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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 11 au 15 janvier 2010

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales et les associations (dernière mise à jour le : 07/04/2010).


 [1]

Jurisprudence européenne

 Une réglementation nationale prévoyant une limite d’age de 30 ans pour le recrutement de pompiers est-elle discriminatoire ?

Non dès lors qu’il s’agit "de garantir que les fonctionnaires de ce service puissent correctement remplir les missions qui présentent des exigences physiques particulièrement élevées, et ce pour une période raisonnablement longue".

Cour de justice de l’union européenne, 12 janvier 2010, n°C-229/08


Jurisprudence judiciaire

 Un chef de service (ou un dirigeant d’association) qui participe à l’organisation d’un repas de fin d’année alcoolisé peut-il être déclaré responsable de l’accident de circulation survenu à l’un des convives qui a bu plus que de mesure ?

Oui. Engage sa responsabilité pénale pour homicide involontaire l’enseignant qui contribue à l’organisation d’un repas de fin d’année, dans les locaux d’un établissement de formation, à l’issue duquel un étudiant est victime d’un accident de la circulation après avoir absorbé des quantités d’alcool le rendant inapte à la conduite d’un véhicule. Peu importe que les étudiants soient tous majeurs et que la quantité d’alcool prévue pour le repas ne soit pas disproportionnée par rapport aux nombres de convives.

Ayant ici pour cadre un centre de formation des apprentis, des faits similaires auraient très bien pu se produire dans une collectivité locale ou dans une association avec la même issue judiciaire pour un chef de service ou un dirigeant d’association qui aurait toléré l’organisation d’un pot avec consommation d’alcool au cours duquel un fonctionnaire ou un salarié aurait bu plus que de mesure. Rappelons que la responsabilité pénale ne pèse pas sur les seuls cadres mais que les collègues qui ont laissé la victime prendre le volant en état d’ébriété peuvent être aussi poursuivis.

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 janvier 2010, N° 09-81799


 Le propriétaire d’un mobil-home peut-il à la suite d’un sinistre, reconstruire sans autorisation, une annexe servant de cuisine ?

Non. La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir considéré qu’il ne s’agissait pas d’une remise en état mais d’une véritable reconstruction pour laquelle la prescription de l’action publique n’était pas acquise à la date du procès-verbal. Le terrain étant situé en zone non constructible au plan d’occupation des sols de la commune, en zone agricole non constructible, les prévenus ne pouvaient ignorer la réglementation applicable. En effet si le plan d’occupation des sols de la commune approuvé le 27 mars 2001 autorisait, sous certaines conditions, des travaux confortatifs d’agrandissement ou de changements des constructions existantes, il n’autorisait pas la reconstruction complète après destruction, laquelle restait soumise au permis de construire.

Cour de cassation, chambre criminelle, mardi 12 janvier 2010, N° 09-80362


 Responsabilité des élus - Prise illégale d’intérêts - Urbanisme - Préemption

Condamnation d’un maire pour prise illégale d’intérêts à une peine de 10 000 euros d’amende (dont la moitié avec sursis). Il lui est reproché d’avoir renoncé, à deux reprises, d’exercer le droit de préemption de la commune (7500 habitants) alors que, dans un cas, il s’est porté acquéreur de l’immeuble et que, dans l’autre, le bien a été acheté par une société gérée par son fils. La commune qui s’est constituée partie civile à l’audience est déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Tribunal correctionnel du Puy-en-Velay, 12 janvier 2010, n° de parquet 08000000404


 Responsabilité des dirigeants d’association - Abus de confiance

La Cour de cassation confirme la condamnation pour abus de confiance de plusieurs dirigeants d’association et d’établissements d’enseignement. Plusieurs établissements d’enseignement, dont certains connaissaient des difficultés financières, ont conclu avec un président d’associations, des accords oraux ou écrits aux termes desquels ce dernier s’engageait à leur faire octroyer, par deux organismes collecteurs sur lesquels il exerçait une influence, des versements exonératoires de taxe d’apprentissage libres d’affectation, en contrepartie d’une rétrocession aux associations précitées de 40 à 80 % des fonds ainsi perçus, sous forme du paiement de factures ou de dons. Les prévenus sont condamnés à des peines allant de 7 mois à 18 mois d’emprisonnement avec sursis.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 janvier 2010, N° 08-83216


 Responsabilité des élus - fourniture frauduleuse de document administratif et établissement de fausses attestations

La Cour de cassation confirme la relaxe d’un maire (commune de 4000 habitants) poursuivi fourniture frauduleuse de document administratif et établissement de fausses attestations sur plainte d’un exploitant de taxi. Ce dernier reprochait à l’élu d’avoir favorisé un concurrent dans l’attribution d’un nouvel emplacement de taxi.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 janvier 2010, N° 09-81862


 Responsabilité des élus - Prise illégale d’intérêts

Se rend coupable de prise d’illégale d’intérêts le maire qui attribue un marché public à une entreprise dirigée par son fils. En répression il est condamné à quatre mois de prison avec sursis.

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 13 janvier 2010.


 Un directeur général peut-il verser au dossier d’un fonctionnaire un courriel polémique dont il n’était pas destinataire ?

