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Nuisances causées par les occupants d’une aire d’accueil de gens du voyage, la commune responsable

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 5 novembre 2013, N° 13BX01069

Une commune peut-elle être tenue responsable des nuisances imputées aux occupants d’une aire d’accueil des gens du voyage ?

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Oui, s’il est démontré une carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police. En l’espèce, en se dispensant de prendre les mesures nécessaires pour remédier à l’usage non conforme de l’aire d’accueil par ses occupants, au besoin par une mesure d’exclusion, et aux atteintes portées à l’ordre public comme à la salubrité publique, alors qu’il a été informé à plusieurs reprises de la situation, le maire a commis une faute qui engage la responsabilité de la commune.

Les riverains d’une aire d’accueil des gens du voyage se plaignent, constat d’huissier et témoignages concordants à l’appui, de nuisances qu’ils imputent aux occupants :

 dépôt de véhicules hors d’usage, de pièces détachées entassées, de nombreux matériels, dont des appareils électroménagers ;

 pratique de feux, notamment de matériaux dont la combustion provoque une nuisance olfactive pour le voisinage, ainsi qu’une pollution atmosphérique ;

 atteintes à l’environnement par de nombreux détritus et déjections affectant la salubrité des lieux ;

 blessures par arme à feu causées aux animaux domestiques.

Le maire organise une visite des lieux avec quelques élus et responsables de l’administration de la collectivité, ainsi que les services de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS). Dans leur rapport, les services de la DDASS constatent la conformité aux dispositions réglementaires des équipements disponibles sur l’aire d’accueil sans toutefois contredire l’état des lieux dressé par constat d’huissier et confirmé par de nombreux témoignages.

Reprochant au maire une défaillance dans l’exercice de son pouvoir de police, les intéressés saisissent les juridictions administratives qui condamnent la commune à leur verser 15 000 euros de dédommagement :

« en se dispensant de prendre les mesures nécessaires pour remédier à l’usage non conforme de l’aire d’accueil par ses occupants, au besoin par l’exclusion de l’aire, et aux atteintes portées à l’ordre public comme à la salubrité publique, alors qu’il a été informé à plusieurs reprises de la situation, le maire (...) a commis une faute qui engage la responsabilité de la commune ».

Pour sa défense la commune invoquait une carence des services de l’Etat qui ont commis une faute en s’abstenant de poursuivre les responsables des troubles de voisinage. Peu importe répond la cour administrative d’appel "la police municipale relevant de la compétence du maire, à la seule exception de la tranquillité publique dans les communes où la police est étatisée, par application de l’article L. 2214-4 du code général des collectivités territoriales".

Cette jurisprudence fait écho à un arrêt de la même cour administrative d’appel rendu le 1er juillet 2013 (suivre le lien proposé en fin d’article), qui, pour une réclamation portant sur des nuisances imputées aux occupants d’un campement sauvage, n’avait pas retenu la responsabilité de la commune, le maire ayant pris toutes les mesures en son pouvoir pour tenter de faire cesser les troubles à l’ordre public, et ce même si celles-ci s’étaient révélées infructueuses.

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 5 novembre 2013, N° 13BX01069

[1Photo : ©robepco