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Subvention à une association d’obédience maçonnique : un intérêt public local ?

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 6 janvier 2011, N° 08MA02999

Une collectivité peut-elle subventionner une association d’obédience maçonnique ?

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Uniquement si les subventions visent à financer directement des manifestations ouvertes au public, ou répondant aux besoins de la population locale. Tel n’est pas le cas de subventions affectées à la rénovation d’un bâtiment qui, de manière prépondérante, est utilisé pour le fonctionnement courant d’un centre fédérant des associations dans un cadre maçonnique.

Une ville accorde des subventions d’équipement de plus de 400 000 euros à un centre fédérant des associations d’obédience maçonnique. La commune entend ainsi participer à la rénovation d’un bâtiment qu’elle loue au centre pour un loyer symbolique dans le cadre d’un bail emphytéotique.

Une association de contribuables conteste la légalité d’une telle subvention faute d’intérêt public local.

Le tribunal administratif [2] leur donne raison et annule la délibération :

"il ne ressort pas des pièces du dossier que l’utilisation de ce bâtiment, qui n’est pas ouvert à la population, réponde aux besoins de la population, compte-tenu de son utilisation par les membres de l’association dont les conditions d’entrée ont un caractère restrictif".

Le tribunal administratif n’invoque donc pas l’interdiction de subventionnement aux associations cultuelles [3] mais bien l’absence d’intérêt public local.

La Cour administrative d’appel de Marseille confirme le jugement :

il résulte des dispositions de l’article L.2121-29 du code général des collectivités territoriales "qu’une association ne peut recevoir des subventions d’une commune que si cette intervention présente un intérêt local ;

or "les subventions en cause ne permettent pas de financer directement des manifestations ouvertes au public, ou répondant aux besoins de la population locale, mais sont affectées à la rénovation d’une structure qui, de manière prépondérante, est utilisée pour le fonctionnement courant du CCM et des associations membres, dans le cadre maçonnique."

Pour fonder son appréciation le juge prend notamment appui sur le rapport d’activité du centre. Il relève que s’il y est fait état de conférences ouvertes au public, il n’apporte pas de précisions sur leur nombre et leur ampleur. En outre si l’une des associations membres, ouverte au public, a pour ambition d’aider ses adhérents à rechercher un emploi, le rapport d’activité évoque surtout, les nombreuses réunions internes des 33 associations membres du centre.

Relevons, enfin, que l’association subventionnée invoquait un non lieu à statuer s’agissant d’une partie de la subvention estimant que celle-ci constituait le solde d’une subvention qui lui a été octroyée par une délibération adoptée l’année précédente et qui serait ainsi devenue définitive. La Cour administrative rejette le moyen dès lors que :

"la délibération attaquée, qui réinscrit une somme au budget de la commune, et a donc un caractère décisoire, ne saurait être regardée comme simplement confirmative d’une précédente délibération".

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 6 janvier 2011, N° 08MA02999

[1Photo : © Elena Elisseeva

[2TA Montpellier, 22/04/2008, N°0500363

[3Cela aurait conduit le tribunal à adopter une conception extensive de la religion.