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Recrutement et insertion : la discrimination positive reste une discrimination

Cour de Cassation, chambre criminelle, 20 janvier 2004, N° 02-88375

Les mesures de discrimination positive sont-elles légales ?

En 1999, une association d’une grande ville du sud-est de la France signe avec l’Etat une convention de développement d’activités pour l’emploi des jeunes. Il est prévu la création de deux postes de travail.

Le cahier des charges annexé à ladite convention énumère "un certain nombre de critères pour repérer les deux jeunes les plus à même de mettre en oeuvre le projet". Il y est notamment précisé que l’une des deux personnes recrutées devra appartenir à une "famille issue de l’immigration". Après prospection, l’association recrute deux personnes correspondant au profil recherché.

Une autre association [1] dépose plainte pour discrimination à l’embauche sur le fondement des articles 225-1 et 225-2 du code pénal qui prohibent notamment les discriminations fondées sur "l’appartenance" ou la "non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée".

Saisie des faits, la Cour d’appel de Nîmes (arrêt du 22 avril 2002) constate que l’infraction est constituée : le texte n’établissant aucune distinction selon le mobile poursuivi, la discrimination positive tombe aussi sous le coup de la loi.

Condamnée à 200 euros d’amende avec sursis et à 1 euro de dommages-intérêts, l’association de quartier forme un pourvoi.

Elle est contrainte, compte-tenu de la rédaction des textes, de se défendre, non au fond, mais sur des motifs de procédure. Elle relève à cet égard que les juges ont statué en dehors de leur saisine : l’association était poursuivie sur le seul fondement du projet établi le 11 janvier 1999 et non sur celui de la convention signée avec le préfet, le 26 juillet 1999".

La cour de cassation lui donne raison :

"les juridictions correctionnelles ne peuvent légalement statuer que sur les faits relevés par l’ordonnance ou par la citation qui les a saisies, à moins que le prévenu n’ait accepté formellement d’être jugé sur les faits nouveaux".

Saisies du seul projet établi le 11 janvier 1999, les juridictions pénales ne pouvaient étendre leur compétence à la convention signée avec le préfet le 26 juillet 1999, quand bien même le document litigieux aurait été inclus dans le cahier des charges annexé à la dite convention. La cause et les parties sont donc renvoyées devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour qu’il soit à nouveau jugé conformément à la loi.

Cour de Cassation, chambre criminelle, 20 janvier 2004, N° 02-88375

[1"Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité chrétienne"