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Définition du caractère confidentiel d’un courriel professionnel

Cour de cassation, chambre criminelle, 24 mai 2011, N° 10-85184

L’envoi d’un courrier électronique à un supérieur hiérarchique, dénonçant les méthodes de management d’un cadre, peut-il constituer une diffamation si l’expéditeur n’a pas pris la précaution de porter la mention "confidentiel" dans l’objet du message ?

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Non. L’envoi d’un courriel adressé uniquement à un supérieur hiérarchique suffit à conférer au message un caractère confidentiel. Peu importe que l’expéditeur n’ait pas porté la mention "personnel" ou "confidentiel". Aucune diffamation, même non publique, ne peut être caractérisée, le destinataire du message étant tenu à une obligation de discrétion.

Une salariée d’une entreprise adresse un courrier électronique à un directeur du groupe dans lequel elle dénonce des agissements de harcèlement moral de la part de la directrice des ressources humaines. Cette dernière porte plainte pour diffamation.

La Cour d’appel de Paris déclare la salariée coupable de contravention de diffamation non publique et la condamne à 20 euros d’amende. Les magistrats relèvent en effet :

 que le courrier incriminé ne comportait aucune mention "personnel" ou "confidentiel" ;

 qu’il résulte des termes utilisés que la prévenue souhaitait que des suites soient données à ce courrier adressé à son supérieur hiérarchique, et qu’il soit diffusé à des personnes autres que le destinataire.

La Cour de cassation censure cette position par un attendu de principe :

" des imputations diffamatoires contenues dans un courrier électronique et concernant une personne autre que le destinataire ne sont susceptibles de recevoir une qualification pénale, en l’occurrence celle de diffamation non publique, que s’il est établi que ce courrier a été adressé à ce tiers dans des conditions exclusives de tout caractère confidentiel".

Or, poursuit la Cour de cassation, le courriel litigieux a été adressé directement par la prévenue à son seul supérieur hiérarchique. Cette circonstance suffit à conférer au message un caractère confidentiel. Peu importe que la prévenue n’ait pas porté la mention "personnel" ou "confidentiel" sur son message. Aucune diffamation, même non publique, ne peut donc être caractérisée.

Cour de cassation, chambre criminelle, 24 mai 2011, N° 10-85184

[1Photo : © Valerie Potapova