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Construction illégale : le maire complice ?

Cass crim 5 mai 2009 N° de pourvoi : 08-86546

Un maire peut-il être déclaré complice de construction sans permis de construire dès lors que l’autorisation qu’il a délivrée était illégale ?


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Un particulier achète une cabane située dans le périmètre d’un site classé et sur une parcelle incluse dans le domaine privé d’une commune de l’Hérault (5000 habitants).
L’administré loue la parcelle à la commune. Après avoir obtenu l’avis favorable du maire, le locataire entreprend des travaux de démolition et de reconstruction de l’ouvrage. Par la suite il étend, toujours avec l’accord du maire, la surfarce hors sol de l’étage et construit un étage.
Un inspecteur des sites dresse procès-verbal. La direction départementale de l’environnement demande en vain au maire d’ordonner l’interrruption des travaux. Deux procédures sont engagées contre le locataire et le maire : le premier est poursuivi « pour avoir effectué ces travaux sans permis de construire et sans l’autorisation spéciale prévue, pour toute modification d’un site classé, par l’article L. 341- 10 du code de l’environnement » ; le second pour complicité.

Condamnés en première instance, les deux prévenus sont relaxés par la Cour d’appel de Montpellier :

 d’une part le locataire s’est conformé « aux dispositions du contrat de bail selon lesquelles le maire était habilité à délivrer les autorisations de travaux [et] a pu croire, légitimement, qu’il s’adressait à l’autorité compétente » ;

 d’autre part, s’agissant du maire, « le bail, dont les dispositions ont été rédigées après consultation du conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement de l’Hérault, a été approuvé par une délibération du conseil municipal du 22 novembre 1989 qui n’a pas été contestée par le préfet ».

Ainsi « la préfecture a implicitement approuvé le contrat de bail permettant au maire d’autoriser les travaux litigieux » et "le maire a pu croire, légitimement, que l’Etat lui avait délégué le pouvoir d’autoriser les travaux litigieux".

Sur pourvoi du procureur général, la Cour de cassation par deux arrêts rendus le même jour (Cass crim 18 septembre 2007 n° de pourvoi 06-87759 et 06-86392) casse et annule les arrêts de relaxe dès lors que les prévenus « se sont abstenus de toute démarche auprès des services de l’Etat afin de s’assurer de la légalité de la procédure d’autorisation prévue par le contrat de bail au regard des dispositions, d’ordre public, du droit de l’urbanisme et de l’environnement ». Les magistrats d’appel auraient donc dû rechercher si l’administré et l’élu « n’avaient pas enfreint, en connaissance de cause, les prescriptions qui rendaient obligatoire, préalablement aux travaux, l’autorisation du ministre chargé des sites ou un permis de construire délivré avec l’accord de cette autorité ».

La Cour d’appel de renvoi ( CA Aix-en-Provence 9 septembre 2008) condamne en conséquence l’élu à 3000 euros d’amende ce que confirme la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre criminelle
Audience publique du mardi 5 mai 2009, N° de pourvoi : 08-86546) dès lors que le maire "ne pouvait ignorer qu’un simple courrier de sa part ne constituait ni un permis de construire ni l’autorisation exigée par l’article L. 341-10 du code de l’environnement"

[1© Patrycja Zadros