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Attention, une diffamation peut en cacher une autre !

cass. crim. 16 mars 2004

Encore une question clochemerlesque : le maire a-t-il diffamé la conseillère municipale (qui conteste tout dérapage verbal) en portant plainte contre elle pour diffamation publique ?

Le 18 décembre 2000, le maire d’une commune d’Ile-de-France de 10 000 habitants décide de poursuivre en justice une conseillère municipale, à raison de propos qu’elle aurait tenus, notamment lors de la séance du conseil municipal du 29 novembre précédent.

Il est vrai que ladite conseillère n’avait sans doute pas tourné sept fois sa langue dans la bouche en
déclarant sans embages : "M. Y... est à fusiller et les secrétaires généraux sont des escrocs".

Fermez le ban !

Le maire fait état de sa décision d’ester en justice dans le procès-verbal de la séance du conseil municipal du 23 janvier 2001, lequel est publié dans les formes prévues par le Code général des collectivités territoriales.

Contestant avoir prononcé les propos litigieux, la conseillère fait alors elle même citer directement le maire devant le tribunal correctionnel de Pontoise le 26 février 2001 pour diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public. Elle obtient gain de cause en première instance mais sur appel du maire, la Cour d’appel de Versailles (arrêt du 11 juin 2003) déboute la plaignante et relaxe le maire : l’action de la plaignante est jugée "malvenue étant donné ses propres agissements". Il lui appartenait, si elle contestait les propos qui lui étaient imputés de porter plainte non pour diffamation publique mais pour dénonciation calomnieuse.

La partie civile ne se décourage pas pour autant et se pourvoit en cassation. Dans un arrêt rendu le 16 mars 2004, la Cour lui donne raison : "toute expression qui contient l’imputation d’un fait précis et déterminé, de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne visée, constitue une diffamation". La conseillère municipale pouvait donc valablement porter plainte pour diffamation publique à l’encontre du maire. La cause et les parties sont renvoyées devant la Cour d’appel de Paris pour être à nouveau jugées.