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La jurisprudence de la semaine du 6 au 10 octobre 2014

Fonction publique et droit social/ Marchés publics / SDIS / Urbanisme

(dernière mise à jour le 09/02/2015)

Fonction publique et droit social

 Les entraves par l’employeur (ici une association) aux attributions des institutions représentatives du personnel (IRP) sont-elles automatiquement constitutives par ricochet d’une discrimination syndicale ?

Non : la méconnaissance par l’employeur des attributions des institutions représentatives du personnel ne constitue pas en soi une discrimination syndicale au sens de l’article L. 1132-1 du code du travail.
Ainsi le salarié d’une association (licencié pour motif économique après le placement en redressement judiciaire de l’association) ne peut se contenter d’invoquer, à titre de discrimination syndicale, les entraves subies en sa double qualité de délégué du personnel et de membre du comité d’entreprise [1]. C’est à bon droit que les juges d’appel ont estimé que l’ensemble des éléments apportés par le salarié ne laissait pas présumer l’existence d’une discrimination syndicale.

Cour de cassation, chambre sociale, 8 octobre 2014, N° 13-16720

 Le changement d’affectation provisoire d’un salarié décidé dans l’attente de l’engagement d’une procédure disciplinaire constitue-t-il en soi une sanction disciplinaire ?

Pas si ce changement d’affectation provisoire a pour seul objet d’assurer la sécurité des usagers , du personnel et des tiers et qu’il n’emporte pas modification durable du contrat de travail. Une société de transports urbains peut ainsi, dans l’attente de l’engagement d’une procédure disciplinaire, retirer à un conducteur de bus son affectation après avoir constaté que celui-ci avait procédé au débridage de l’autobus qu’il conduisait afin de pouvoir dépasser la vitesse de 50 km/h.

Cour de cassation, chambre sociale, 8 octobre 2014, N° 13-13673

 Un salarié peut-il être licencié pour des faits commis à l’occasion d’un séjour organisé par l’employeur dans le but de récompenser le personnel ?

Oui dès lors que de tels faits (menaces, insultes et comportements agressifs à l’égard des collègues ou supérieurs hiérarchiques), se rattachent à la vie de l’entreprise.

Cour de cassation, chambre sociale, 8 octobre 2014, N°13-16793

 Un salarié (ou un agent) peut-il être sanctionné pour une utilisation abusive de la messagerie électronique si le dispositif de contrôle individuel de l’importance et des flux des messageries électroniques n’a pas été déclaré à la CNIL ?

Non : constituent un moyen de preuve illicite les informations collectées par un système de traitement automatisé de données personnelles avant sa déclaration à la CNIL. Il s’agit d’un moyen de preuve illicite. Encourt ainsi la cassation l’arrêt qui, pour retenir la faute d’un salarié et justifier son licenciement, se fonde uniquement sur des éléments de preuve obtenus à l’aide d’un tel système (mise en place d’un dispositif de contrôle individuel de l’importance et des flux des messageries électroniques), alors que l’illicéité d’un moyen de preuve doit entraîner son rejet des débats.

Cour de cassation, chambre sociale, 8 octobre 2014, N° 13-14991

  Intercommunalité et transfert de personnel : un fonctionnaire d’une collectivité territoriale en congé de maladie pour accident de service peut-il faire l’objet d’un transfert au sein d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) bien qu’il ne soit pas en état de reprendre son service ?

Oui : le fonctionnaire territorial affecté dans un service ou une partie de service chargé de la mise en œuvre de compétences transférées d’une commune à un établissement public de coopération intercommunale et bénéficiaire d’un congé de maladie à la date du transfert de compétences doit être regardé, pour l’application des dispositions précitées de l’article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales, comme remplissant en totalité ses fonctions dans le service ou la partie de service concerné par le transfert de compétences, nonobstant l’interruption d’activité qui résulte de son congé légal. C’est donc à l’EPCI qu’il revient de verser au fonctionnaire son traitement dans les conditions prévues par les dispositions précitées du 2° de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et, le cas échéant, de pourvoir à son reclassement en cas d’inaptitude temporaire ou définitive consécutive à l’accident de service qui a justifié le placement en congé de maladie. Peu importe donc qu’au moment du transfert de compétence, l’agent ne soit pas encore en état de reprendre son service.

