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Les réponses de la jurisprudence

Semaine du 12 au 16 avril 2010

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales et les associations.


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Elections

 L’obligation de déclaration à la préfecture du nom du mandataire financier constitue-t-elle une formalité substantielle ?

Oui. "L’obligation de déclaration à la préfecture du nom du mandataire financier constitue, en raison de la finalité poursuivie par les dispositions combinées des articles précités L. 52-4 du code électoral, une formalité substantielle".

Conseil d’État, 3 février 2010, N° 332458


Fonction publique et ressources humaines

 Un fonctionnaire peut-il faire l’objet d’une procédure d’abandon de poste s’il refuse de reprendre son travail après un congé maladie ordinaire alors qu’il produit un certificat médical de son psychiatre traitant indiquant qu’il n’était pas apte à reprendre son travail et que le maire n’a pas fait procéder à une contre-visite ?

Oui dès lors que le maire , s’appuyant sur les avis du comité médical départemental, qui concluaient à l’aptitude de l’agent à reprendre ses fonctions, au moins dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique, l’a mis en demeure de reprendre son poste sous peine d’être radié des cadres pour abandon de poste. L’agent ne peut se contenter, pour refuser d’obtempérer, de produire un certificat médical de son psychiatre traitant indiquant, sans plus de précisions, qu’il n’était pas apte à reprendre son travail. En effet un tel certificat n’est pas de nature à remettre en cause les appréciations concordantes sur l’aptitude médicale de l’intéressé à reprendre ses fonctions, portées par le comité médical départemental. Dans ces conditions, l’agent, qui ne justifie pas s’être trouvé dans l’impossibilité de reprendre son travail, doit être regardé comme ayant rompu le lien qui l’unissait à la commune. Le maire a ainsi pu légalement radier des cadres l’agent pour abandon de poste, et ce sans avoir à faire procéder à une contre-visite par un médecin agréé comme le prévoient les dispositions de l’article 15 du décret du 30 juillet 1987.

Cour Administrative d’Appel de Nancy, 7 janvier 2010, N° 08NC01835


 Le maire doit-il respecter une procédure contradictoire avant de prononcer la suspension d’un fonctionnaire ?

Non. "La suspension de fonctions d’un fonctionnaire et sa prolongation sont des mesures conservatoires prises dans l’intérêt du service et ne constituent pas des sanctions disciplinaires ; (...) elles ne sont pas au nombre des mesures qui doivent être précédées d’une procédure contradictoire et pour lesquelles l’agent concerné doit faire l’objet d’une convocation ou de la communication de son dossier préalablement à leur adoption".

Cour Administrative d’Appel de Nancy, 7 janvier 2010, N° 08NC01440


 Une promesse d’embauche faite par le maire à un demandeur d’emploi lie-t-elle le conseil municipal ?

Non dès lors que l’emploi n’a pas été créé au tableau des effectifs de la commune par un vote du conseil municipal. Dès lors que le conseil municipal refuse de créer l’emploi, le maire est tenu de rapporter sa décision de recruter. L’agent n’ayant pas été recruté n’a droit à aucune indemnité de licenciement. Cependant en donnant des assurances expresses à un demandeur d’emploi quant à sa nomination, le maire commet une faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Le demandeur d’emploi est fondé à demander à être indemnisé du préjudice moral résultant pour lui de la promesse non tenue.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 9 février 2010, N° 09BX01253


 Un fonctionnaire victime d’agissements de harcèlement moral peut-il obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle ?

Oui. Des agissements répétés de harcèlement moral sont de ceux qui peuvent permettre, à l’agent public qui en est l’objet, d’obtenir la protection fonctionnelle prévue par les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont les fonctionnaires et les agents publics non titulaires pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions.

Conseil d’État, 12 mars 2010, N° 308974


 Un maire peut-il invoquer l’absence de crédits disponibles pour refuser de fixer le taux individuel de prime applicable aux agents bénéficiant du régime indemnitaire ?

Non. "Le maire est tenu, lorsque le conseil municipal a institué par délibération un régime indemnitaire au profit des agents de la commune, de fixer le taux individuel de prime applicable aux agents en bénéficiant". Peu importe qu’il n’existe dans le budget de la commune aucun crédit disponible.

Conseil d’État, 17 mars 2010, N° 304759


Justice

 Le mémoire qui présente une question prioritaire de constitutionnalité soulevée à l’occasion d’un pourvoi, peut-il être déposé à tout moment ?

