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Marchés publics de travaux : pénalités de retard oubliées, décompte rectificatif prohibé

Cour administrative d’appel de Lyon, 12 juillet 2012, N° 11LY00924

Une collectivité peut-elle profiter des réserves émises par une entreprise sur le décompte général pour demander, dans un décompte rectificatif, le paiement de pénalités de retard initialement négligées ?

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Non : les éléments du décompte signé sur lesquels les réserves de l’entreprise ne portaient pas ont acquis un caractère définitif et intangible, faisant obstacle à la notification postérieure d’un nouveau décompte comportant la mise en œuvre pour la première fois d’une clause de pénalités de retard. L’entreprise n’a pas à faire les frais de la négligence de la collectivité qui a oublié d’appliquer la clause de pénalités de retard insérée dans les stipulations contractuelles : "cette circonstance ne constitue ni une erreur matérielle, ni une omission ni un faux ou double emploi de nature a permettre une révision des décomptes en application de l’article 1269 du code de procédure civile".

En juillet 2005, une communauté de communes confie à un groupement d’entreprises solidaires la construction d’un barrage. Les travaux sont réceptionnés le 24 mai 2007.

L’entreprise mandataire du groupement signe le décompte général mais émet des réserves en présentant un mémoire en réclamation pour obtenir le paiement de près de 60 000 euros de prestations supplémentaires.

Huit mois plus tard, à la suite des observations émises par le trésorier principal, la communauté de communes établit un nouveau décompte général, mentionnant à titre rectificatif des pénalités de retard à hauteur de 98 248,03 euros...

L’entreprise de travaux publics refuse de signer ce nouveau décompte et réitère sa demande de rémunération complémentaire.

Le tribunal administratif de Lyon fait partiellement droit aux demandes de l’entreprise : il annule le titre de recettes émis pour le recouvrement des pénalités de retard et condamne la communauté de communes à verser au groupement d’entreprises une somme de 31 815,75 euros toutes taxes comprises au titre des prestations supplémentaires.

La Cour administrative d’appel de Lyon confirme le jugement :

 le groupement ayant approuvé partiellement le décompte général du marché, signé par le maître de l’ouvrage et émis des réserves limitées à la prise en compte de quantités supplémentaires, "les éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portaient pas ont acquis à cette date un caractère définitif et intangible, faisant obstacle à la notification postérieure d’un nouveau décompte comportant la mise en œuvre pour la première fois d’une clause de pénalités de retard" ;


 si, par suite de la négligence de la communauté de communes, la clause de pénalités de retard insérée dans les stipulations contractuelles n’a pas reçu application, "cette circonstance ne constitue ni une erreur matérielle, ni une omission ni un faux ou double emploi de nature a permettre une révision des décomptes en application de l’article 1269 du code de procédure civile" ;


 dès lors "les éléments du décompte général non objet de réserves ne pouvaient être révisés et des pénalités de retard ne pouvaient être intégrées dans le décompte général rectificatif adressé le 18 mars 2008".

Cour administrative d’appel de Lyon, 12 juillet 2012, N° 11LY00924

[1Photo : © Rob Byron