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Jurisprudence de la semaine

Semaine du 15 au 19 juin 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales rendues entre le 15 et le 19 juin 2009 (dernière mise à jour : 30/12/2009)


 [1]

Jurisprudence judiciaire

 Urbanisme - Installation classée - Fin d’exploitation - Obligation de remise en état du site - Dédommagement de la commune

Il résulte des dispositions de la loi du 19 juillet 1976, reprises aux articles L. 511-1 et suivants du code de l’environnement, que l’obligation de remise en état du site est applicable aux installations de la nature de celles soumises à autorisation en application du titre 1er du livre V du code de l’environnement alors même qu’elles auraient cessé d’être exploitées avant l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 1976, dès lors que ces installations demeurent susceptibles de présenter les dangers et inconvénients énumérés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement.

Cependant, en l’espèce le terrain, exploité en décharge jusqu’en 1977 et affecté d’une pollution résiduelle inhérente à cette activité, était utilisable en nécessitant certaines précautions. Ainsi la délivrance d’un permis de construire n’était pas impossible mais subordonnée au respect de certaines précautions constructives rendues nécessaires par la nature même du sol. Dès lors que la société ayant exploité le site n’a manqué ni à ses obligations contractuelles, ni aux obligations réglementaires, la demande de dommages-intérêts de la commune doit être rejetée.

Cour de cassation, chambre civile 3, 17 juin 2009, N° de pourvoi : 08-14080


 Urbanisme - Vente par une commune d’un terrain non constructible - Annulation du POS ayant pour effet de rendre le terrain constructible - Lésion de la commune

La lésion doit s’apprécier au moment de la conclusion du contrat. Peu importe que, par effet rétroactif, l’annulation postérieure du POS ait eu pour effet de rendre constructible un terrain vendu pour le prix d’un terrain non constructible.

Cour de cassation, chambre civile 3, 17 juin 2009, N° de pourvoi : 08-15055


 Reprise d’une activité confiée à une association : qu’est-ce qu’une entité économique autonome ? Quelles sont les incidences de cette qualification sur les contrats de travail ? La poursuite du travail vaut-elle acceptation tacite du changement d’employeur ?

Les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail aux termes duquel « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur (…) tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise » ne s’appliquent qu’en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise ».

« Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; (…) le transfert d’une telle entité ne s’opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation de l’entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant ». Tel n’est pas le cas d’une ville qui n’a jamais cessé d’exploiter son théâtre avec son personnel et ses moyens, l’association se bornant à mettre à sa disposition deux de ses salariés pour participer à son fonctionnement culturel et administratif. De fait, à la fin du marché, la situation juridique du théâtre est restée identique, cet établissement continuant d’être exploité par la ville.

« Le transfert du contrat de travail d’un salarié d’une entreprise à une autre constitue une modification de ce contrat qui ne peut intervenir sans son accord exprès ». Peu importe que le salarié ait poursuivi son travail, cette circonstance n’équivalant pas à un accord exprès.

Cour de cassation , chambre sociale, 17 juin 2009, N° 08-42615


 Marchés publics - favoritisme - Corruption

Se rend coupable de favoritisme et de corruption passive le président d’une chambre des métiers qui se fait remettre une somme de 1300 euros et un ordinateur portable en échange de l’attribution d’un marché public. En répression il est condamné à deux ans d’emprisonnement dont seize mois avec sursis, 30 000 euros d’amende, cinq ans d’interdiction des droits civiques, civils et de famille.

Cour de cassation, chambre criminelle, 17 juin 2009, N° 08-88116


Jurisprudence administrative

 Elections- Compte de campagne - Intérêt à agir d’une liste tiers - Diffamation dans des mémoires en justice

1° Lorsque la commission des comptes de campagne et des financements politiques saisit le juge de l’élection en application de l’article L. 52-15 du code électoral, seul le candidat dont le compte de campagne est rejeté a la qualité de partie à l’instance. N’est ainsi pas recevable à agir le chef de file d’une liste concurrente. Peu importe que le tribunal administratif l’ait, à tort, mis en cause, au cours de l’instance.

2° En application de l’article L. 741-2 du code de justice administrative les juridictions administratives peuvent supprimer les écritures contenues dans un mémoire en défense présentant un caractère injurieux ou diffamatoire (en revanche aucune action en diffamation, injure ou outrage ne peut être engagée à l’encontre du compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni des discours prononcés ou des écrits produits devant les tribunaux).

