Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

La jurisprudence de la semaine du 30 novembre au 4 décembre 2015

Dernière mise à jour le : 10/03/2016

Atteintes à l’honneur / Elections / Hygiène et sécurité au travail

Atteintes à l’honneur

 Le maire qui souhaite poursuivre l’auteur d’articles diffamatoires sur un blog pour des faits liés à l’exercice de son mandat doit-il préalablement obtenir l’autorisation du conseil municipal ?

Non : selon le dernier alinéa de l’article 48 de la loi du 29 juillet 1881, en cas de diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public, la poursuite peut être exercée à la requête de la partie lésée, sans qu’il soit besoin d’une délibération ou d’un mandat du corps auquel elle appartient pour agir. En l’espèce un maire avait fait citer devant le tribunal correctionnel un blogueur lui ayant imputé des comportements frauduleux et des pratiques occultes dans la gestion de la commune.
Les juges du fond avaient jugé irrecevable la constitution de partie civile au motif que la citation mentionnait que le plaignant agissait en sa qualité de maire de la commune, et était domicilié à la mairie. Les juges en déduisait que c’est en sa qualité de représentant de la commune qu’il avait saisi le tribunal, et qu’en l’absence de délégation de pouvoir du conseil municipal pour agir en justice, son action n’était donc pas recevable. La Cour de cassation censure une telle position : l’acte initial de la poursuite qualifiait bien les faits de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public et ne mentionnait la qualité de maire du plaignant à seule fin de justifier la qualification retenue dans la poursuite. Cette action n’était donc pas intentée au nom de la commune, et n’était pas subordonnée à une délibération ou un mandat du conseil municipal.

Cour de cassation, chambre criminelle, 1 décembre 2015,
N° 14-86516

Elections

 Un maire candidat à l’élection cantonale, peut-il pendant la campagne électorale, relayer sur les réseaux sociaux (ici sur son compte Twitter) les manifestations auxquelles il prend part en sa qualité d’élu local (ici visite d’une maison de retraite) ?

Oui dès lors qu’une telle communication n’altère pas la sincérité du scrutin. Cet élément est apprécié au cas par cas par le juge de l’élection saisi d’un recours. En l’espèce un maire, candidat aux départementales, avait relayé la veille du scrutin, sa visite d’une maison de retraite au cours de laquelle il avait remis un bouquet de fleurs à une pensionnaire centenaire, ancienne enseignante ayant effectué l’intégralité de sa carrière dans sa commune. Cet élément est jugé, en l’espèce, insuffisant pour altérer la sincérité du scrutin largement emporté par l’élu (70% des suffrages exprimés).

Conseil d’État, 2 décembre 2015, N° 393907

Hygiène et sécurité au travail

 Un conducteur de travaux peut-il être déclaré pénalement responsable d’un accident du travail s’il n’a pas rappelé l’interdiction d’utiliser les échelles comme poste de travail ?

Oui si c’est l’utilisation de l’échelle par la victime qui est à l’origine de l’accident. Il appartient en effet à l’employeur de rappeler par une information pratique et adaptée, l’interdiction d’utiliser les échelles.
En l’espèce un salarié intérimaire mis à la disposition d’une société de travaux publics s’est sectionné un doigt lors d’une opération de nettoyage effectuée à partir d’une échelle coulissante, celle-ci s’étant brusquement rétractée. La société et le directeur de travaux, délégataire de pouvoir pour ce chantier, sont condamnés du chef de blessures involontaires, respectivement à 30 000 euros et à 3 000 euros d’amende, ce que confirme la Cour de cassation. En effet :

 l’inspection du travail avait constaté, à trois reprises, que des travailleurs sur le chantier avaient détourné l’emploi de l’échelle comme poste de travail ;

 en dépit de ces alertes, le directeur des travaux, malgré ses compétences d’ingénieur, l’expérience pour la conduite des travaux et l’autorité qu’il avait sur les chefs de chantiers et le coordonnateur de travaux n’a, à aucun moment, jugé utile de rappeler, par une information pratique et adaptée, l’interdiction d’utiliser les échelles ;

 l’aveu, par la victime, de s’être saisie de l’échelle ne peut constituer une cause exonératoire.

Ainsi, en ne prenant pas de mesure permettant d’éviter l’accident, le prévenu, disposant d’une délégation de pouvoir de la société de travaux publics et cette dernière ont violé de façon manifestement délibérée l’obligation de prudence ou de sécurité prévue par les articles L. 4141-1, L. 4141-3, L. 4741-1 et R. 4323-63 du code du travail.

Cour de cassation, chambre criminelle, 1 décembre 2015, N° 14-84304