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Ecoutes téléphoniques et pratiques anticoncurrentielles

Cour de cassation, Assemblée plénière, 7 janvier 2011, N° : 09-14316 09-14667

Peut-on produire des enregistrements vidéos ou téléphoniques clandestins pour prouver des pratiques anticoncurrentielles ?


 [1]

Non : l’enregistrement d’une communication téléphonique réalisé à l’insu de l’auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve devant le juge civil.


Une entreprise saisit l’Autorité de la concurrence [2] de pratiques qu’elle estime anticoncurrentielles sur le marché des produits d’électronique grand public. A l’appui de sa plainte elle produit des cassettes contenant des enregistrements téléphoniques mettant en cause deux entreprises concurrentes.

Les entreprises visées demandent à l’Autorité de la concurrence d’écarter ces enregistrements obtenus de manière déloyale.

La Cour d’appel de Paris écarte l’argument et sanctionne les entreprises en appliquant aux faits de l’espèce la jurisprudence de la chambre criminelle : les moyens de preuve produits par les parties ne peuvent être écartés des débats au seul motif qu’ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale. Il appartient seulement aux juges d’en apprécier la force probante après les avoir soumis à la discussion contradictoire.

La chambre commerciale, par un arrêt du 19 juin 2008, casse cette décision au visa de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, au motif que « l’enregistrement d’une
communication téléphonique réalisé par une partie à l’insu de l’auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve ».

La Cour d’appel de renvoi ayant refusé de se plier à la Cour de cassation, le débat est finalement tranché par l’Assemblée plénière :

"sauf disposition expresse contraire du code de commerce, les règles du code de procédure civile s’appliquent au contentieux des pratiques anticoncurrentielles relevant de l’Autorité de la concurrence" ;

"l’enregistrement d’une communication téléphonique réalisé à l’insu de l’auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve".

Cour de cassation, Assemblée plénière, 7 janvier 2011, N° : 09-14316 09-14667


[1Photo : © Galushko Sergey

[2Anciennement Conseil de la concurrence