Conseil d’État, 10 octobre 2014, N° 369533

Marchés publics et contrats

 Un contrat signé par le maire sans autorisation du conseil municipal peut-il engager la collectivité si l’assemblée délibérante a donné un accord implicite a posteriori à son exécution ?

Oui dès lors que le contrat a été exécuté normalement pendant plusieurs années par la commune, sans qu’elle émette d’objection, la commune ayant réglé en l’espèce toutes les notes d’honoraires présentées par son cocontractant à l’exception des dernières présentées. Le conseil municipal doit ainsi être regardé comme ayant donné son accord a posteriori à la conclusion du contrat. En conséquence, eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles, l’absence d’autorisation préalable donnée par l’assemblée délibérante à la signature du contrat par le maire, ne saurait, dans de telles circonstances, être regardée comme un vice d’une gravité telle que le contrat doive être écarté. C’est bien sur le terrain contractuel que le litige opposant les parties doit être réglé.

Conseil d’État, 8 octobre 2014, N° 370588

 Un candidat évincé d’une procédure de passation d’un marché par concours peut-il obtenir réparation bien que son offre était irrégulière si l’offre du candidat retenu était elle aussi irrégulière ?

Non, dès lors que l’offre d’un candidat irrégulièrement évincé d’une procédure de passation d’un marché par concours était irrégulière, ce candidat, de ce seul fait, ne peut être regardé comme ayant été privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché, y compris lorsque l’offre retenue était tout aussi irrégulière. Il n’est pas fondé, par conséquent, à demander réparation d’un tel préjudice.

Conseil d’Etat, 8 octobre 2014, N° 370990

SDIS

 La victime de dégâts collatéraux causés par des opérations de lutte contre l’incendie peut-elle rechercher la responsabilité du SDIS sans mise en cause préalable de la commune du lieu où est subi le dommage ?

Oui : si les communes sont civilement responsables des dommages qui résultent de l’exercice des attributions de police municipale, quel que soit le statut des agents qui y concourent, il reste que les services départementaux d’incendie et de secours, établissements publics départementaux, sont responsables des conséquences dommageables imputables à l’organisation ou au fonctionnement défectueux des services et matériels concourant à l’exercice de la mission de lutte contre les incendies. La victime peut ainsi directement actionner la responsabilité du SDIS sans mettre en cause préalablement la commune. Et ce quand bien même la responsabilité de la commune demeure susceptible d’être engagée dès lors que les dommages en cause trouvent en tout ou partie leur origine dans une faute commise par les autorités de police communales dans l’exercice de leurs attributions. Ainsi l’action engagée par un exploitant agricole en réparation de son préjudice matériel résultant de la destruction de ses cultures du fait du largage par erreur, sur sa parcelle, d’un produit retardant par un canadair doit être regardée comme tendant à la mise en jeu de la responsabilité du SDIS sur le fondement d’une organisation et d’un fonctionnement défectueux de ses services.

Cour administrative d’appel de Marseille, 10 octobre 2014, N° 12MA02492

Urbanisme

 Une commune peut-elle rechercher la responsabilité de l’Etat pour carence du comptable de la commune dans le recouvrement de la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement ?

Non : la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement (qui constitue non une imposition mais une participation que la loi autorise la commune à percevoir sur le bénéficiaire du permis de construire) est établie par la commune et non par l’Etat. Ainsi si elle est recouvrée par le comptable de la commune, lequel est un fonctionnaire de l’Etat, selon les mêmes modalités que les impôts directs, ce dernier agit, dans l’exercice de cette mission, au nom et pour le compte de la commune. En conséquence, les éventuelles fautes commises par ce comptable à l’occasion du recouvrement de cette participation ne sauraient engager la responsabilité de l’Etat. Relevons au passage que le litige portait en l’espèce sur un titre de recettes à l’encontre du représentant d’une SCI émis en... mars 1981 !

Conseil d’État, 10 octobre 2014, N° 356722


 [2]

[1L’intéressé soutenait que l’employeur s’abstenait d’organiser les réunions mensuelles de délégués du personnel, qu’il refusait de prendre en charge ses frais de déplacement et qu’en outre, l’association refusait de communiquer à l’expert-comptable du comité d’entreprise les informations nécessaires.

[2Photo : © Treenabeena