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Altercation violente à la mairie : faute personnelle du maire ?

Cour de cassation, chambre criminelle, 15 septembre 2015, N° 14-85726

Le maire peut-il être déclaré responsable sur ses deniers personnels d’une altercation violente à la mairie ?

Oui dès lors qu’il a participé personnellement à l’empoignade. Peu importe que les faits ont eu lieu à l’occasion de ses fonctions, l’élu est alors responsable sur ses deniers personnels des dommages subis par la victime. En effet les violences commises par le maire, même dans un contexte d’animosité vive entre les protagonistes, constituent un "manquement volontaire et inexcusable à des obligations d’ordre professionnel et déontologique".

Lors d’un entretien se déroulant en mairie sur un projet d’aménagement d’un port de plaisance, une altercation survient entre le maire de la commune (3600 habitants) et un huissier de justice mandaté par un associé [1] d’une SCI propriétaire d’un hôtel implanté sur une parcelle affectée par la modification du projet d’aménagement. S’en suivent des échanges de coups et une empoignade au cours de laquelle l’huissier chute et se blesse au genou.

Poursuivi pour violences volontaires aggravées, le maire est relaxé par le tribunal correctionnel. Seule la partie civile ayant relevé appel du jugement, la relaxe devient définitive. Mais dans pareille hypothèse, il revient quand même à la cour d’appel de se prononcer sur les éléments constitutifs de l’infraction : si elle ne peut plus condamner pénalement la personne poursuivie, elle peut encore en effet attribuer des dommages-intérêts au plaignant.

Sous réserve, s’agissant d’un élu ou d’un agent public, que la faute soit personnelle. En effet s’il s’agit d’une faute de service, seule la responsabilité de la collectivité peut être recherchée devant les juridictions administratives.

En somme la cour d’appel devait répondre à deux questions : les faits de violences volontaires sont-ils caractérisés ? Si oui, s’agit-t-il de la part du maire d’une faute personnelle ?

La cour d’appel répond positivement à ces deux questions et condamne l’élu à indemniser la victime tout en retenant une faute de cette dernière, conduisant à un partage de responsabilité.

L’élu soulève alors l’incompétence des juridictions judiciaires au profit des juridictions administratives, toute faute pénale n’étant pas nécessairement une faute personnelle détachable des fonctions.

La Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir retenu une faute personnelle contre l’élu, les faits commis à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, dans un contexte d’animosité entre les protagonistes, constituant un "manquement volontaire et inexcusable à des obligations d’ordre professionnel et déontologique".

Cour de cassation, chambre criminelle, 15 septembre 2015, N° 14-85726


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[1Par ailleurs conseiller municipal.

[2Photo : © Alexander Kalina