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La jurisprudence pénale des acteurs de la vie territoriale et associative - Mai 2012

Retrouvez les décisions de la justice pénale recensées par l’Observatoire relatives à la responsabilité pénale des élus locaux, des fonctionnaires territoriaux et des responsables associatifs.

(dernière mise à jour le 15/07/2016)

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Tribunal correctionnel d’Alès, 4 mai 2012

Le tribunal constate la nullité des poursuites dirigées contre un maire (ville de 40 000 habitants) des chefs d’injures et de diffamation. Au cours de l’inauguration d’une pépinière d’entreprise le maire avait pris à partie des représentants syndicaux les traitant notamment de "morpions de la misère". L’élu obtient l’annulation de la citation dirigée à son encontre, dès lors que deux qualifications différentes (diffamation et injures) ont été retenues pour un seul et même propos.

Cour de cassation, chambre criminelle, 3 mai 2012, n° 11-81203

Confirmation du non lieu rendu au profit d’un maire et d’une commune (100 habitants) poursuivis des chefs de concussion, faux en écriture publique et usage, faux et usage, et d’établissement d’une attestation faisant état de faits matériellement inexacts et usage. Il leur était reproché d’avoir laissé des exploitants occuper gratuitement et sans paiement du loyer dû, des terres agricoles de section de la commune. La responsabilité pénale de la commune est écartée dans la mesure où la responsabilité pénale d’une collectivité ne peut être engagée que s’agissant des activités susceptibles de délégation de service public. Or les biens sectionnaux qui font partie du domaine privé de la commune ne sont pas exploités dans un but d’intérêt général mais dans l’intérêt particulier des ayants droit qui en perçoivent les revenus, et ne sont pas affectés soit à l’usage du public soit à un service public. Leur gestion, qui doit être assurée par une commission syndicale ou la commune elle-même, n’est pas délégable, de sorte que les biens sectionnaux ne sauraient être considérés comme un service public délégable par convention. Quant au maire, il n’est pas établi pas établi qu’il aurait de son propre chef et de manière intentionnelle dispensé les agriculteurs d’acquitter les loyers ou indemnités d’occupations pour les terres agricoles dont ils étaient attributaires, ce d’autant que ces loyers ou indemnités d’occupation ont été payés immédiatement après l’émission dans les délais légaux du titre de recette.

Cour d’appel de Grenoble, 4 mai 2012

La cour d’appel annule la condamnation d’un conseiller général poursuivi du chef de prise illégale d’intérêts sur plaintes avec constitution de partie civile d’un maire du département et d’une association promouvant la transparence de la vie politique. Les parties civiles reprochaient à l’élu d’avoir participé au vote d’une subvention agricole de 11 000 euros, dont il a bénéficié au titre de son activité agricole. La cour rappelle que seules les victimes directes peuvent se constituer partie civile. Ainsi en l’espèce, il appartenait au conseil général d’exercer une action (rappelons qu’en cas d’inertie, un contribuable de la collectivité peut se faire autoriser à agir au nom de celle-ci par le tribunal administratif). En première instance l’élu avait été condamné à une amende de 10 000 euros.

Cour d’appel de Nîmes, 4 mai 2012

Condamnation de deux élus d’une ville 6500 habitants du chef d’homicide involontaire à la suite du décès d’une personne âgée lors d’une manifestation taurine. Elle s’était retrouvée seule face au taureau sans pouvoir lui échapper. Il est reproché aux élus d’avoir maintenu la manifestation alors que trois véhicules stationnaient dans la rue en violation d’un arrêté interdisant un tel stationnement pour des motifs de sécurité. Les élus sont condamnés à trois mois de prison avec sursis ainsi qu’à une amende de 1000 euros pour l’un, de 500 euros pour l’autre.

Tribunal correctionnel de Tours, 7 mai 2012

Condamnation pour escroquerie de l’ancien chef d’un centre des pompiers sur plainte du SDIS. Après que des pompiers volontaires aient invoqué des oublis de certaines interventions sur leur relevé de vacations, une enquête interne avait été diligentée. Elle a permis d’établir que le prévenu avait rajouté son nom à de nombreuses reprises sur les comptes rendus d’intervention, en le substituant parfois à celui d’un autre pompier ayant participé à l’opération. Il est condamné à six mois de prison avec sursis.

