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Détermination de la collectivité débitrice de la protection fonctionnelle lorsqu’un élu cumule plusieurs mandats ou fonctions

Conseil d’État, 5 avril 2013, N° 349115

Une commune est-elle tenue d’accorder sa protection fonctionnelle à l’ancien maire qui a été condamné en sa double qualité d’élu et de président de CCAS ?

 [1]


Uniquement pour les faits qui concerne la commune à supposer que l’élu n’ait pas commis de faute personnelle. En revanche, la commune n’a pas à prendre en charge les frais de défense de l’élu pour les faits qui sont relatifs à l’exercice de ses fonctions au sein du CCAS, entité distincte de la commune. En effet lorsqu’un élu (ou un agent) exerce simultanément des fonctions dans plusieurs collectivités publiques, la collectivité publique à laquelle il incombe d’assurer sa protection fonctionnelle est celle dans laquelle il exerce les fonctions au titre desquelles il a fait l’objet de poursuites. En tout état de cause en l’espèce, la demande de l’ancien maire n’avait aucune chance de prospérer dès lors que les faits pour lesquels il a été condamné (signature de fausses attestations de bonne exécution de stages de formation pour obtenir des subventions) sont constitutifs d’une faute personnelle excluant le bénéfice de la protection fonctionnelle.

Un maire [2] et président du centre communal d’action sociale de la commune (CCAS) est condamné en novembre 2005 des chefs d’escroquerie et de faux et usage de faux. Il lui est reproché, en cette double qualité, d’avoir signé vingt-cinq attestations de bonne exécution d’un stage de formation que les stagiaires de la commune et du CCAS n’avaient en réalité pas suivi et obtenu à ce titre du centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) le versement de subventions.

Un an après sa condamnation, il demande à la nouvelle majorité municipale la prise en charge, au titre de la protection fonctionnelle, des condamnations prononcées à son encontre à raison de ces faits, ainsi que des frais exposés pour sa défense.

La commune lui oppose le caractère personnel de la faute commise, ce qu’approuvent le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel de Douai.

Le Conseil d’Etat n’y trouve rien à redire et conforte, sans surprise, la position de la commune. En effet eu égard à leur gravité, à leur caractère intentionnel et à la nature des fonctions exercées par l’intéressé, ces agissements doivent être regardés comme constitutifs d’une faute personnelle, détachable de l’exercice des fonctions de maire. Dès lors qu’aucune faute de service distincte n’a conjugué ses effets avec ceux de la faute personnelle commise par l’élu, la commune n’est pas tenue de prendre en charge, même partiellement, les frais de défense de l’élu condamné.

Rien que de très classique dans ce rappel. L’intérêt de l’arrêt se situe ailleurs. L’élu était en effet poursuivi non seulement en qualité de maire mais aussi comme président de CCAS. Or l’élu condamné demandait à la seule commune l’octroi de la protection fonctionnelle, y compris donc pour les faits concernant le CCAS. Le Conseil d’Etat approuve là aussi les juridictions du fond d’avoir considéré la requête comme étant mal dirigée :


 "lorsqu’un agent public, quel que soit le mode d’accès à ses fonctions, y compris le président élu d’un établissement public local, est mis en cause par un tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité publique dont il dépend de le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui, dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne lui est pas imputable, et de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales, sauf s’il a commis une faute personnelle" ;


 "lorsque cet agent public exerce simultanément des fonctions dans plusieurs collectivités publiques, la collectivité publique à laquelle il incombe d’assurer sa protection fonctionnelle est celle dans laquelle il exerce les fonctions au titre desquelles il a fait l’objet de condamnations civiles ou de poursuites pénales" ;

Ainsi lorsqu’un élu cumulant plusieurs casquettes au sein de différentes collectivités, est poursuivi pour des faits commis dans l’exercice de chacune de ses fonctions, il doit, à supposer qu’il n’ait pas commis de faute personnelle, solliciter la protection fonctionnelle aux différentes entités dans lesquelles il exerce ses mandats.

Conseil d’État, 5 avril 2013, N° 349115

[1Photo : © Alan Ottley

[2Commune de 6500 habitants