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Abandon de poste : principes et exceptions

Conseil d’Etat, 10 octobre 2007, n°271020

L’envoi tardif d’un certificat médical prolongeant un arrêt de travail peut-il être sanctionné par une radiation des cadres pour abandon de poste ?

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A l’issue d’un congé maladie consécutif au décès de son épouse, un fonctionnaire ne se représente pas à son poste au jour fixé pour sa reprise de travail. Son administration le met en demeure de reprendre ses fonctions sous cinq jours, faute de quoi il serait réputé en situation d’abandon de poste.

Affecté par sa situation personnelle, ce n’est que quatre jours après l’échéance fixée que le fonctionnaire fait parvenir à sa collectivité deux nouveaux certificats médicaux prolongeant son arrêt de travail initial.
Trop tard lui répond son employeur qui prononce sa radiation des cadres pour abandon de poste !

Le tribunal administratif, puis la Cour administrative d’appel de Paris annulent la radiation des cadres et ordonnent la réintégration de l’agent. En effet, la circonstance que le fonctionnaire ait adressé à son employeur les deux nouveaux certificats médicaux devait être regardée comme manifestant l’intention de l’intéressé de ne pas rompre le lien existant entre eux. Peu importe dans ce cas que les certificats aient été adressés postérieurement à la date limite de reprise de travail fixée par la lettre de mise en demeure.

Tel n’est pas l’avis du Conseil d’Etat : il appartenait au fonctionnaire "de prendre toutes les dispositions utiles afin de faire connaître à son administration avant la date limite fixée par la mise en demeure, les motifs qui le conduisaient à ne pas pouvoir reprendre son poste à cette date".

Or en l’espèce, poursuivent les magistrats, il n’est "fait état d’aucune circonstance ayant fait obstacle à la communication dans le délai fixé des certificats médicaux".

Le conseil d’Etat juge néanmoins l’attitude de l’administration équivoque. En effet le lendemain de la mise en demeure, l’agent recevait un autre courrier de son administration "lui indiquant que toute absence injustifiée pouvait entraîner la suspension immédiate de son traitement et l’invitant afin d’éviter l’application de ces mesures à bien vouloir lui fournir la justification de [son] absence".

Pour les magistrats "la quasi-concomitance de ces courriers a pu mettre le fonctionnaire dans l’incertitude quant aux intentions réelles de l’administration à son égard et, par suite, quant aux démarches qu’il avait à suivre".

Et de conclure "que, dans les circonstances de l’espèce, et compte tenu de la situation personnelle du fonctionnaire, affecté par le décès de son épouse, l’abandon de poste n’était pas caractérisé".

Conseil d’Etat, 10 octobre 2007, n°271020

[1Photo : © Herreneck