Tribunal correctionnel de Caen, 9 mai 2012

Condamnation de l’ancien vice-président d’un conseil régional des chefs de faux en écriture et d’abus de confiance. L’essentiel des faits qui lui sont reprochés concernent son activité professionnelle (détournement de sommes d’argent via son activité d’avocat). Il lui est également imputé des détournements de fonds gérés par un groupement d’intérêt public chargé d’organiser une manifestation sportive (mondiaux équestres). L’ancien élu, qui a démissionné de ses mandats, est condamné à trois ans d’emprisonnement dont deux avec sursis (soit un an ferme) et à cinq ans de privation de ses droits civiques.

Tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne 9 mai 2012

Condamnation de deux cades territoriaux d’un conseil régional poursuivis pour détournement par négligence de fonds publics (article 432-16 du code pénal). Il leur est reproché d’avoir tardé à alerter le conseil régional sur des faits de détournement de fonds commis au sein la chambre régionale de métiers : cette dernière, chargée de gérer les fonds d’un dispositif d’aide à l’investissement matériel aux artisans sous forme d’avance remboursable a omis de rembourser les aides consenties (près de 400000 euros), utilisant les fonds pour recruter du personnel et augmenter les salaires. Les fonctionnaires sont condamnés à 2000 euros d’amende avec sursis. Deux anciens présidents, l’ancien trésorier et l’ancien secrétaire général de la chambre consulaire sont également condamnés.

Tribunal correctionnel de Caen 15 mai 2012

Condamnation d’un maire (commune de 90 habitants) du chef d’abus de faiblesse : profitant du crédit conféré par ses fonctions électives, il a réussi à se faire remettre 40 000 euros par une retraitée habitant dans la commune, sans tenir ses promesses de remboursement. L’élu est condamné à 10 mois de prison avec sursis.

Tribunal correctionnel de Cambrai, 15 mai 2012

Condamnation pour diffamation du maire (commune de 1300 habitants) : dans une lettre d’information communale, il accusait son prédécesseur, d’avoir fait bénéficier son fils et sa fille d’emplois fictifs à la mairie. L’élu est condamné à 1000 euros d’amende avec sursis.

Cour d’appel d’Orléans, 15 mai 2012

Condamnation du directeur d’une association du chef d’entrave à l’exercice du droit syndical sur plainte d’un délégué syndical après que son employeur lui ait refusé un aménagement de son temps de travail pour lui permettre d’exercer son mandat syndical. Le directeur de l’association est condamné à 3000 euros d’amende.

Tribunal correctionnel de Reims, 21 mai 2012

Relaxe d’un cadre territorial poursuivi pour menaces et injures sur plainte d’un représentant syndical. A l’issue d’une commission administrative paritaire ayant pour objet la baisse de notation d’un agent, le cadre se serait énervé sur la foi de certains propos attribués au délégué syndical et qui lui ont été rapportés à l’issue de la réunion à laquelle il ne participait pas. Le délégué syndical accusait notamment le cadre d’avoir proféré à son encontre des menaces de mort.

Cour d’appel de Rouen, 21 mai 2012

Condamnation d’un maire pour atteinte au secret des correspondances, pour avoir ouvert un courrier destiné à l’ancien secrétaire de mairie parvenu à son ancienne adresse à la mairie, pour l’avoir retenu et diffusé aux membres du conseil municipal. Les juges retiennent que si l’ouverture du courrier peut être due à une erreur, il n’en est pas de même de sa rétention et de la diffusion des photocopies. Dès lors, l’élément intentionnel de l’infraction est constitué. Le maire est condamné à une amende de 1000 euros avec sursis.

Tribunal correctionnel de Paris, 22 mai 2012

Condamnation du secrétaire administratif d’un centre d’action sociale du chef d’injures publiques envers quatre de ses supérieurs hiérarchiques. Le fonctionnaire est en revanche relaxé du chef de diffamation. Il est condamné à 300 euros d’amende avec sursis. Il a par ailleurs fait l’objet d’une sanction disciplinaire de révocation pour " manquement répété à l’obligation d’obéissance hiérarchique, comportement nuisible au fonctionnement du service et absence totale de service fait". La justice administrative invalide la sanction estimant qu’elle est entachée d’une erreur d’appréciation compte tenu des bons antécédents professionnels de l’intéressé (CAA de PARIS, 23 février 2016,
N° 15PA03896).

