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Harcèlement sexuel : une forme de corruption ?

Cass crim 24 janvier 2007 n° de pourvoi 06-84429, Inédit.

L’obtention de relations sexuelles en échange de l’attribution d’un logement social peut-il tomber sous le coup de l’article 432-11 du code pénal réprimant la corruption passive et le trafic d’influence ?


Un conseiller général, par ailleurs président d’un office public de logement social, profite de la situation de précarité de deux jeunes femmes pour obtenir des relations sexuelles en échange de l’attribution d’un logement et de l’obtention d’un titre de séjour. Poursuivi pour trafic d’influence et harcèlement sexuel, l’élu est cité directement devant le Tribunal correctionnel de Saint-Etienne (TGI Saint-Etienne 14 décembre 2005) qui le condamne à 24 mois d’emprisonnement, dont 6 mois fermes, et à une inéligibilité pendant cinq ans.

Au civil, l’élu est condamné à verser 5 000 euros de dommages-intérêts à chacune des plaignantes. La Cour d’appel de Lyon (CA Lyon 9 mai 2006 n°06/00061) confirme la condamnation. Il ressort en effet de l’enquête que l’élu est intervenu directement auprès de l’office dont il était président et de l’ANEF (association financée par le Conseil général), pour l’attribution d’un logement aux deux jeunes femmes, ainsi qu’auprès du directeur de cabinet du préfet pour l’obtention d’un titre de séjour. Dans ces conditions, l’élu peut d’autant moins invoquer "des relations amoureuses librement consenties de part et d’autre" "qu’il a entretenu simultanément des relations avec l’une et l’autre". Peu importe "que les deux intéressées aient pu légitimement prétendre aux décisions favorables dont elles ont bénéficié".

Et les magistrats de conclure qu’il résulte de l’ensemble des éléments du dossier que l’élu "a directement sollicité et agrée sans droit des relations sexuelles avec [les plaignantes], ces relations, dépourvues de tout caractère affectif, s’analysant en avantages au sens de l’article 432-11 du code pénal". En répression, l’élu est condamné à deux ans d’emprisonnement avec sursis, à une amende de 10 000 euros et à une interdiction de tous ses droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans.

L’élu se pourvoit en cassation en relevant principalement qu’il ne pouvait pas être condamné cumulativement pour trafic d’influence et harcèlement sexuel. Tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui confirme sa condamnation dès lors "que les deux délits poursuivis sont fondés sur des éléments matériels distincts".