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Salles communales : de l’intérêt d’adopter un règlement intérieur

CAA Bordeaux 13 février 2007 N° 04BX00662 Inédit au Recueil Lebon

L’absence de règlement intérieur prescrivant aux usagers d’une salle communale des mesures de nature à limiter les nuisances sonores peut-il être constitutif d’une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ?


Les voisins d’un boulodrome d’une commune charentaise (600 habitants), incommodés par le bruit, recherchent la responsabilité de la collectivité. A l’appui de leur demande de plus de 150 000 euros de dommages-intérêts (!), ils font observer que le complexe sportif est fréquemment utilisé comme salle des fêtes ce qui leur occasionne un trouble de jouissance et les a contraint à effectuer des travaux dans leur maison d’habitation (changement des boiseries extérieures et installation d’une climatisation faute de pouvoir dormir les fenêtres ouvertes).
Ils se plaignent également des bruits occasionnés par la circulation sur le parking et par les coups de Klaxon intempestifs.

Outre une réparation de leur préjudice, les requérants sollicitent la fermeture du complexe dans l’attente d’une réglementation assurant son utilisation conforme à sa destination initiale. Après avoir écarté l’action des requérants fondée sur le régime de la responsabilité sans faute au titre des dommages permanents de travaux publics, la Cour administrative d’appel de Bordeaux retient la responsabilité de la collectivité pour défaillance dans l’exercice du pouvoir de police du maire (l’article L2212-2 du code général des collectivités territoriales disposant que la police municipale comprend notamment le soin de réprimer "les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique").

Plusieurs carences sont relevées :

1° Absence de règlement intérieur d’utilisation de la salle des fêtes. En effet, ce n’est qu’après la plainte du couple que la mairie a adopté un règlement interdisant tout amplificateur de son sauf dérogation exceptionnelle jusqu’à 20 heures ;

2° Absence d’étude d’impact des nuisances sonores ;

3° Insuffisance de l’isolation acoustique.

Et les magistrats de conclure que le maire "a laissé se dérouler sans contrôle, en 2002, des manifestations ayant produit des nuisances sonores sensiblement supérieures aux seuils précisés par les articles R. 48-1 à R. 48-5 du code de la santé publique dans sa rédaction alors en vigueur".

En revanche les magistrats écartent la responsabilité de la commune en ce qui concerne l’utilisation du boulodrome et du parking voisin du complexe. En effet "les comportements d’ordre privé des personnes stationnant à proximité des équipements culturels de la commune, caractérisés notamment par des coups d’avertisseur intempestifs, n’étaient pas connus antérieurement aux opérations d’expertise" et n’ont pas perduré.

Le montant du préjudice subi par le couple est évalué à 1 500 euros très loin des 150 000 euros demandés. En effet le préjudice indemnisable ne saurait être regardé comme permanent et excessif alors que la commune a depuis adopté un règlement intérieur limitant les nuisances sonores. Il serait abusif, dans ces conditions, de mettre à la charge de la commune le "coût de remplacement des menuiseries extérieures de la maison d’habitation des requérants et de l’installation d’une ventilation mécanisée".