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La jurisprudence de la semaine du 22 au 26 juin 2015

Dernière mise à jour le : 21/10/2015

Elections | Hygiène et sécurité au travail | Marchés publics

Elections

 Peut-on demander au juge qui annule une élection pour fraude de désigner un président de bureau de vote de confiance pour le renouvellement des opérations électorales ?

Oui : l’article L. 118-1 du code électoral permet au juge administratif, lorsqu’il annule une élection pour fraude, de décider que la présidence d’un ou plusieurs bureaux de vote sera assurée par une personne désignée par le président du tribunal de grande instance lors de l’élection partielle consécutive à cette annulation. Le juge pouvant mettre en œuvre d’office ce pouvoir, une telle demande peut être présentée pour la première fois en appel.

Conseil d’Etat, 22 juin 2015, N° 385755

 Un maire, dont l’élection a été annulée, peut-il être déclaré démissionnaire d’office alors qu’une nouvelle élection lui a permis d’obtenir à nouveau le même mandat avant qu’il ne soit définitivement statué sur son inéligibilité ?

Oui : le recours exercé par l’élu contre l’inéligibilité prononcée par le juge de l’élection (en l’espèce pour un dépassement du compte de campagne) suspend la sanction, ce qui permet à l’intéressé de se présenter aux nouvelles élections si elles sont organisées avant que la justice administrative n’ait eu le temps de se prononcer définitivement. Mais si, au final, l’inéligibilité est confirmée par le juge, l’élu sera déclaré démissionnaire d’office. Et ce, bien que la seconde élection ne soit pas entachée d’irrégularité.

Conseil d’État, 22 juin 2015, N° 387515

Hygiène et sécurité au travail

 L’employeur peut-il déclaré pénalement responsable de l’accident subi par un stagiaire si les salariés (ou agents) chargés de l’encadrer ne connaissaient pas les missions qui pouvaient lui être confiées ?

Oui : une entreprise est ainsi condamnée pour blessures involontaires à 15000 euros d’amende, les salariés chargés de la formation du stagiaire n’ayant pas été clairement informés des tâches pouvant lui être confiées. En l’espèce un jeune stagiaire de 19 ans dans une société (qui avait conclu une convention avec l’établissement d’enseignement professionnel dans lequel il était scolarisé) a apporté son aide à deux salariés de l’entreprise occupés à charger des fermes sur le plateau d’un camion. Au cours de cette opération, une ferme en attente de chargement s’est renversée et a écrasé le stagiaire qui a subi une incapacité totale de travail de treize mois suivie de très lourdes séquelles.

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 juin 2015, N°14-80513

Marchés publics et contrats

 Le pouvoir adjudicateur peut-il imposer aux candidats la réalisation d’essais dans le cadre de la présentation de leur offre ?

Oui : pour apprécier la conformité aux règles de publicité et de mise en concurrence, il convient de rechercher, non pas si une obligation spécifique imposée par l’acheteur est expressément autorisée par une disposition du code des marchés publics, mais si elle est prohibée par une disposition du même code ou par les principes de la commande publique. En l’espèce, pour l’évaluation des offres émises par les candidats, l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) avait retenu un critère relatif à la qualité de la prestation, évalué d’une part, à partir des réponses fournies dans un formulaire technique, et d’autre part, par la réalisation d’un essai de contrôle de qualité externe et d’un rapport d’analyse établi à la suite de cet essai. Un candidat dont l’offre a été rejetée avait obtenu l’annulation de la procédure en référé pré-contractuel, le juge estimant qu’aucune disposition règlementaire n’autorisait cette pratique des essais. Le Conseil d’Etat annule cette décision, jugeant au contraire que l’obligation de réaliser des essais ne peut être qualifiée d’irrégulière dès lors qu’elle n’est pas prohibée par un texte. Cette pratique doit cependant respecter certaines précautions :

 elle ne doit pas aboutir à l’ouverture de négociations avec le candidat ni à la modification de l’offre ;

 elle ne doit pas nuire au principe de confidentialité des offres ;

 le pouvoir adjudicateur doit détailler et communiquer la méthode de notation adoptée pour l’évaluation des essais ;

 enfin, la réalisation d’essais ne doit pas nuire au principe d’égalité de traitement entre les candidats.

Conseil d’Etat, 26 juin 2015, n° 389124

 L’acheteur public dispose-t-il d’une marge d’appréciation pour estimer que la dévolution en lots séparés présente l’un des inconvénients énumérés à l’article 10 du code des marchés publics l’autorisant à recourir à un marché global ?

Oui. Ainsi, saisi d’un moyen tiré de l’irrégularité du recours à un marché global, il appartient au juge de déterminer si l’analyse à laquelle le pouvoir adjudicateur a procédé et les justifications qu’il fournit sont entachées d’appréciations erronées. Mais en prenant en compte la marge d’appréciation qui est reconnue à l’acheteur public pour estimer que la dévolution en lots séparés présente l’un des inconvénients énumérés à l’article 10. En l’espèce le juge des référés avait annulé une procédure de dialogue compétitif relatif à la gestion de kiosques reprochant à la ville d’avoir invoqué des motifs [1] qui n’étaient pas d’une gravité telle qu’ils rendent techniquement difficile l’exécution de deux contrats distincts. Le Conseil d’Etat censure cette position eu égard à la marge d’appréciation de l’acheteur, la ville pouvant légitimement craindre que la mise en œuvre par deux opérateurs distincts était susceptible d’entraîner une multiplication des conflits et à rendre ainsi l’exécution de deux contrats techniquement difficile et coûteuse. Le Conseil d’Etat rappelle par ailleurs qu’il "n’appartient pas au juge du référé précontractuel d’apprécier les mérites des candidatures".

Conseil d’État, 26 juin 2015, N° 389682


[1La ville faisait valoir que le fait de confier la gestion des kiosques et celle de l’activité des kiosquiers à un même opérateur la dispensait d’avoir à arbitrer elle-même les conflits récurrents opposant le gestionnaire des kiosques et les kiosquiers, dont les intérêts sont souvent divergents.