Cour d’appel de Paris, 22 mai 2012

Relaxe d’un maire (ville de 25000 habitants) poursuivie des chefs d’entrave à l’exercice du droit syndical et entrave à l’exercice des fonctions de délégué du personnel. En novembre 1999, la commune avait repris la gestion en régie directe d’un centre culturel géré par une association de droit privé, qui avait été placée en liquidation en raison de ses difficultés financières. Si la quasi-totalité des salariés de cette association a bénéficié d’une proposition d’embauche au sein de la mairie, seules une déléguée syndicale et une déléguée du personnel, n’ont pas vu leurs contrats de travail maintenus par le maire, en dépit du rejet, par l’inspection du travail, des demandes, réitérées, d’autorisation de licenciement. D’où la plainte des intéressées des chefs, notamment, d’entrave à l’exercice du droit syndical et entrave à l’exercice régulier des fonctions de délégué du personnel. Condamné en première instance à 1500 euros d’amende, le maire est relaxé en appel. En effet, à la date des faits poursuivis, l’obligation, pour une personne morale de droit public reprenant l’activité d’une association de droit privé, de poursuivre l’exécution des contrats de travail en cours, en application de l’article L. 122-12, alinéa 2, devenu L. 1224-1, du code du travail, était, compte tenu de l’état de la jurisprudence, incertaine. En effet ce n’est qu’à compter d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne intervenue le 26 septembre 2000, que la chambre sociale de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 25 juin 2002, a aligné les règles de reprise en régie directe des activités à caractère administratif sur celles à caractère industriel et commercial. Les juges en concluent à l’absence, chez le prévenu, d’élément intentionnel des délits d’entrave invoqués.

Cour de cassation, chambre criminelle, 22 mai 2012, N° 11-82416

Annulation de la condamnation du président d’une SEM poursuivi pour injures sur plainte d’un adjoint au finances du maire d’une grande ville qu’il avait qualifié de "paltoquet" et de "rat d’égout". La Cour de cassation reproche aux juges du fond de ne pas avoir constaté la prescription de l’action publique. En effet si la prescription peut être interrompue, avant l’engagement des poursuites, par des réquisitions aux fins d’enquête, selon l’alinéa 2 de l’article 65 de loi de 1881 sur la presse, c’est à la condition qu’elles articulent et qualifient les faits à raison desquels l’enquête est ordonnée.

Tribunal correctionnel de Lille, 23 mai 2012

Relaxe d’une commune poursuivie pour blessures involontaires à la suite de la chute accidentelle (11 mètres) d’un adolescent depuis les remparts de la ville. La victime reprochait à la ville l’absence de panneau de signalisation et de rambarde à l’endroit où il s’est aventuré pour assouvir des besoins naturels.

Tribunal correctionnel de Saint-Pierre 24 mai 2012

Condamnation de l’ancien maire d’une commune (6500 habitants) des chefs de prise illégale d’intérêts et de détournements de fonds. Il lui est reproché d’avoir détourné plus de 40 000 euros, avec la complicité du directeur général des services (DGS), le trésorier et le président du comité des fêtes, l’argent de l’association pour financer des frais - essentiellement de bouche - municipaux. C’est le nouveau maire élu en mars 2008 qui, alerté par la nouvelle présidente du comité des fêtes, a porté plainte. L’ancien édile est condamné à 8 mois de prison avec sursis et 15 000 euros d’amende, le DGS à 3 mois de prison avec sursis, le trésorier et le directeur de l’association à des peines de 3 à 5 mois de prison avec sursis.

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 24 mai 2012

Relaxe de quatre agents municipaux (commune de 35000 habitants) poursuivis du chef d’agressions sexuelles en réunion exercées contre un employé en contrat unique d’insertion dans la commune. Les prévenus ont reconnu avoir maintenu la victime de force sur une table et s’être livrés à des caresses et des baisers mais ont expliqué avoir agi par "jeu". La cour d’appel confirme la relaxe rendue en première instance, faute d’élément intentionnel, et ce malgré les réquisitions contraires du procureur de la République qui avait requis à l’encontre des prévenus des peines d’emprisonnement de six mois à un an avec sursis.

Cour d’appel de Chambéry, 24 mai 2012

Relaxe d’un maire (commune 20 000 habitants) poursuivi du chef de discrimination. Un représentant syndical de la commune accusait le maire d’avoir sanctionné ses engagements syndicaux en donnant des instructions pour que sa mère ne soit pas accueillie dans la maison de retraite municipale. L’élu était également poursuivi, en sa qualité de président de l’EHPAD, pour ne pas avoir mis à disposition un local et du matériel pour les représentants syndicaux. Condamné en première instance à 1000 euros d’amende, l’élu est relaxé en appel.

Cour d’appel de Paris, 24 mai 2012

Condamnation d’une présidente d’une association qui a diffusé sur son site la vidéo d’une interview d’un maire d’une commune étrangère appelant à la haine raciale. La prévenue est en revanche relaxée pour avoir, sur le même site, appelé au boycott des produits d’un pays dont elle critique la politique conduite par le gouvernement. Elle est condamnée à 1.000 euros d’amende avec sursis.