Oui dès lors les courriels échangés sur le lieu de travail sont présumés à caractère professionnel « sauf à ce que son contenu intéresse de manière évidente la vie privée de son auteur dans les aspects que la loi protège de manière privilégiée, à savoir la santé, le patrimoine, et la vie affective ou sexuelle ». Ainsi ne se rend pas coupable de détournement de correspondance, le directeur général qui se fait remettre un courriel polémique émis en réponse à une sollicitation pour l’expression des besoins en informatique et le fait verser au dossier du fonctionnaire. Peu importe le ton employé.

Cour d’appel de Rennes 14 janvier 2010 n°08/02209


Jurisprudence administrative

 Un piéton distrait, qui n’a pas été attentif à un "obstacle" visible sur la chaussée, peut-il rechercher la responsabilité de la collectivité qui assure l’entretien de la voie ?

Oui dès lors que la collectivité n’a pas assuré un nettoyage régulier de la voie habituellement souillée . Un EPCI est ainsi reconnu responsable de la chute d’une passante qui a glissé sur une déjection canine. La collectivité responsable de l’entretien de la voie est en effet "tenue par un nettoyage régulier d’assurer la propreté qu’exige notamment la sécurité des piétons". Or "il résulte des attestations produites au dossier (...) que cet entretien n’était pas effectif et que cet endroit était habituellement souillé".

Dans un autre arrêt, la même Cour administrative d’appel avait jugé "qu’à supposer même que ce service [de nettoyage de la voirie] ne serait pas intervenu le matin de l’accident, cette circonstance ne constituerait pas un défaut d’entretien normal de l’ouvrage, dès lors que la commune ne saurait être tenue de faire enlever à tout instant les excréments de chiens qui peuvent se trouver sur la place, alors qu’il n’est ni établi, ni même allégué que cette place serait habituellement recouverte de tels excréments".

Cour administrative d’appel de Marseille, 11 janvier 2010, n°07MA03276


 Sur quelle collectivité repose l’obligation de reclassement pour les agents déclarés inaptes en cas de transfert de personnel ?

L’obligation de reclassement (ou de licenciement en cas d’impossibilité) incombe à la collectivité qui est employeur de l’agent à la date où il a été déclaré définitivement inapte à l’exercice de ses fonctions. Un transfert de personnel postérieur à la déclaration définitive d’inaptitude est sans incidence sur l’obligation qui pèse sur la collectivité d’origine.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 12 janvier 2010, N° 09BX01325


 Le non renouvellement du détachement sur l’emploi fonctionnel d’un directeur général des services (DGS) constitue-t-il une fin de détachement au sens des dispositions de l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984 ?

Oui. Le maire d’Albi est ainsi, tenu de respecter les garanties procédurales (entretien préalable avec l’intéressée et information du conseil municipal) de l’article 53 et, dès lors que le fonctionnaire lui en a demandé le bénéfice, de faire application des dispositions de cet article relatives à l’octroi du congé spécial. A défaut la commune engage sa responsabilité [2].

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 12 janvier 2010, N° 09BX00890


 Un refus de titularisation peut-il être annulé si le stage s’est déroulé dans un contexte de harcèlement à connotation raciste ?

Oui dès lors que les griefs retenus par la commune contre le fonctionnaire stagiaire l’ont été sur la foi de témoignage qui, compte-tenu du contexte de harcèlement à connotation raciste (le service de police municipale dans lequel le requérant a effectué son stage était, durant cette période, marqué par des dysfonctionnements manifestes, en particulier une division des personnels en camps antagonistes et des comportements à connotation raciste visant directement le fonctionnaire stagiaire), manquent d’impartialité.

Conseil d’État, 13 janvier 2010, N° 314923 -


 La seconde classe d’ingénieur territorial en chef de première catégorie constitue-t-elle un grade ?

Oui. "La seconde classe d’ingénieur territorial en chef de première catégorie est un grade". Ainsi la rémunération d’un agent lors de sa titularisation ne peut excéder la limite prévue par les dispositions du décret du 18 juillet 2001, c’est-à-dire l’indice afférent au huitième et dernier échelon de cette classe.

Conseil d’État, 13 janvier 2010, N° 317997


 Une convention par laquelle une commune confie à une association l’autorisation d’occuper pour 20 ans les dépendances du domaine public communal constitue-t-elle une DSP soumise aux règles de publicité et de mise en concurrence ?

Non dès lors qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier que la ville a confié à l’association une mission de service public.

Conseil d’État, 13 janvier 2010, N° 329576


 Un syndicat peut-il se contenter d’adresser un courriel pour demander à l’administration de retirer à certains de ses membres les décharges de service ?

Oui. Ni les dispositions de l’article 16 du décret du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire "ne font obstacle à ce qu’une organisation syndicale, ayant décidé de retirer à certains de ses membres les décharges de service octroyées en application des dispositions citées ci-dessus, saisisse l’administration sous forme de courriel pour lui demander de procéder à ce retrait".

Conseil d’État, 15 janvier 2010, N° 308132

[1Photo : © Gary Blakeley

[2En l’espèce la commune est condamnée à verser au DGA plus de 60 000 euros.