Conseil d’Etat, 15 juin 2009, N° 322472


 Marchés publics - DSP - Délégataire agissant pour son compte -Compétence du juge judiciaire

Constitue une délégation de service public la convention par laquelle l’Etat confie à une société d’économie mixte une mission de service public consistant en la construction d’un centre archéologique et son exploitation pendant une durée de 15 ans. La rémunération du cocontractant est en effet substantiellement assurée par les résultats de l’exploitation. Dès lors que la SEM délégataire agit pour son compte et non pour celui de l’Etat en concluant des marchés avec des tiers pour la réalisation des ouvrages, les contrats qu’elle conclut sont des contrats de droit privé relevant de la compétence du juge judiciaire.

Conseil d’Etat, 17 juin 2009, N° 297509


Fonction publique - Retraite - Erreur ayant eu une influence sur la liquidation de la pension - Rectification

S’il est permis de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension, il appartient à l’autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l’existence et la portée des erreurs alléguées. Les intéressés ne peuvent cependant pas se prévaloir de droits acquis qu’ils tiendraient d’actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, pour des motifs autres que l’exécution d’une loi, d’un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d’une décision du juge de l’excès de pouvoir.

Conseil d’Etat, 17 juin 2009, n° 306076


 Maitrise d’ouvrage - désordres apparents - garantie décennale

Dès lors que les vices sont apparents et connus du maître de l’ouvrage lors de la réception, ce dernier ne peut rechercher la responsabilité du constructeur. Si le maitre de l’ouvrage peut prétendre que les vices apparents n’étaient pas connus dans toute leur ampleur, encore faut-il qu’il présente une argumentation motivée et circonstanciée à l’appui de son moyen.

Conseil d’Etat, 17 juin 2009, n° 312417


Election - compte de campagne - menues dépenses - bonne foi du candidat

1° L’obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de la campagne constitue une formalité substantielle. Il ne peut y être dérogé s’agissant du règlement direct de menues dépenses par le candidat qu’à la double condition que leur montant soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond des dépenses autorisées fixé par l’article L. 52-11 du code électoral. Ne sont pas des menues pour un montant de 420,52 euros, représentant 7,2 % du total de ses dépenses électorales et 2,7 % du plafond de dépenses autorisées, sans recourir au mandataire financier désigné par lui.

2° N’établit pas sa bonne foi lui permettant d’échapper à l’inéligibilité, le candidat qui invoque des difficultés qu’aurait rencontrées son mandataire financier pour obtenir l’ouverture d’un compte bancaire et la délivrance d’un chéquier ainsi que l’absence de volonté de sa part de contrevenir aux règles.

Conseil d’Etat, 18 juin 2009, n° 324653


 Procédure - Règles de compétence - Dommages causés au domaine public par un véhicule - Compétence du juge administratif

"Si l’alinéa 1er de l’article 1 de la loi du 31 décembre 1957 susvisée dispose que : ... les tribunaux de l’ordre judiciaire sont seuls compétents pour statuer sur toute action en responsabilité tendant à la réparation des dommages de toute nature causés par un véhicule quelconque , le 3ème alinéa du même article prévoit que la présente disposition ne s’applique pas aux dommages occasionnés au domaine public" ;

Les dommages provoqués par l’action d’une pelle mécanique pour l’exécution de travaux d’aménagement de la voie publique réalisés pour le compte d’une commune et ayant a endommagé des câbles enterrés de communication longeant la voie ferrée et utilisés pour l’exploitation ferroviaire, doivent être regardés comme occasionnés au domaine public ;

"Il s’ensuit qu’alors même que cet engin de chantier constitue un véhicule au sens de la loi du 31 décembre 1957 susvisée, les juridictions de l’ordre administratif sont seules compétentes pour connaître des conclusions de la SNCF tendant à la réparation de son préjudice"

Cour Administrative d’Appel de Nancy, 18 juin 2009, N° 09NC00186


 Fonction publique - Radiation des cadres pour invalidité imputable au service - Admission à la retraite - Rente viagère d’invalidité

L’admission à la retraite sur le fondement de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires [2] n’ouvre pas droit, par elle-même, au versement d’une rente viagère d’invalidité. La seule circonstance que l’arrêté par lequel il a été radié des cadres et admis à la retraite, comporte le visa de cet article n’implique pas que lui soit attribuée la prestation en cause. Peu importe qu’un avis favorable à l’attribution d’une rente viagère d’invalidité ait été exprimé par sa hiérarchie.