Tribunal correctionnel de Cambrai, 30 mai 2012

Condamnation du président d’une association d’aide à domicile pour les personnes âgées en milieu rural pour emploi de travailleurs non déclarés. Lors d’un contrôle de l’URSSAF, la directrice de l’association n’a pas été en mesure de présenter le registre du personnel. Douze salariés de l’association, depuis dissoute, n’étaient ainsi pas déclarés. Le prévenu prétend pour sa défense avoir ignorer les faits, faisant entièrement confiance à sa directrice. Argument que retient en partie le tribunal : s’il déclare le prévenu coupable, il le dispense néanmoins de peine et d’inscription au casier judiciaire.

Tribunal correctionnel de Bayonne, 31 mai 2012

Le tribunal constate la prescription de l’action publique dirigée contre le maire d’une ville (40 000 habitants) poursuivi pour diffamation sur plainte d’un président d’association. Lors d’une séance du conseil municipal, le maire avait dénoncé un harcèlement administratif (demandes incessantes de communication de pièces) dont il estimait être l’objet de la part du responsable associatif et laissé entendre que ce dernier mériterait un suivi psychiatrique.
Plus de trois mois s’étant écoulés entre la date du conseil où les propos litigieux ont été prononcés et la citation dirigée contre l’élu, le tribunal ne peut que constater l’exction des poursuites sans se prononcer sur le fond du litige.

Tribunal correctionnel de Perpignan, 31 mai 2012

Annulation de la citation directe dirigée contre l’ancien maire d’une commune de 3000 habitants poursuivie pour prise illégale d’intérêts sur plainte du nouveau maire et du conseil général. Il était reprochée à l’ex-première magistrate de ne pas avoir exercé le droit de préemption de la commune sur une parcelle d’un lotissement alors que le conseil général l’avait informée lors d’une réunion vouloir mener sur ce terrain un projet de franchissement de la voie ferrée et d’implantation d’un giratoire. Or, ladite parcelle avait ensuite été vendue par son propriétaire au fils de l’élue (poursuivi pour recel) pour un montant de 56 000 euros. Prix du terrain qui a aujourd’hui doublé surenchérissant ainsi le coût des travaux projetés par le conseil général. Le tribunal déclare nulle la citation directe, faute pour cette dernière d’indiquer la date des faits reprochés à la prévenue et ne permettant pas ainsi à la défense d’exercer pleinement ses droits (notamment au regard des règles relatives à la prescription). Le jugement ne met pas pour autant un terme définitif à la procédure, le parquet pouvant régulariser une nouvelle citation conforme aux exigences du tribunal.

Tribunal correctionnel de Metz, XX mai 2012

Condamnation d’un éducateur d’un centre départemental de l’enfance géré par un conseil général du chef de corruption de mineure. Une adolescente du centre a révélé qu’il lui avait demandé de fuguer à trois reprises du centre pour le retrouver dans un hôtel et avoir une relation sexuelle avec consommation préalable d’alcool et de cannabis. L’éducateur est condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis, dix ans d’interdiction de travailler dans le milieu de l’enfance et inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles. Une autre adolescente a depuis révélé avoir été victime des mêmes agissements.

Cour d’appel de Riom, XX Mai 2012

Condamnation d’un maire (commune de 500 habitants) poursuivi du chef d’injures publiques sur plainte de conseillers municipaux à la suite de la parution d’un article dans le journal municipal dans lequel il les qualifiait de « traîtres », « d’hypocrites », de « casseurs » et « d’ayatollahs ». Relaxé en première instance le maire est condamné en appel à une peine d’amende avec sursis ainsi qu’à verser 1 euro symbolique de dommages-intérêts aux plaignants.


Avertissements

Les jugements et arrêts recensés ne sont pas tous définitifs. Ils peuvent donc être infirmés en appel ou annulés en cassation. Jusqu’à l’expiration des voies de recours, les élus et les fonctionnaires condamnés bénéficient donc toujours de la présomption d’innocence.

Par respect pour ce principe, l’Observatoire SMACL des risques de la vie territoriale a volontairement occulté les noms des prévenus et des parties civiles.

Vous pouvez nous aider à consolider notre base d’observation en nous transmettant (observatoire@smacl.fr) les références de décision de justice ou d’article de presse relatives à des mises en cause pénales d’élus locaux, de fonctionnaires territoriaux ou de collectivités territoriales.

[1Photo : © Ene