté à l’exigence de paiement préalable desdits forfaits et majorations aucune exception tenant compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables. Cette déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de la décision. Il appartiendra au législateur de revoir sa copie en déterminant notamment un nombre d’exceptions à cette règle s’il souhaite la maintenir pour limiter les recours dilatoires.

Le Conseil constitutionnel a été saisi par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité de l’article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l’article L. 2333-87 du CGCT.

Cet article dispose que le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte compétent pour l’organisation de la mobilité peut instituer une redevance de stationnement, dont il détermine le barème tarifaire. Cette redevance doit être payée par le conducteur dès le début du stationnement. À défaut, l’intéressé s’expose à devoir s’acquitter d’un forfait de post-stationnement, qui peut faire l’objet d’une majoration s’il n’est pas payé dans les délais.

Les décisions individuelles relatives à ces forfaits et majorations peuvent certes faire l’objet d’un recours contentieux devant la Commission du contentieux du stationnement payant mais l’article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales subordonne la recevabilité de tels recours au paiement préalable du forfait de post-stationnement contesté et de sa majoration éventuelle.

Une automobiliste qui avait vendu son véhicule et qui se trouvait à devoir payer un forfait de post-stationnement pour un véhicule qui ne lui appartenait plus depuis 3 mois contestait ce dispositif estimant qu’il était contraire au droit à un recours juridictionnel effectif.

Le Conseil constitutionnel reconnait que le législateur a entendu ainsi, dans un but de bonne administration de la justice, prévenir les recours dilatoires dans un contentieux exclusivement pécuniaire susceptible de concerner un très grand nombre de personnes. Mais il relève deux écueils :

1° aucune disposition législative ne garantit que la somme à payer pour contester des forfaits de post-stationnement et leur majoration éventuelle ne soit pas d’un montant trop élevé ;

2° Le législateur n’a apporté à l’exigence de paiement préalable desdits forfaits et majorations aucune exception tenant compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables.

Le Conseil constitutionnel en déduit que le législateur n’a pas prévu les garanties de nature à assurer que l’exigence de paiement préalable ne porte pas d’atteinte substantielle au droit d’exercer un recours juridictionnel effectif. Par ces motifs, il déclare contraires à la Constitution les dispositions contestées :

« Il résulte de tout ce qui précède que le législateur n’a pas prévu les garanties de nature à assurer que l’exigence de paiement préalable ne porte pas d’atteinte substantielle au droit d’exercer un recours juridictionnel effectif. Les dispositions contestées doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. »

Cette déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de la décision. Il appartiendra au législateur de revoir sa copie, s’il souhaite maintenir cette règle pour éviter les recours dilatoires, de déterminer des exceptions.

[1Photo : LOGAN WEAVER sur Unsplash