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Le fait de sanctionner différemment deux agents ayant commis la même faute ne constitue pas nécessairement une discrimination

Cour administrative d’appel de Marseille, 15 janvier 2013, N° 12MA00420

Une collectivité peut-elle, sans violer le principe d’égalité, sanctionner différemment deux agents ayant commis la même faute (ici tentative de vol de carburant dans un garage municipal) ?

 [1]


Oui tranche la cour administrative d’appel de Marseille dès lors que les intéressés se trouvent dans une situation objectivement différente, notamment au regard de leur ancienneté dans le service. Est ainsi justifiée la révocation d’un agent ayant tenté, pendant son service, de voler du carburant dans un garage municipal bien que son collègue complice n’ait fait l’objet, pour les mêmes faits, que d’une exclusion temporaire. Peu importe par ailleurs que la plainte déposée contre les agents ait été classée sans suite par le procureur de la République. En effet l’autorité de la chose jugée en matière pénale ne s’attache qu’aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l’action publique, ce qui n’est pas le cas des décisions de classements sans suite prises par le ministère public.

Des policiers municipaux surprennent deux individus s’étant introduits de nuit dans les locaux administratifs d’un garage municipal à la recherche d’une carte magnétique permettant la délivrance de carburant à la pompe. Ils sont interpellés après avoir tenté de prendre la fuite avec un véhicule contenant des bidons d’essence vides.

Les deux voleurs sont rapidement identifiés. Il s’agit de... deux agents de la communauté d’agglomération en charge de la collecte des déchets de la commune. L’un est révoqué, l’autre est temporairement exclu.

Le premier y voit là une discrimination et conteste la révocation. Ce d’autant que la plainte pour vol a finalement été classée sans suite par le procureur de la République, ce dernier estimant que les éléments de preuve ne suffisaient pas pour caractériser une tentative de vol.

Les deux arguments sont rejetés par le tribunal administratif ce que confirme la cour administrative d’appel de Marseille :

 l’intéressé en service au moment de son interpellation était affecté à un travail de collecte dans le centre ville et n’avait pas à s’introduire dans les locaux du garage municipal. Ainsi les circonstances de son interpellation constituent un faisceau d’indices de nature à prouver qu’il avait bien l’intention de voler du carburant municipal ;

 peu importe à cet égard que le procureur ait classé la plainte sans suite. En effet "l’autorité de la chose jugée en matière pénale ne s’attache qu’aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l’action publique, ce qui n’est pas le cas des décisions de classements sans suite prises par le ministère public qui ne s’opposent pas d’ailleurs à la reprise des poursuites" ;

 quant à la circonstance que l’autre agent appréhendé le même jour n’ait fait l’objet que d’une sanction disciplinaire du 3è groupe ne suffit pas à caractériser une rupture d’égalité dès lors que celui-ci "se trouvait dans une situation objectivement différente, notamment en ce qui concerne son passé professionnel [2] dans les services communaux".

Ainsi si, comme le rappelle la cour administrative d’appel, l’obligation de désintéressement et de probité s’impose à tout fonctionnaire, la sanction d’une telle violation peut être modulée en fonction de différences objectives de situations entre les agents fautifs, compte-tenu notamment de leur ancienneté respective.

Cour administrative d’appel de Marseille, 15 janvier 2013, N° 12MA00420

[1Photo : © Paolo Omero

[2La formulation semble indiquer implicitement que l’agent le moins lourdement sanctionné était celui qui avait le plus d’ancienneté mais l’arrêt n’est pas explicite sur ce point.