Conseil d’Etat, 19 juin 2009, n° 286093


Election - Compte de campagne - Dépenses non inscrites - inéligibilité

1° Doit être rejeté le compte de campagne qui ne fait pas mention d’une somme de 10 749,40 euros (soit 12% du montant total des dépenses engagées) correspondant à l’impression de 110 000 dépliants adressés par voie de multipostage et de 5000 tracts de lettres et documents de campagne commandés par l’association de financement d’un candidat. Peu importe que le candidat ait
produit les factures correspondant aux prestations et ait attesté que ces factures ont été en définitive réglées à l’imprimeur le 2 juillet 2008 par un colistier. Peu importe également que l’intégration au compte de ces dépenses n’aurait pas eu pour effet de dépasser le plafond de dépenses autorisé.

2° N’établit pas sa bonne foi lui permettant d’échapper à l’inéligibilité le candidat qui se prévaut des défaillances de son mandataire financier concernant les factures litigieuses eu égard notamment au caractère substantiel de l’obligation qui a été méconnue ainsi qu’à l’absence d’ambiguïté des règles applicables.

Conseil d’État, 19 juin 2009, N° 322051


 Fonction publique - Poursuites pénales - Diffamation - Protection fonctionnelle

1° Les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des fonctionnaires, lorsqu’ils ont été victimes d’attaques à l’occasion de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général.

2° La protection due au fonctionnaire ou à l’ancien fonctionnaire qui fait l’objet de poursuites pénales n’est due qu’à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle.

Conseil d’Etat, 19 juin 2009, n° 323745


 Marchés publics - Marchés dépassant les seuils communautaires - Avis public à la concurrence - formulaire standard - rubriques devant être renseignées - erreur matérielle

S’agissant d’un marché dépassant le seuil communautaire, il appartient à l’acheteur public, en application de l’article 40 du code des marchés publics, d’établir l’avis d’appel public à la concurrence envoyé à la publication au Journal officiel de l’Union européenne conformément au formulaire standard pour les avis de marché, annexé au règlement (CE) n° 1564/2005 du 7 septembre 2005. [3].

Les acheteurs publics peuvent renseigner alternativement la rubrique VI-4-2, Introduction des recours, ou VI-4-3 Service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l’introduction des recours, du formulaire standard de l’avis d’appel public à concurrence.

Commet une erreur de droit le juge des référés qui considère qu’un acheteur public ayant porté à la rubrique VI-4-2 au lieu de la rubrique VI-4-3 le renseignement relatif au service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l’introduction des recours, aurait alors dû indiquer à cette même rubrique VI-4-2 l’existence d’un référé précontractuel pouvant être introduit dès le début de la procédure. En effet une des informations alternatives exigées avait été portée au point 4 de la section VI du formulaire standard, relative à l’introduction des recours, sans que l’erreur matérielle résultant d’une mention à la rubrique VI-4-2 au lieu de VI-4-3 ait été de nature induire en erreur les candidats.

Le juge des référés a commis une seconde erreur de droit en ne recherchant pas si le manquement allégué par la société requérante avait été de nature à la léser ou susceptible de la léser.

Conseil d’État, 19 juin 2009, N° 321844


Election - Signature de la liste d’émargement - Croix

"Seule la signature personnelle, à l’encre, d’un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d’impossibilité dûment reportée sur la liste d’émargement.

"Ainsi, la constatation d’un vote par l’apposition, sur la liste d’émargement, soit d’une croix, soit d’une signature qui présente des différences manifestes entre les deux tours de scrutin sans qu’il soit fait mention d’un vote par procuration, ne peut être regardée comme garantissant l’authenticité de ce vote".

Conseil d’État, 19 juin 2009, N° 322426

[1Photo : © Gary Blakeley

[2fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées en service

[3Ce formulaire comporte notamment les rubriques VI.4.1) Instance chargée des procédures de recours..., VI.4.2) Introduction des recours (veuillez remplir la rubrique VI.4.2 OU, au besoin, la rubrique VI.4.3)/ Précisions concernant le(s) délais d’introduction des recours : ... et la rubrique VI.4.3 Service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l’introduction des recours : ... ;