Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Accident du travail dans une salle communale mise à la disposition d’une association : la faute inexcusable de l’employeur n’efface pas le défaut d’entretien normal de l’ouvrage public

Conseil d’État, 9 novembre 2015, N° 359548

Un électricien, salarié d’une association, est victime d’un accident du travail dans une salle mise à disposition par une commune. La faute inexcusable de l’association-employeur est retenue. Mais l’accident trouve aussi son origine dans un défaut d’entretien de l’équipement public. L’association-employeur peut-elle demander à la commune la prise en charge d’une partie du complément d’indemnisation dû à la victime et de la cotisation complémentaire d’accident du travail consécutive à l’accident ?

Oui sauf si l’association employeur a commis une faute délibérée d’une particulière gravité. Hormis cette hypothèse restrictive aucune disposition ne fait obstacle, "en cas de partage de responsabilité d’un accident du travail avec un tiers, à ce que l’employeur, auteur d’une faute inexcusable, ou son assureur, obtienne le remboursement par ce tiers de la fraction, correspondant à sa part de responsabilité, de la cotisation complémentaire d’accident du travail qui lui a été réclamée à la suite de l’accident en application de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, ainsi que de l’indemnisation complémentaire mentionnée à l’article L. 452-3 du même code". Ainsi en cas d’accident du travail subi par un salarié dans une salle mise à disposition par une commune à une association, en partie imputable à un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public, la collectivité peut être condamnée à prendre en charge, à proportion de sa responsabilité dans l’accident, le complément d’indemnisation dû à la victime, tout comme la cotisation complémentaire d’accident du travail réclamée à l’employeur.

Un électricien employé par un centre lyrique est victime d’un accident du travail dans une salle mise à disposition par la commune à la structure associative.

L’association et la commune sont condamnées pour blessures involontaires : la première en sa qualité d’employeur, la seconde pour avoir mis à disposition des équipements non conformes [1]. Parallèlement, la victime obtient du tribunal des affaires de sécurité sociale la condamnation du centre lyrique, son employeur, au titre de la faute inexcusable et 5000 euros de provision.

L’assureur de l’association se retourne alors contre la commune pour lui demander le paiement de la somme correspondant au montant de la provision mise à la charge de son assuré et à la garantir des condamnations qui pourraient être mises à la charge de ce dernier.

Cette action est rejetée par le tribunal administratif, ce que confirme la cour administrative d’appel :

 le complément d’indemnisation du préjudice personnel alloué au salarié victime doit demeurer exclusivement à la charge de l’employeur dont la faute, qualifiée d’inexcusable par le Tribunal des affaires de sécurité sociale, est à l’origine de l’accident ;

 ainsi le complément d’indemnisation accordé la victime ne peut être réparti entre les coauteurs des préjudices subis par cette dernière.

Sur pourvoi de l’assureur de l’association, le Conseil d’Etat annule cet arrêt :

 les dispositions du code de la sécurité sociale "ne font pas obstacle par elles-mêmes, en cas de partage de responsabilité d’un accident du travail avec un tiers, à ce que l’employeur, auteur d’une faute inexcusable, ou son assureur, obtienne le remboursement par ce tiers de la fraction, correspondant à sa part de responsabilité, de la cotisation complémentaire d’accident du travail qui lui a été réclamée à la suite de l’accident en application de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, ainsi que de l’indemnisation complémentaire mentionnée à l’article L. 452-3 du même code" ;

 "ce n’est que dans l’hypothèse où l’employeur aurait délibérément commis une faute d’une particulière gravité et où il reprocherait à l’administration d’avoir négligé de prendre les mesures de nature à l’empêcher de commettre le fait dommageable qu’il ne pourrait utilement demander que la charge de la réparation soit partagée par l’administration".

Ainsi hormis le cas d’une faute délibérée d’une particulière gravité commise par l’employeur, ce dernier peut se retourner contre le tiers, coresponsable du dommage, pour obtenir un partage de responsabilité à proportion de leur faute respective. Y compris pour la part de cotisation complémentaire d’accident du travail qui lui serait réclamée.

Conseil d’État, 9 novembre 2015, N° 359548

[1Le système du pont lumière, à l’origine de l’accident, comportait de nombreuses non-conformités par rapport à la réglementation.