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La jurisprudence de la semaine du 22 au 26 février 2016

Dernière mise à jour le 02/06/2016

Fiscalité et finances publiques / Marchés publics et contrats / Urbanisme

Fiscalité et finances publiques

 La location d’un logement meublé à un étudiant s’apparente-t-elle à une location saisonnière pour le paiement de la taxe d’habitation ?

Non : dans le cadre d’un tel bail, le locataire étudiant qui occupe le logement au 1er janvier en a la disposition, au sens de l’article 1408 du code général des impôts. C’est donc l’étudiant et non le propriétaire du logement qui est redevable de la taxe d’habitation. Il résulte des articles 1407, 1408 et 1415 du code général des impôts qu’est en principe redevable de la taxe d’habitation le locataire d’un local imposable au 1er janvier de l’année d’imposition. Par dérogation à ce principe, lorsqu’un logement meublé fait l’objet de locations saisonnières, le propriétaire du bien est redevable de la taxe d’habitation dès lors qu’au 1er janvier de l’année de l’imposition, il souhaite en conserver la disposition ou la jouissance une partie de l’année. Tel n’est pas le ce cas de la location d’un logement meublé à un étudiant consentie pour au moins neuf mois continus et à titre de résidence principale.

Conseil d’État, 26 février 2016, N° 389438

Marchés publics et contrats

 Entente frauduleuse dans un marché public : la collectivité victime peut-elle engager un référé-provision en réparation de son préjudice ?

Oui. En principe une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu’elle a le pouvoir de prendre. En particulier, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l’encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement le juge administratif d’une demande tendant au recouvrement de leur créance. Toutefois, lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d’émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge administratif d’une demande tendant à son recouvrement, notamment dans le cadre d’un référé-provision engagé sur le fondement de l’article R. 541-1 du code de justice administrative. Une collectivité, victime d’une entente frauduleuse de la part d’une entreprise attributaire d’un marché public, peut ainsi engager un référé-provision devant le juge administratif pour obtenir réparation de son préjudice ( évalué à un près d’un millions d’euros en l’espèce). Une telle action trouve en effet son origine dans le contrat même si elle tend à l’engagement de la responsabilité quasi-délictuelle (et non pas contractuelle) de l’entreprise.

Conseil d’État, 24 février 2016, N° 395194

 Le pouvoir adjudicateur peut-il rejeter une offre comme étant irrégulière au seul motif qu’il ne dispose pas des documents attestant que le signataire de l’acte d’engagement est habilité à représenter l’entreprise candidate ?

Non : il résulte de l’article 45 du code des marchés publics (CMP) que la production des documents relatifs aux pouvoirs des personnes habilitées à engager un candidat est exigible au stade de l’examen des candidatures. Une offre ne saurait donc être regardée, par elle-même, comme irrégulière, au seul motif que le pouvoir adjudicateur ne dispose pas des documents attestant que le signataire de l’acte d’engagement est habilité à représenter l’entreprise candidate. Si l’acheteur à un doute sur la capacité du signataire à engager le candidat, il peut solliciter la production des documents justifiant de cette capacité. A défaut de procéder à ces vérifications, l’acheteur ne peut ensuite invoquer l’irrégularité de l’offre de la société pour faire échec à un référé contractuel.

Conseil d’Etat, 24 février 2016, N° 394945


Urbanisme

Des élus, membres d’une association de riverains opposée à l’implantation de certaines activités (ici une centrale d’enrobage) sur le territoire de la commune, peuvent-ils délibérer sur une modification du plan local d’urbanisme (PLU) ayant pour objet de restreindre ces activités ?

Oui dans la mesure où ces élus n’ont pas influencé le conseil municipal pour des motifs d’intérêt personnel. Selon les termes de l’article L.2131-11 du CGCT, "sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l’affaire qui en fait l’objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires". Le Conseil d’Etat, confirmant la décision des juges d’appel, considère que cet article n’interdit pas, par principe, à des conseillers municipaux membres d’une association d’opinion opposée à l’implantation de certaines activités sur le territoire de la commune de délibérer sur une modification du plan local d’urbanisme ayant pour objet de restreindre ces activités [1].

Conseil d’Etat, 22 février 2016, N° 367901

 Les règles de distance imposées pour l’implantation d’un bâtiment agricole s’appliquent-elles réciproquement à un projet de construction à proximité d’un tel bâtiment existant ?

Oui : il résulte de l’article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime que les règles de distance imposées, par rapport notamment aux habitations existantes, à l’implantation d’un bâtiment agricole en vertu, en particulier, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement sont également applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité d’un tel bâtiment agricole. Il appartient ainsi à l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d’habitation de vérifier le respect des dispositions législatives ou réglementaires fixant de telles règles de distance.

Conseil d’État, 24 février 2016, N° 380556

Un mur destiné à soutenir une voie publique constitue-t-il un ouvrage public alors qu’il est implanté sur un terrain privé et qu’il a été surélevé dans le cadre de travaux privés ?

Oui, un mur destiné à soutenir une voie publique, qui passe en surplomb du terrain privé d’une société, constitue l’accessoire de la voie publique et présente le caractère d’un ouvrage public, alors même qu’il serait implanté dans sa totalité sur le terrain privé de la société. Est sans incidence sur cette qualification la circonstance que ce mur ait fait l’objet d’une surélévation, à la demande, aux frais et sous le contrôle de la société, dans le cadre de travaux privés. En revanche, les travaux réalisés sur le mur par la société requérante [2] ont contribué à créer les désordres apparus sur le mur qui ne peut résister à la poussée des terres et bascule par le haut. Cette faute de la victime est de nature à exonérer la commune de toute responsabilité liée à l’ouvrage public.

Conseil d’Etat, 26 février 2016, N° 389258

[1Il s’agissait en l’espèce d’une centrale d’enrobage à chaud et d’une installation de recyclage de déblais de terrassement.

[2Surélévation du mur d’une hauteur d’un mètre.