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Aide sociale à l’enfance - Mineur isolé sans abri - Référé liberté - Obligations à la charge du département

Publié le 31 mars 2017

Le juge des référés peut-il enjoindre à un département de proposer à un mineur isolé sans abri, confié au service de l’aide sociale à l’enfance, une solution d’hébergement incluant le logement et la prise en charge de ses besoins alimentaires quotidiens ?

Oui : il incombe aux autorités du département, le cas échéant dans les conditions prévues par la décision du juge des enfants, de prendre en charge l’hébergement et de pourvoir aux besoins des mineurs confiés au service de l’aide sociale à l’enfance. A cet égard, une obligation particulière pèse sur ces autorités lorsqu’un mineur privé de la protection de sa famille est sans abri et que sa santé, sa sécurité ou sa moralité est en danger. Lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour le mineur intéressé, une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette mission porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

L’intervention du juge des référés dans les conditions d’urgence particulière prévues par l’article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonnée au constat que la situation litigieuse permet de prendre utilement et à très bref délai les mesures de sauvegarde nécessaires. Il incombe, dès lors, au juge des référés d’apprécier, dans chaque cas, en tenant compte des moyens dont l’administration départementale dispose ainsi que de la situation du mineur intéressé, quelles sont les mesures qui peuvent être utilement ordonnées sur le fondement de l’article L. 521-2 et qui, compte tenu de l’urgence, peuvent revêtir toutes modalités provisoires de nature à faire cesser l’atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale, dans l’attente d’un accueil du mineur dans un établissement ou un service autorisé, un lieu de vie et d’accueil ou une famille d’accueil si celui-ci n’est pas matériellement possible à très bref délai.

En l’espèce le mineur avait trouvé refuge dans un jardin public, dans lequel un campement s’est progressivement installé depuis l’été 2015, où vivent plusieurs dizaines de mineurs isolés étrangers, sous des tentes mises à leur disposition par une association, sans accès à l’eau potable. A défaut de prise en charge effective par le département l’intéressé se trouvait ainsi dans une situation de précarité et de vulnérabilité extrêmes, vivant avec d’autres mineurs isolés étrangers dans un parc public, dans des conditions insalubres.
Si le juge reconnaît que le département a consenti des efforts importants pour la prise en charge des mineurs isolés étrangers, en nombre croissant, il ne résulte toutefois pas de l’instruction qu’aucune solution ne pourrait être trouvée pour mettre à l’abri l’intéressé et assurer ses besoins quotidiens dans l’attente d’une prise en charge plus durable conformément aux prévisions du code de l’action sociale et des familles. Il ne résulte pas non plus de l’instruction que le mineur aurait, par son attitude, fait obstacle à sa mise à l’abri ou à son hébergement par le département.

C’est ainsi à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif a enjoint au département de proposer au mineur, dans un délai de trois jours, une solution d’hébergement incluant le logement et la prise en charge de ses besoins alimentaires quotidiens.

Conseil d’État, 27 juillet 2016, N° 400055