Non. "Lorsque la question prioritaire de constitutionnalité est soulevée à l’occasion d’un pourvoi, le mémoire qui la présente doit être déposé dans le délai d’instruction de ce pourvoi". Est ainsi jugée irrecevable une question prioritaire de constitutionnalité déposée par une commune et un département.

Cour de cassation, chambre criminelle, 19 mars 2010, N° de pourvoi : 09-81027


Marchés publics et contrats

 Un contrat d’assurance passé par un acheteur public est-il un contrat administratif ?

Oui. La loi du 11 décembre 2001 dispose en effet que les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. Il en résulte que le juge administratif est seul compétent pour connaître des litiges relatifs à l’exécution des contrats d’assurance. Seuls les litiges portés devant le juge judiciaire avant l’entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001, échappent à la compétence du juge administratif.

Conseil d’État, 31 mars 2010, N° 333627


 L’action directe d’une victime contre l’assureur d’une collectivité doit-elle être exercée devant le juge administratif ?

Oui. "Si l’action directe ouverte par l’article L. 124-3 du code des assurances à la victime d’un dommage, ou à l’assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l’assureur de l’auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle poursuit l’exécution de l’obligation de réparer qui pèse sur l’assureur en vertu du contrat d’assurance. Elle relève par suite, comme l’action en garantie exercée, le cas échéant, par l’auteur du dommage contre son assureur, de la compétence de la juridiction administrative, dès lors que le contrat d’assurance présente le caractère d’un contrat administratif et que le litige n’a pas été porté devant une juridiction judiciaire avant la date d’entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001".

Conseil d’État, 31 mars 2010, N° 333627


 Le juge administratif doit-il rechercher d’office si le sinistre à l’origine du litige est au nombre de ceux couverts par la garantie de l’assureur ?

Non. "Si aucune des parties, notamment l’assureur, ne le conteste, il n’appartient pas au juge administratif de rechercher d’office si le sinistre à l’origine du litige est au nombre de ceux couverts par la garantie de l’assureur".

Conseil d’État, 31 mars 2010, N° 333627


 Faut-il informer les candidats de la méthode de notation des offres ?

Non. "Si, pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, le pouvoir adjudicateur a l’obligation d’indiquer dans les documents de consultation les critères d’attribution du marché et leurs conditions de mise en œuvre, il n’est en revanche pas tenu d’informer les candidats de la méthode de notation des offres".

Conseil d’État, 31 mars 2010, N° 334279


Urbanisme

 Un maire peut-il refuser un raccordement provisoire au réseau d’électricité d’une caravane installée sur un terrain appartenant à des gens du voyage en raison de la situation des parcelles en zone agricole du plan local d’urbanisme de la commune ?

Non. Les dispositions du code de l’urbanisme "ne permettent au maire de s’opposer qu’au raccordement définitif au réseau de distribution d’électricité des caravanes mobiles stationnant irrégulièrement, soit au regard des articles R. 443-1 et suivants du code de l’urbanisme, soit au regard du règlement annexé au plan d’occupation des sols ou du plan local d’urbanisme, sur le territoire de la commune".

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 28 décembre 2009, N° 09BX00357


 A l’issue d’une procédure de préemption qui n’a pas abouti, le propriétaire du bien en cause peut-il obtenir réparation ?

Oui "si la décision de préemption est entachée d’illégalité". Le propriétaire peut alors "obtenir réparation du préjudice que lui a causé de façon directe et certaine cette illégalité". Lorsque le propriétaire a cédé le bien après renonciation de la collectivité, son préjudice résulte lorsque la vente initiale était suffisamment probable :

1° "de la différence entre le prix figurant dans cet acte et la valeur vénale du bien à la date de la décision de renonciation" ;

2° "de l’impossibilité dans laquelle il s’est trouvé de disposer du prix figurant dans la promesse de vente entre la date de cession prévue par cet acte et la date de vente effective, dès lors que cette dernière a eu lieu dans un délai raisonnable après la renonciation de la collectivité" (en revanche, lorsque la vente n’a pas eu lieu dans un délai raisonnable, quelles qu’en soient les raisons, le terme à prendre en compte pour l’évaluation de ce second préjudice doit être fixé à la date de la décision de renonciation).

Conseil d’État, 10 mars 2010, N° 323543

[1Photo : © treenabeena